J'avais lu le tome "Birth of Venom" l'an passé qui contenait les épisodes principaux de la saga du Symbiote et les toutes premières apparitions de Venom, il était désormais temps que je m'attaque à ce tome "Vengeance of Venom" qui en est la suite directe, et qui s'intéresse à l'époque où Venom est principalement un vilain de Spider-Man, avant qu'il ait ses multiples mini-séries solos. C'est aussi dans ce tome qu'on voit les débuts de Carnage.
J'ai vraiment adoré ce tome. On voit comment comment progressivement le scénariste David Michelinie pilote et développe sa création, Venom, dont la popularité incroyable à sûrement dû un peu le dépasser. On assiste à comment le perso s'est d'abord imposé en quelques sagas comme un ennemi majeur de Spider-Man et ensuite comment sa popularité énorme à engendré son pivot progressif vers le statut d'anti-héros.
Les deux premières sagas dessinées par Erik Larsen (Amazing Spider-Man #332-333 et #346-347) sont assez géniales. La première n'est pas la plus mémorable, mais contribue à faire monter la tension entre Spider-Man et Venom, à imposer le vilain comme une menace importante et dangereuse. En outre, c'est là que les premières germes du Venom anti-héros, protecteur des innocents, sont posées, avec la scène culte où il sauve un bébé. Mais on retiendra surtout sur ses épisodes pour la prise en main du personnage par Larsen qui donne au personnage certaines de ses caractéristiques essentielles comme les dents pointues, la longue langue et la bave. Il dessine vraiment le Venom iconique et on se régale. En outre, je préfère le dessin de Larsen à celui de McFarlane, qui a dessiné des choses mémorables sur Spider-Man et qui a redéfini graphiquement le personnage, mais que je trouvais bien trop inégal sur les personnages humains (et c'était rarement à mon goût à ce niveau là). Je trouve Larsen bien plus stable dans son dessin, surtout qu'il arrive parfaitement à être dans la continuité de McFarlane pour les séquences en costume, tout en étant un peu plus dans le cartoon et un peu moins dans les détails à outrance, ce qui n'est pas non plus pour me déplaire. Et j'aime bien comment il dessine les gars musclés à grosse mâchoires comme Eddie Brock ou Stone, ils sont amusants.
Et j'évoque Stone parce que cette première saga contient les vilains Styx et Stone, créés par Michelinie et McFarlane comme Venom, mais qui n'ont clairement pas eu la même popularité. Il faut dire qu'ils n'ont clairement pas le même charisme, même s'ils sont amusants et leur duo fonctionne plutôt bien, entre Stone mercenaire classique (mais du coup vraiment passe-partout) et Styx plus réussi, plus incontrôlable, et où le fait qu'il a toujours envie de toucher tout et n'importe quoi pour utiliser son touché mortel donne lieu à un running gag efficace, alors qu'en même temps le perso est une vraie menace en combat.
Y a aussi dans cette première saga des passages où Venom/Eddie Brock se ramène incognito chez Tante May, et ses passages sont toujours un régal. Ca instaure immédiatement un tension incroyable. En autre scène absolument géniale, on a ce moment incroyable où Eddie Brock est déguisé en flic à cheval à Central Park et bondit avec son canasson sur Spider-Man dans une case verticale incroyable avant de sauter du cheval et se transformer en Venom dans les airs dans une splash page. C'est crétin mais fantastique.
Et on est dans une période où Michelinie cherche des solutions pour mettre Venom au placard pendant un bon bout de temps entre les épisodes, avec des solutions assez radicales aux affrontements qui auraient pu être définitives que ce soit ici ou pour l'arc suivant. Là où à partir de la saga avec Carnage, il va se contenter d'envoyer le vilain en prison pour le ressortir plus facilement (vu que les prisons des comics de super-héros sont faites pour s'évader).
Mais c'est le duo d'épisode suivant (#346-347) qui est vraiment savoureux. C'est des épisodes que j'ai trouvé immédiatement iconiques, en particulier le #347 et qui sont peut-être le sommet de ce tome. Venom est de retour, Peter Parker a envoyé Mary-Jane voir sa famille pour la mettre en sécurité, et tout est fait pour donner l'impression que Venom et Spider-Man vont se faire un gros duel 1 vs 1 avec New-York pour terrain de jeu. Erik Larsen dessine un Venom plus fou que jamais, avec ses dents pointues qui partent dans tous les sens, et ça se lance dans une grosse course-poursuite avant de se terminer sur un gros cliffhanger.
