On a tous grandi dans l'idée des super-héros dans l'esprit des comic-books Marvel où DC, ces surhommes rarement remis en question, que ce soit par leurs méchants, ceux qu'ils protègent, ou eux-mêmes. On retiendra également de ces grandes séries étalées sur des décennies le nombre incalculable d'incohérences qu'elles possèdent.
Mais là, on parle de Watchmen, et c'est tout autre chose.
Alan Moore à reussi quelque chose de grand : proposer un univers si fermé, mais pourtant si riche, détaillé, immersif. Un univers qui n'a beau n'exister que sur quelques jours, mais qui parvient si subtilement à emmener le lecteur pour un voyage de plusieurs décennies.Un univers où rien n'est laissé au hasard, où le moindre détail a été étudié et conçu pour en devenir une pièce maîtresse, sans laquelle tout l'édifice s'écroulerait.
Mais à quoi bon parler de cet univers sans mentionner les personnages qui l'habitent. De Rorschach, sociopathe désabusé par la nature humaine et enfermé dans une vision manichéenne du monde, à Ozymandias, incarnation même de l'ambiguïté morale à son paroxysme, en passant par le Hibou et Jupiter, ne sachant où se mettre dans ce monde au bord de la guerre ouverte, et n'ayant plus que leur amour comme point de repère, et par le Coméden, soi-disante "parodie" d'une humanité bestiale et cruelle, s'avouant finalement vaincu devant l'horreur de ce trame dans l'ombre.
Mais que dire du plus important d'entre eux, le point central de tout cet univers, son créateur en quelque sorte, le docteur Manhattan. Un être omnipotent considéré comme un dieu, alors qu'en ses propres termes, il n'est qu'une "marionnette qui peut voir ses fils". Un être si puissant, et pourtant si humain, malgré le détachement dont il se targue pendant quasiment toute l'oeuvre.
Le scénario aussi propose quelque chose de particulier au lecteur, où chaque pas en avant dans le scénario est suivi de trois pas en arrière, permettant de saisir toute la complexité et la profondeur des protagonistes. Un procédé atypique ponctué d'éléments plus orthodoxes encore, notamment la mise en abîme des "Tales of the Black Freighter" et le twist final, véritable pied de nez aux conventions d'écriture du genre.
Que dire d'autre pour conclure ? Watchmen n'est qu'une portion d'une histoire aux origines et aux conséquences bien plus vastes que ce qui est exploré dans l'oeuvre. Mais a-t-on besoin de voir toutes ces choses ? Non. Trois jours suffisent. Les trois jours où tous les éléments se mettent en place, interagissent et forment l'image finale : le châtiment de l'humanité pour avoir flirté avec la troisième guerre mondiale.
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