Virus (1982)

Il est intéressant de relire le premier album d'une reprise antérieure. Celle de Tome & Janry en l'occurrence. Alors que le Journal de Spirou termine la publication de La Ceinture du grand froid de Nic & Cauvin en 1981-82, c'est Virus qui lui succède (avant de repasser le relai pour La Boîte noire).
Dans cette aventure qui débute à la manière d'un bon polar (ambiance de docks, mise en quarantaine d'un cargo), on plonge dans un univers plus sombre que dans La Ceinture, plus naïf. Ce qui n'empêche pas l'humour. Les dialogues de Tome sont excellents (cf. "Ben quoi, on entre comme ça ?" - "Pourquoi ? T'avais une clef ?") et le scénariste a la bonne idée de faire intervenir à nouveau John Héléna et les p'tits mélanges mythiques du comte de Champignac. C'est là qu'on peut opérer une comparaison avec la reprise actuelle de SPIROU : Là où Tome & Janry faisaient subtilement appel aux références à Franquin dans un scénario qui les rendaient nécessaires, Vehlmann & Yoann font du rentre-dedans avec des Zorglub ou des Vito Cortizone sans que cela paraisse indispensable.

Virus donne le ton du SPIROU moderne. Janry reprend le style graphique de Panade à Champignac et laisse tomber les raideurs du personnage des albums précédant celui-ci. Son style s'apparente plus au Franquin de GASTON (et de Panade) qu'à celui du SPIROU traditionnel (jusqu'à QRN). A cet aspect visuel très soigné, s'ajoute une histoire beaucoup plus sérieuse qu'il n'y paraît, puisque les auteurs dénoncent certaines pratiques industrielles, rejoignant encore Franquin dans son esprit critique du monde contemporain ainsi qu'on a pu le voir dans Le Dictateur et le champignon, QRN sur Bretzelburg ou Z comme Zorglub.

Donc : Bon dessin, bon scénario, beaucoup d'humour.
Virus à sa parution était le meilleur album depuis QRN. Par la suite Tome & Janry vont s'affirmer comme les dignes successeurs de Franquin et créeront quelques albums incontournables avant de laisser malheureusement la place à une succession de bras cassés (pas l'idéal pour écrire ou dessiner).