Il y a trente ans exactement, la série Spirou et Fantasio amorce un virage crucial de son existence. Après trois albums décriés signés Nic et Cauvin, ce sont deux nouveaux auteurs encore peu connus, Tome et Janry, qui reprennent le flambeau avec Virus. L’expérience rencontre un certain succès car ils sortiront jusqu’en 1998 quatorze albums consacrés aux deux reporters et créeront même la série dérivée Le Petit Spirou.

Mais de quel genre de virus s’agit-il ? Du genre qu’on rencontre aux alentours d’un bateau en quarantaine, tel un Fantasio à la recherche du scoop tombant par hasard sur un personnage verdâtre à moitié mourant. Surprise ! Cette épave humaine, c’est John Héléna dit La Murène, truand notoire qui croisa naguère le fer avec Spirou et Fantasio. Peu menaçant, il affirme s’être échappé du bateau, et surtout être porteur d’une maladie contagieuse contractée dans une base en Antarctique suite à un grave accident. Appelé à la rescousse, Spirou conduit tout ce beau monde à Champignac où le comte, jamais à court d’idées, affirme avoir la possibilité de sauver les malades à condition d’organiser une expédition sur place. Voilà comment Spirou, Fantasio et leur ancien ennemi se retrouvent au pôle sud, non sans faire escale dans une base russe. Evidemment, tout cela serait serait trop facile si un mystérieux groupe armé n’avait pas intérêt à faire capoter la mission de sauvetage.

Dès les premières pages, le ton est donné. En effet, on est directement mis en présence d’une potentielle épidémie au beau milieu d’un port investi par l’armée, puis d’une base polaire isolée : une situation potentiellement pesante que les facéties de Fantasio et les commentaires de Spip viennent efficacement désamorcer (avec la participation d’un phoque enthousiaste). L’album marque aussi le retour de personnages secondaires que les malheureux Nic et Cauvin n’avaient pu utiliser : l’indispensable comte de Champignac, dont le rôle est ici majeur (au cas où cette couverture, probablement dessinée sous acide, ne vous en aurait pas convaincu), et une Murène bien moins mordante que précédemment.

En fait, tout ce qui fera le succès des albums de Tome et Janry est présent dans Virus : le dessin à la fois coloré, classique et expressif, l’humour qui peut surgir tant d’un coin de case que d’un dialogue, des personnages convaincants, une trame dense qui exploite chaque page à son maximum, et bien sûr des thèmes qui collent à l’époque (en 1984, le monde découvre à peine l’épidémie de sida) tout en conservant la naïveté propre à la série. Plus qu’un simple démarrage pour de nouveaux auteurs, ce trente-troisième album est surtout une vraie réussite et un nouveau départ pour la série… même si le meilleur est encore à venir.
Nonivuniconnu
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le 17 août 2014

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