https://branchesculture.wordpress.com/2015/06/30/critique-les-cinq-de-cambridge-lemaire-neuray
On change d'époque mais pas une équipe qui gagne. Après avoir exploré une face méconnue de la Seconde Guerre Mondiale avec le remarquable diptyque "Les Cosaques d'Hitler", Valérie Lemaire et Olivier Neuray persistent et signent dans la veine de l'épopée historique en s'intéressant cette fois à l'incroyable histoire de cinq Anglais (rejoints par d'autres) qui se mirent au service de l'URSS dès les années 30. Le nom de ce réseau d'espions? Les cinq de Cambridge.
On ne chasse pas si facilement une tragédie, il en est qui vous suivent, vous poursuivent, sans relâche. Témoin à distance du traquenard qui coûta la vie et la liberté de nombreux cosaques (voir Les cosaques d'Hitler), le jusque-là honorable Anthony Blunt, ex-conservateur de la collection royale et proche de la reine, est actuellement en pleine déchéance. Traîné en traître à sa nation dans les médias, Anthony voit son passé de recruteur de talents pour l'URSS remonter à la surface, plus de trente ans après, dans les années Thatcher. À l'invitation des deux frères, Kolia et John (présents dans le premier diptyque des deux auteurs et faisant lien, aussi gros soit-il) ), Anthony accepte de revenir sur ses jeunes années, celles durant lesquelles tout a basculé et lui et d'autres jeunes gens, universitaires comme lui, ont accepté et se sont encouragé à fondé un réseau d'espions rallié à la cause soviétique. De soirées en double-jeux et en moments de doute, les cinq de Cambridge vont naître.
On prend les mêmes et... on ne recommence pas vraiment. Car si Kolia et John font le lien, c'est bien l'histoire d'autres hommes, ayant bien existé, dont il est question. Et, par le biais de la fiction, Valérie Lemaire et Olivier Neuray trouvent à nouveau la bonne porte d'entrée. Le reste n'est qu'un (trop) long flashback sans retour au présent. Trop long mais loin d'être inintéressant. De par le travail sur l'ambiance de cette nouvelle époque explorée. Dès la cinquième planche, on se trouve propulsé en 1931 sur la lancée d'un moto à fière allure. Le pays noir anglais, on y est, on en sent les fumées et le dur labeur. Ultra-documenté et vivant, un des grands atouts de cet album.
Même si pour le coup; le moteur est un diesel, et si l'on suit avec plaisir cette bande de copains et espions en devenir, on se perd un peu à force de dialogues trop explicatifs et d'une multitude de personnages. On s'y perd mais on ne lâche rien, et on fait bien: le final, inattendu, a vite fait de nous remettre en piste pour mieux attendre le deuxième tome (des trois prévus) qui s'annonce, après la mise en place, plus palpitant! Pour les amateurs d'histoire mais pas que, Les cinq de Cambridge a tout ce qu'il faut pour séduire un large public.