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[Critique de la série complète]



Scénarisée par Éric Corbeyran (Le Chant des Stryges) et dessinée par Grun (La Conjuration d'Opale, sur une histoire du suscité), Metronom' met en scène un univers dystopique classique. Dans un futur pas si lointain, la population, entassée dans des villes tentaculaires, vit sous le joug d'un gouvernement autoritaire et liberticide. Depuis quinze ans, les interdits (opinion, expression, réunion, manifestation, possession d'œuvres d'art, suicide) se multiplient, chaque proposition ayant été démocratiquement approuvée par une procédure de vote électronique. En sus d'une police nombreuse et brutale, l'incitation appuyée à la délation permet au système de récupérer des dizaines de milliers de déviants pour les envoyer en reprogrammation, une sorte de traitement par hypnose qui les remettra bien vite sur le droit chemin.


La belle mécanique du pouvoir s'enraye néanmoins lorsqu'une navette spatiale, partie acheminer un convoi de déchets vers une décharge orbitale, revient sur Terre avec un équipage presque entièrement décimé. Frappés de folie suite à la découverte d'un organisme inconnu dans la poubelle céleste, ils se sont littéralement entre-tués. Le seul survivant, Doug Forester, est placé en quarantaine dans le plus grand secret. C'est en enquêtant sur son sort, et sur le mystérieux virus qui a rendu fous ses compagnons, que Lynn, sa femme, et Floréal Linman, un journaliste franc-tireur en rupture de ban, vont déclencher un mouvement qui tournera in fine à une violente remise en cause du pouvoir en place.


En cinq tomes, Corbeyran et Grun brossent un tableau sombre d'un avenir où l'individu, dépossédé de la plupart de ses libertés, finit littéralement écrasé par le système. On aperçoit distinctement dans ce scénario les influences des grands classiques de la littérature contre-utopique, de 1984 au Meilleur des mondes en passant par Un Bonheur insoutenable et Les Monades urbaines. L'explication finale sur la nature de ce totalitarisme, dans les dernières pages du cinquième tome, est plutôt bien trouvée et confère à ce système une astucieuse touche d'originalité. Drapée comme il se doit dans un romantisme naïf (« Les mots sont plus forts que les armes » et autres illusions de ce genre), la quête de vérité et liberté menée par les personnages ne manque pas d'inspirer, en contrepartie, une légitime sympathie. Et comme Corbeyran, dans le respect du pessimisme des ouvrages cités ci-dessus, évite soigneusement de tomber dans le piège du happy end, la musique de fond de Metronom' sonne juste.


En revanche, le principal bémol vient des personnages eux-mêmes, qui ne parviennent jamais à susciter plus qu'une distante approbation de principe. C'est en partie la faute aux dessins : alors que les décors urbains, déclinés dans des tons essentiellement bleu froid et marron sale, sont très réussis, Grun ne parvient pas à insuffler des expressions vraiment marquées à ses personnages. On peine donc à s'identifier émotionnellement à Lynn, Floréal et les autres, et leur sort finit presque par nous indifférer. Mais d'un autre côté, ce détachement envers les personnages est peut-être volontaire de la part des auteurs, et renforce en tous cas la puissance du message. Quoi qu'il en soit, et même si de nombreux thèmes sont simplement effleurés sans être traités en profondeur, il y a plein de bonnes idées dans Metronom'. À défaut d'être captivante, cette série s'avère néanmoins très intéressante.

mazthemaz
7
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le 8 févr. 2017

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The Maz

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