Force émotionnelle
Eisner a toujours eu pour ambition de renouveler la forme - plutôt classique il est vrai - du Comics US, et de libérer ses récits du carcan des petites cases, et il a petit à petit développé son...
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le 7 nov. 2014
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"Qualifiez moi, si vous voulez, de témoin graphique de la vie, de la mort, des coeurs brisés et du combat incessant pour la primauté... Ou au moins la survie."
Eisner est un gosse de New York, et il choisit de revenir à la bande dessinée après son succès des années 40 Le Spirit, pour relater enfin, en 1978 et à 60 ans, la vie des "petites gens" dans les années de la Dépression. Il a élaboré des fictions basées sur ce qu'il a vécu et observé, restituant l'ambiance d'une époque, dans les quartiers pauvres de la grosse pomme. Il maintiendra cette veine réaliste dans la plupart de ses oeuvres suivantes.
Une histoire de ce recueil est consacrée à l'un de ces chanteurs de rue qui interprétaient des airs d'opéra sous les fenêtres dans l'espoir de quelques pièces ; une autre histoire s'attache à un concierge solitaire. La dernière a pour titre "Cookalein", un mot signifiant "cook alone" en mélangeant typiquement l'anglais et le yiddish, et désignant les fermes où les pauvres pouvaient s'offrir un séjour de vacances à 200 km de New York dans les Catskills, à condition de faire la popotte eux-mêmes...trois générations y coexistent, et le récit se concentre sur quelques jeunes adultes en quête d'amour ou d'un partenaire avec une situation avantageuse.
L'histoire qui donne son titre au recueil, un contrat avec dieu, fut selon les propres termes d'Eisner, sa façon d'exorciser la mort de sa fille de 16 ans, survenue 8 ans plus tôt. Dans ce récit, un rabbin qui depuis son enfance a consacré sa vie au service des autres, prend la voie du capitalisme après le décès de sa fille adoptive, événement qui brise les termes d'un pacte qu'il avait passé avec dieu dans son enfance.
Eisner indique dans son introduction au recueil The Contract With God Trilogy qu'il a choisi de présenter son oeuvre aux éditeurs (peu intéressés) comme un "roman graphique", expression qui a connu le succès quelques années plus tard.
On ne peut pas vraiment dire que son dessin soit asservi à la narration : si son style est parfois à la limite de l'esquisse ou de la caricature, il représente efficacement aussi bien les décors que les individus, qui dans la vraie vie ne ressemblent pas tous aux jeunes premiers athlétiques des comics... Sans fioritures, il va à l'essentiel, incluant tout ce qui est nécessaire pour nous permettre d'appréhender le monde qu'il recrée. Dans ses récits, la simplicité et l'honnêteté priment, et il en résulte une beauté que l'on peut considérer comme propre au medium : un dessin dynamique qui réussit à évoquer la vie avec une relative économie de traits - un visage marqué par les ans, une silhouette voûtée, un intérieur miteux, un pâté de maisons délabré... Un paysage.
Par sa mise en page adaptée au format réduit du comic , son utilisation d'un noir et blanc épuré (mais pas tant que ça étant donnée sa facilité à tout représenter), et son choix de conter les aléas des "gens normaux", Eisner se rapprochait sans le savoir du manga, et en particulier du genre réaliste gekiga.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Gekiga
Pas besoin de préciser que sa lecture est obligatoire - mais s'il restait le moindre doute...
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Créée
le 26 août 2018
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