The Revenant
Vu de l'Europe, et même de la France, le Canada, c'est loin. Ça paraît sombre et froid, et peu de gens par ici savent qu'au début du XXe siècle, existait là bas un mouvement artistique, le Groupe des...
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le 7 sept. 2019
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Vu de l'Europe, et même de la France, le Canada, c'est loin. Ça paraît sombre et froid, et peu de gens par ici savent qu'au début du XXe siècle, existait là bas un mouvement artistique, le Groupe des 7, constitué de peintres qui ambitionnaient d'appliquer les nouvelles idées de la peinture moderne européenne à la description "émotionnelle" de la nature canadienne. Ni même que "l'âme" de ce groupe fut Tom Thomson, aujourd'hui toujours l'une des fiertés du Canada... Tom Thomson, guide dans le Nord Canadien, qui sut capturer comme personne, entre expressionnisme et abstraction, la beauté de paysages sauvages mais aussi les émotions puissantes qu'elle provoque... Tom Thomson, mort mystérieusement à 40 ans à l'aube de la célébrité...
La première très belle idée de Sandrine Revell, c'est de nous raconter dans son "Tom Thomson" l'enquête menée quarante ans plus tard par un amateur déterminé à retrouver le corps du peintre, possiblement enterré loin de sa sépulture officielle, et de retrouver les témoins de ses derniers jours pour révéler la "vérité" sur ce drame humain, qui priva en outre le Canada de l'un des génies qui aurait pu, aurait dû faire progresser l'Art. D'où une construction habile, un peu post-moderne ceci dit, entre les deux époques, l'un des récits (celui de 1956) progressant chronologiquement vers la résolution - terriblement dérisoire, terriblement humaine - de l'énigme, l'autre revenant au contraire sans cesse vers un passé plus lointain, nous permettant de comprendre peu à peu les raisons d'une vocation - pour la peinture, pour la vie dans le Grand Nord - et les sources d'un talent unique. Le tout est absolument passionnant, d'une grande profondeur, à même de satisfaire quiconque s'intéresse aux mécanismes de la création artistique.
La seconde très belle idée de Sandrine Revell, c'est de travailler le graphisme de sa BD dans une continuité respectueuse de l'esprit de Thomson, sans pour autant se contenter de faire de la pure copie. D'adapter donc les intuitions géniales du peintre dans le cadre d'une narration en format BD, et ainsi non seulement de nous fournir notre content d'images sublimes - il faut vraiment prendre le temps de déguster chaque page de "Tom Thomson" -, mais aussi une expérience esthétique et émotionnelle forte, celle de la découverte d'une nature sauvage, rude, austère, sublime. Au fond de nous, à une époque où nous craignons, et à juste titre, pour la survie de ces étendues sauvages, cette expérience se révèle terriblement émouvante. Et accentue encore l'importance de ce livre singulier, aussi ambitieux thématiquement que remarquable en termes de narration.
[Critique écrite en 2019]
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le 7 sept. 2019
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