Lorsque le deuxième tome s’était terminé, nous avions laissé Mattéo à la fin de la guerre. Condamné au bagne, il finit par être amnistié et devient tailleur de pierre à Paris… Une vocation héritée du bagne ? Toujours est-il que j’étais persuadé que « Mattéo » serait un diptyque et j’accueille donc ce nouveau tome avec autant de plaisir que de surprise. Jean-Pierre Gibrat est toujours au manette, que ce soit au scénario ou au dessin et le tout est publié chez Futuropolis et pèse pas moins de 75 pages.

« Mattéo » est une série qui sait magner l’ellipse entre ses tomes… Près de 10 ans ont passé depuis l’opus précédent. La première guerre mondiale commence à s’éloigner. Désormais, ce sont les trois semaines de congés payés qui font l’actualité. Le front populaire de « Léon » est au pouvoir, ce qui n’empêche pas les radicaux socialistes (ici interprété par Augustin) et les communistes (Paulin) de s’empoigner… Mais l’heure est aux réjouissances et nous retrouvons Mattéo accompagnés de ses amis Augustin (en couple avec la jolie Amélie) et Paulin revenant au pays pour les vacances.

Après la Grande Guerre, c’est d’insouciance dont on nous parle ici. Les robes sont légères, le soleil omniprésent et on passe son temps à parler politique en buvant du vin. Cette ambiance est parfaitement retranscrite. Les premières buvettes, les plages publiques bondées, le café en terrasse… On s’y croirait ! Et alors que ce tome a l’audace de sortir au début de l’hiver ! Hélas, bien sûr, la gravité reprend peu à peu le dessus. En effet, Blum décide de ne pas aider l’Espagne face à Franco. Les discussions des amis se font plus insistantes. L’Espagne n’est qu’à quelques encablures de là…

Mais que serait un tome de « Mattéo » sans les femmes ? Elles sont deux ici, Juliette (bien sûr !) et Amélie. Hélas, Jean-Pierre Gibrat retombe dans ses travers (ou fantasmes ?) en nous dessinant deux femmes qui sont à peine discernables graphiquement ! Quand on voit son talent au dessin, on ne peut que se dire que l’homme à un type de femme à lui bien précis ! Mattéo retrouve donc son amour de jeunesse qui essaie de survivre avec son fils unique depuis qu’elle a quitté son (fortuné) mari. Quant à Amélie, le fait qu’elle soit la seule femme du groupe lui donne un statut particulier…

Le trait de Jean-Pierre Gibrat reste un régal pour les yeux. Chaque case est magnifique et tout cela fleure bon l’été. Les couleurs directes sont splendide et le trait délicat et expressif. C’est certainement l’un des meilleurs dessinateurs de bande-dessinée de son temps. Et dans le réalisme, il explose totalement.

Encore une fois, Gibrat parvient à mêler petite et grande histoire. Paraissant cynique au premier abord, Mattéo finit toujours embarqué dans des évènements qui le dépassent. En refermant l’ouvrage, on n’a qu’une envie : lire un quatrième tome ! C’est certainement la meilleure série de Gibrat qui, après la première guerre mondiale, a su confirmer son intérêt en plein congés payés !
belzaran
8
Écrit par

Créée

le 21 janv. 2014

Critique lue 228 fois

4 j'aime

1 commentaire

belzaran

Écrit par

Critique lue 228 fois

4
1

D'autres avis sur Troisième époque (août 1936) - Mattéo, tome 3

Troisième époque (août 1936) - Mattéo, tome 3
caiuspupus
9

Critique de Troisième époque (août 1936) - Mattéo, tome 3 par caiuspupus

A la fin du tome précédent, Mattéo se dénonçait et partait pour le bagne. 18 ans après, il est de retour en France. C'est le Front Populaire, la France est heureuse de vivre, les congés payés...

le 9 févr. 2014

3 j'aime

Du même critique

Le Chemisier
belzaran
4

Quelle vacuité !

Avec le scandale de « Petit Paul » et ses accusations d’être un ouvrage pédopornographique, on aurait presque oublié qu’au même moment ou presque Bastien Vivès publiait « Le chemisier ». Ce roman...

le 22 févr. 2019

38 j'aime

L'Âge d'or, tome 2
belzaran
7

Une impression d'inachevé

Le premier tome de « L’âge d’or » avait impressionné par son dessin, notamment par ses grandes illustrations façon tapisseries médiévales. Racontant un récit initiatique somme toute classique, ce...

le 24 févr. 2021

23 j'aime

1