Mais c'est donc l'épisode d'après qui est encore plus dingue, puisque c'est tout simplement l'affrontement final entre Venom et Spider-Man sur une île déserte. Pas d'alliés possibles, pas d'innocents en danger, pas de fusils des 4F à onde sonore sous la main, juste un combat entre les deux, avec toute la dynamique géniale des combats entre Venom et Spidey, où Venom est plus puissant physiquement que Peter et indétectable par le sens d'araignée du tisseur. Et le symbiote a en outre des pouvoirs de camouflage poussés dans cet épisode. Michelinie arrive vraiment à raconter un affrontement incroyable, où Peter se fait parfois traquer la jungle, et ce qui est top c'est de voir quel stratégie notre héros va réussir à trouver pour réussir à se débarrasser de son ennemi une bonne fois pour toute, alors que pendant ce temps, sa réserve de toile s'épuise. Et le coup de bluff final pour régler l'affrontement est franchement bien trouvé je trouve, permettant en plus de mettre Venom de côté de manière quasiment définitive, même si l'on sait que ce ne sera pas le cas. Et dans ce dernier épisode, Larsen se lâche de plus en plus sur la langue de Venom, on se régale également visuellement. Je crois que cet épisode a une bonne réputation auprès des lecteurs, en tout cas je l'ai personnellement immédiatement adoré. Mais c'est hélas le dernier dessiné par Larsen (qui a sûrement dû partir faire des comics Image à cet époque, mais je ne connais pas la chronologie exacte).
On arrive ensuite à Amazing Spider-Man #361-363 à savoir la saga Carnage. Et Michelinie frappe encore très fort. C'est Mark Bagley qui est au dessin, et il arrive très rapidement à montrer qu'il est à la hauteur, avec son Venom qui est un peu plus sage que celui de Larsen mais super efficace et iconique visuellement, et son Carnage qui est fabuleux, charismatique et terrifiant à la fois. Et alors que Michelinie avait réussi à faire de Venom une menace majeure pour Spider-Man, il arrive très vite à montrer que Carnage est clairement le cran au-dessus. C'est vraiment le big boss de fin, la menace ultime pour le tisseur, puisqu'en plus d'être surpuissant, c'est tout bonnement un serial killer ! Et bien entendu, les Avengers et les 4F ne sont pas dispos (ils sont toujours occupés dans ces cas là, même si les 4F ne seront pas si indisponibles que ça dans la suite de l'arc) et Peter Parker doit du coup s'en occuper seul. Le fait que Carnage est un tueur en série amène un côté morbide qui peut paraître un peu gratuit et de mauvais goût dans une série comme Amazing Spider-Man, mais je trouve que Michelinie s'en sort pas trop mal à ce niveau là, en ne faisant pas trop de massacres. Mais c'est vrai que je me demande comment toutes les publications autour de Carnage ont géré ça par la suite, car ça peut vite partir dans un truc malsain malvenu.
L'arc est en tout cas très bien mené, le scénariste montrant une fois de plus qu'il arrive super bien à gérer des épisodes principalement tournés autour d'affrontements, et surtout à écrire des combats longs et intéressants, ce qui est étonnamment loin d'être fréquent dans les comics de super-héros. On a le droit à un team-up de circonstance entre Spider-Man et Venom qui est forcément assez fascinant à voir pour un bon gros final face à Carnage. Bon, je reste un peu circonspect sur le passage avec le concert de Metal, mais globalement, c'est un arc vraiment très bon et très prenant, qui continue de fort belle manière la saga du symbiote. Et c'était assez fascinant de voir Spider-Man face à une menace aussi puissante et terrible que celle de Carnage, où on le sentait vraiment désespéré.
Avant de parler du dernier gros arc dessiné par Bagley, le tome est aussi rempli de petites histoires en back-up qui ont deux fonctions : développer un peu le passé de Venom (notamment enrichir et expliquer les premiers pas d'Eddie avec le Symbiote : comment il s'est habitué à ces pouvoirs, comment il a réussi à les maîtriser, et comment il a petit à petit mis au point sa vengeance face à Spider-Man) et surtout accentuer le côte anti-héros du personnage, montrer comment il peut opérer en solo et accentuer son côté "défenseur des innocents" qui va devenir de plus en plus important tout au long du tome et des différentes histoires. Globalement, tous ces back-ups sont des histoires très dispensables, qui sont en plus beaucoup moins bien dessinées que les arcs principaux.
