Brouillon
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le 24 mai 2021
D’emblée, l’objet intrigue, à commencer par cette couverture représentant un empilement de têtes façon poupées russes. Quatre têtes dépareillées engoncées les unes dans les autres, dont la partie visible distille un certain mystère. La première, surplombant les trois autres, est de profil, ne laissant apparaître que le regard méfiant d’une jeune femme aux cheveux de jais. La seconde ne montre que des yeux cachés par des lunettes de soleil aux reflets bleutés, contenue dans la troisième, dont on ne voit que des pommettes rouges, des cheveux blonds ainsi qu’une bouche maquillée de rouge à lèvres fumant la pipe, clin d’œil magrittien serait-on tenté de croire, sentiment que viendra confirmer cette lecture aux accents surréalistes. La dernière enfin, révèle une figure funèbre vêtue de noir dont on distingue également les épaules, sorte de croisement entre la faucheuse et Dark Vador.
Une couverture qui peut assez bien résumer cette narration fragmentée, qui se retrouve également dans la thématique, puisqu’il est question d’un personnage à personnalités multiples, incarné par une jeune femme que va être amené à rencontrer le principal protagoniste, Adam Whistler. Ce thriller surréalistico-fantastique, difficile à classer, lorgnant vers le genre espionnage avec en filigrane le mythe de Frankenstein et un brin de conspirationnisme, reste plutôt intrigant malgré une lecture parfois chaotique où peut-être le scénario se semble pas avoir autant d’importance que la réflexion existentialiste parcourant le récit. On y trouve par ailleurs moult références à la pop-culture, notamment au cinéma (fort logiquement puisqu’Adam Whistler est réalisateur), à des parodies de vieux cartoons et même à la Bible. Des références témoignant de l’érudition du scénariste, John Harris Dunning, présenté en fin d’ouvrage comme un éminent spécialiste de la BD, à l’initiative de « la plus importante exposition » sur le 9e art au Royaume-Uni.
D’un point de vue graphique, Michael Kennedy est en phase avec le récit. Et pour ce qui est d’un rapprochement avec la peinture, tant qu’à évoquer Magritte, on peut également citer Roy Lichtenstein voire Edward Hopper, rien que pour l’atmosphère de solitude se dégageant de ces cases. Sur le plan strictement bédéesque, le trait gras du dessinateur, entre réalisme et minimalisme, l’absence de mouvement et les personnages figés rappellent beaucoup Charles Burns ou Mezzo, en moins abouti toutefois.
Cette approche intellectualisante en découragera certains et en séduira d’autres, probablement les plus cérébraux d’entre nous. Ne serait-ce que par le sujet évoqué, cette maladie étrange et au demeurant méconnue qu’est le « trouble dissociatif de l’identité », malgré son approche beaucoup plus fictionnelle que médicale. « Tumulte » reste donc digne d’intérêt, même s’il manque un certain souffle pour en faire une œuvre véritablement marquante, de l’envergure des auteurs précités.
Créée
le 5 août 2020
Critique lue 99 fois
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