Un bon moment surprenant
The Wake est pas mal plébiscité outre-atlantique et je m'y suis donc mis pour me faire une idée. Et on rentre très vite dedans. Le dessin est particulièrement efficace pour nous faire ressentir...
le 14 déc. 2014
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D'un côté, nous avons Scott Snyder, superstar des scénaristes de comics de ces 7 dernières années. Il n'a plus grand chose à prouver. Entre American Vampire et quelques arcs de Batman, notamment La Cour des Hiboux, ce monsieur nous a confirmé qu'il savait manier habilement le fond et la forme aux travers de dialogues toujours plus bruts mais diaboliquement efficaces.
De l'autre côté de la page se trouve Sean Murphy que l'on connaît maintenant assez bien pour son travail sur Punk Rock Jesus et quelques issues d'American Vampire…entres autres. Son trait est aussi caractéristique que le tarin de ses personnages, avec ses angles secs, ses postures significatives et une habile gestion des plongées / contre-plongées. Le monsieur est doué et excelle surtout sur les plans d'ensemble donnant quelques fois le vertige de par leur gigantisme. Ça fonctionne et certaines planches valent le détour. En particulier sur The Wake.
Ces deux messieurs, accompagnés de Matt Hollingsworth aux couleurs, nous pondent 10 issues autour d'une trame basée sur une créature des mers. Et ce qui s'annonce être un huis clos marin jouant habilement entre la peur, l'étouffement et le mystère va ensuite prendre des proportions que l'on aurait peine à soupçonner en ne lisant que les 4 premiers chapitres.
À partir du cinquième (le point de rupture, le tournant) et surtout avec les suivants, l'histoire prend une toute autre tournure afin que Snyder puisse se lâcher, élargir son champ de vision et partir sur des considérations presque méta-physiques sur la conditions humaines, notre propos, notre but et surtout, nos actions. Et pourquoi pas ? Généralement je suis avide de ce genre « d'œuvre totale » qui, dans certains cas, arrivent à nous ouvrir de nouvelles perspectives à titre personnel.
Sauf qu'ici, quelque chose bloque.
The Wake aurait gagné à être développé sur quelques chapitres supplémentaires. Car en l'état, son plus gros problème réside dans sa construction. Snyder (et Murphy) essaie tant bien que mal de jongler entre divertissement (action, fusillades, combats) et scénario profond et on sent très vite qu'il est dépassé par le média dans lequel il a choisi de conter cette histoire. Les chapitres ont du mal à s'emboîter intelligemment, l'empathie avec certains personnages a du mal à se créer avec le lecteur quand d'autres seconds couteaux tombent littéralement à l'eau. Il y a du gâchis et ça se sent. Seulement 10 chapitres, ce n'est pas assez. Et c'est son plus grand mal.
L'autre problème est – mais là c'est de l'ordre purement subjectif – sa trame de fond. Je veux parler du « grand plan » en toile de fond, celui que cherche à comprendre les personnages tout au long de l'aventure. D'où vient cette créature, pourquoi, etc.
Si sur le papier, cela peut sembler fonctionner, une fois mis en place au sein du comics et, couplé avec ce rush lors du dernier chapitre, la pilule a du mal à passer. Ce n'est pas tant que certaines questions restent en suspens. Cela pourquoi pas, des œuvres magistrales ont su s'imposer de la sorte en laissant plus de la moitié de l'histoire non résolue (2001 pour ne citer que lui). Le problème n'est pas là, mais dans la manière dont il est distillé. À tel point que le plan global nous paraît au final très grossier. Trop grossier. Presque caricatural. Et du coup, difficile d'adhérer complètement à cette approche. La réflexion pourra sembler puérile pour certains quand d'autres décideront de l'oublier immédiatement. Seuls les plus convaincus oseront creuser un temps soit peu les quelques bonnes idées structurant l'ensemble. Il y a du bon, surtout lors de l'utilisation de certains « éléments » que l'on voit rarement ailleurs, mais le tout se voit gâcher par une fin trop expédiée, peinant alors à convaincre. Surtout cette dernière page… Franchement…
Alors oui, une certaine affection naît avec The Wake lorsqu'on ferme définitivement l'ouvrage. Il ne laisse pas indifférent et force est d'avouer que je l'ai apprécié. Que ce soit grâce à certains dialogues particulièrement truculents ou d'autres splash-pages impressionnantes, entre abîmes, abysses et monstres gigantesques. Ou de par son univers, haut en couleurs, extrêmement riche, autant d'un point de vue ethnique que social, dépassant la simple considération humaine et terrestre pour quelque chose de tellement plus grand. Oui, le terreau est clairement là. Mais un manque de place, un mauvais découpage, des yeux plus gros que le ventre et quelques personnages trop caricaturaux ou absents… tout cela mène à une demi-impasse. Une histoire certes bonne mais pas aboutie, qui n'arrive pas à délivrer tout son potentiel. Il y avait moyen d'aboutir à quelque chose de grand. D'encore plus grand.
Et c'est dommage. Très dommage.
Créée
le 8 sept. 2017
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