Et on a aussi le droit à un épisode intitulé "Trial of Venom", le seul du tome qui n'est pas écrit par Michelinie, mais par Peter David, et qui fait suite à un épisode où Venom affrontait les Vengeurs je crois (mais je ne l'ai pas lu donc je ne sais pas trop) et qui n'est pas inclus dans ce tome. On a en tout cas une situation intéressante, où il y a le procès de Venom, qui est défendu par... Matt Murdock ! Et on a Spider-Man en témoin. On a donc tout un jeu de tension entre Spidey et Daredevil, et la grande question de savoir si Eddie Brock est responsable ou non des meurtres qu'il a commis en tant que Venom. Il y a des petits twists sympathiques, et globalement même si cet épisode n'était pas essentiel à la trame générale du tome, il n'est franchement pas désagréable à lire.
On arrive donc enfin au dernier arc : Amazing Spider-Man #374-375, qui a vraiment pour but de faire la transition une bonne fois pour toute entre le statut de vilain de Venom et celui d'anti-héros qui va avoir sa propre série : la fameuse mini-série Venom: Lethal Protector (elle aussi écrite par Michelinie, et qui fait partie des derniers écrits que le scénariste fera sur sa création).
L'arc se passe durant la longue saga du retour des parents de Peter Parker, on a toujours Mark Bagley aux dessins, et forcément quand Venom va se mettre à s'intéresser aux parents de Peter, le sang de ce dernier va ne faire qu'un tour. On a le droit à un bon combat entre Venom et Spidey, où les deux auteurs montrent qu'ils sont toujours aussi doué pour raconter de bons affrontements intéressants, inventifs et variés.
Cet arc va aussi grandement développé le passé d'Eddie Brock puisqu'on a son ex petite copine qui est mentionnée pour la première fois et qui apparaît et nous donne plein d'infos, avec la mention du père d'Eddie Brock également. Bref, on sent que la mini-série sur Venom est sur le point d'arrivée, et tout à coup le personnage est enrichi.
A côté, Michelinie développe aussi Silver Sable et son Wild Pack et on arrive à un bon gros affrontement dans un parc d'attraction vide entre Venom, Spider-Man, le Wild Pack, avec en plus Annie l'ex d'Eddie qui se ramène, et les parents de Peter qui sont là aussi. Un bon gros bordel qui amène à un combat pas trop mal et qui amène surtout une justification pas trop mal trouvée pour un pacte de non-aggression entre Peter et Venom, afin que les personnages puisse désormais exister chacun de leur côté, sans que Venom soit toujours mis au placard, et pour qu'il n'ait pas besoin de chercher à tuer Peter dès qu'il est en liberté.
Bref, un tome rempli d'arcs que j'ai trouvé vraiment très bons. Je m'attendais pas à une telle qualité, je me suis vraiment régalé. J'aime bien toute la tension qu'il y a entre Venom et Spidey, avec Venom qui connaît l'identité secrète de Peter, qui est plus fort, qui n'est pas visible par son sens d'araignée, etc. qui donne vraiment une bonne dynamique entre les deux. Et c'est vraiment fascinant de voir comment le personnage est développé au fil des épisodes, comment il prend de l'importance et comment son statut évolue. En outre, le tome forme vraiment un tout cohérent puisque quasiment tous les épisodes sont écrits par Michelinie qui pilote à ce moment là réellement la destinée de son personnage.
A mon sens, c'est une lecture essentielle si on cherche à savoir pourquoi Venom est devenu un personnage aussi iconique des comics Spider-Man, et aussi si on cherche à connaître les débuts du grand vilain Carnage. En outre, les dessins des arcs narratifs principaux sont vraiment solides, avec un Erik Larsen que j'ai trouvé plutôt excellent (à part peut-être sa Mary Jane qui fait parfois des têtes bizarres) et un Mark Bagley très solide et bien encré. Si vous préférez les histoires plus orientées sur la vie civile de Peter vous serez un peu déçus, mais en terme d'affrontements super-héroïques, on a ici quelque chose de vraiment très bon. On atteint clairement pas la profondeur et l'excellence de sagas cultes comme la Dernière Chasse de Kraven le Chasseur ou Daredevil: Born Again, mais ça reste à mon sens du bon comics de super-héros.