Il y a pas si longtemps, à peine un ou deux mois, dans deux critiques presque successives, je critiquais durement de mauvaises utilisations du procédé de retcon, à savoir intégrer de nouveaux éléments de continuité s'étant déroulé dans le passé d'un univers de fiction. J'insistais pourtant sur le fait qu'il existait aussi des réussites dans ce domaine, et parmi elles, un des cas de retcon à la fois les plus brutaux mais les mieux gérés, Sentry.
Car oui, vous ne savez pas tout sur l'univers Marvel. En réalité, il vous manque même la première brique, les fondations du milieu super-héroïque. Le premier et le plus grand des héros, Sentry. Vous n'êtes pas les seuls à ne pas vous souvenir de lui, parce qu'en fait, tout le monde a oublié son existence, y compris lui-même. Mais progressivement, il se met à retrouver la mémoire, et part en quête de ses anciens alliés, convaincu que son pire ennemi, The Void, est de retour, et cherchant dans le même temps à découvrir l'identité de la personne qui lui a volé son existence...
C'est fou comme The Sentry volume 1 est prévisible... tout en restant un récit captivant du début à la fin. Les 5 premiers tomes sont la quête de Sentry pour retrouver la mémoire, et après cela, une série de one-shot explique les liens entre Sentry et certains des personnages les plus iconiques de l'univers Marvel... suivis ensuite par un one-shot final qui révèle les deux grands secrets de cette série, et la façon dont ils sont liés. Et vous pouvez deviner ce final dès la fin du premier numéro. Mais c'est pas grave, parce que suivre les pas de Sentry est une expérience fascinante pour quiconque s'intéresse à cet univers.
Si The Sentry fonctionne si bien, c'est parce que la série a bénéficié d'un soin remarquable, qui se retrouve aussi bien dans le dessin que dans l'écriture. Car oui, si le récit est maitrisé de bout en bout (en même temps, l'idée en elle-même est très efficace et exploite avec bonheur le retcon, puisqu'au lieu de donner l'impression de plaquer des éléments sur une intrigue préexistante, on découvre ici qu'un pan entier de l'univers est resté dans l'ombre et va être raconté au lecteur qui jubile devant cette renaissance), il n'aurait pas autant d'impact sans l'excellent design du personnage et le travail remarquable de dessin et d'encrage de Jae Lee, qui livre sans doute dans cette série certaines de ses plus belles planches (j'ai particulièrement aimé le travail sur Sentry, forcément, mais aussi sur Mr Fantastic).
Et puis, le coup de génie pour moi c'est que la série fait réellement coexister deux réalités crédibles et cohérentes, sans que l'on sache laquelle nous plait le mieux, car les mondes avec et sans Sentry ont tous deux des flopées d'arguments à faire valoir...
Honnêtement, c'est un des incontournables de l'univers Marvel.