Seven Bugs.
Concurrent direct de "Fourmiz" à l'époque où Pixar et Dreamworks étaient encore les seuls à se tirer dans les pattes en volant les concepts de l'autre, "1001 pattes" est le second long-métrage de...
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le 7 avr. 2014
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Tout commence en 1991 lorsque Bernard Werber, célèbre écrivain français, se lance dans la rédaction de sa trilogie du Cycle des Fourmis. Il y dépeint les fourmis comme des insectes complexes et très intelligents, et propose à l'illustrateur Guillaume Aretos de réaliser plus de 300 dessins pour L'Encyclopédie du Savoir Relatif et Absolu, ouvrage accompagnant sa trilogie.
C'est alors que l'ouvrage atterrit entre les mains des patrons de la chaîne de télévision Canal +. Attirés par l'idée d'adapter cet univers, ils proposent ensuite le projet au Studio Disney, qui aime le concept mais ne se sent pas prêt à devoir payer les droits d'auteur et connaît à ce moment-là des difficultés au niveau de sa direction.
En effet, Jeffrey Katzenberg, qui s'apprêtait à reprendre le poste de directeur chez Disney, se le voit soudain refuser. Il décide alors de quitter le studio en 1994 et fonde, à l'aide de Steven Spielberg et de David Geffen, une société de production et de distribution destinée à rivaliser avec Disney : Dreamworks SKG (pour les initiales des trois fondateurs).
En 1994, lors d'un dîner entre les principaux membres de l'équipe de Pixar, leurs pensées se tournent vers un projet futur. L'idée de collaborer avec Disney pour réaliser un film avec des fourmis refait surface. John Lasseter, principale figure de Pixar, propose au Studio Disney de s'inspirer de la fable d'Esope La cigale et la fourmi, dont nous connaissons surtout la version de 1668 écrite par Jean de la Fontaine, et dont Walt Disney avait déjà tiré son inspiration en 1934 pour réaliser un court-métrage des Silly Symphonies.
Peu après la sortie de Toy Story, premier film d'animation issu de la collaboration entre les studios Disney et Pixar, la production de 1001 pattes est lancée, John Lasseter étant épaulé par Andrew Stanton dans la réalisation.
Mais quelques mois plus tard, l'équipe de Pixar prend connaissance d'une nouvelle affligeante en feuilletant les journaux commerciaux. Non seulement Dreamworks s'est lancé dans un projet très similaire au leur : la réalisation de Fourmiz, un autre film d'animation en images de synthèse, avec une fourmi comme personnage principal. Mais en plus de cela, le studio a engagé comme directeur artistique Guillaume Aretos, l'illustrateur de Werber.
Pour Lasseter et Steve Jobs, directeur de Pixar à cette époque, il n'y a aucun doute sur l'origine de ce plagiat : Katzenberg, le fondateur de Dreamworks, cherche à se venger du complot dont il a été victime chez Disney. Il n'a par ailleurs pas dû effectuer trop d'efforts pour s'emparer de l'idée de Pixar. En restant en contact avec Lasseter après son départ de chez Disney, le projet de 1001 pattes lui a été présenté dans les moindres détails, sur un plateau d'argent...
Mais certaines questions de la part du producteur auraient dû éveiller les soupçons de Lasseter. Katzenberg semblait porter beaucoup d'importance à la date de sortie de 1001 pattes, comme s'il préparait quelque chose...
En effet, alors que Fourmiz devait initialement faire sa sortie au printemps 1999, celle-ci est déplacée en octobre 1998, soit juste avant la sortie de 1001 pattes, pour lui concurrencer au box office.
Une version de la querelle entre les deux studios affirme même que Dreamworks aurait versé une lourde somme d'argent à Pixar pour pouvoir sortir Fourmiz avant 1001 pattes, alors que la réalisation de ce dernier était bien plus avancée. Mais notons que si j'ai choisi de vous exposer la version de Pixar, il s'agit d'une querelle controversée entre Lasseter et Katzenberg ; par conséquent, il existe une autre version qui affirme que Katzenberg avait lancé son projet avant de connaître les intentions de Lasseter.
Fourmiz fait donc sa sortie quelques mois avant 1001 pattes, mais cela n'empêche pas ce dernier de représenter un succès au box office et d'aller jusqu'à dépasser Fourmiz au niveau mondial.
Malgré les années passées depuis cette histoire et les éloges recueillies par les deux films d'animation, les tensions entre Dreamworks et Pixar ne se sont jamais complètement estompées...
1001 pattes raconte l'histoire d'une colonie de fourmis chargée depuis toujours de récolter de la nourriture pour les sauterelles. Un jour, Tilt, une fourmi sympathique qui cherche à venir en aide aux autres par ses inventions, renverse par inadvertance toute la réserve d'offrandes. Furieux, le Borgne, dirigeant du gang des sauterelles, somme la Reine des fourmis et sa fille, la Princesse Atta, de lui rapporter une quantité de nourriture deux fois supérieure en guise d'indemnisation. Une fois les sauterelles reparties, Tilt se dit qu'il doit agir pour se faire pardonner. Il lui vient l'idée d'aller chercher de l'aide à l'extérieur de l'île, ce qui semble représenter une opportunité pour les autres fourmis de se débarrasser du maladroit, le monde extérieur étant très dangereux pour les insectes. Tilt fait ensuite la connaissance d'une troupe de cirque, qu'il confond avec une armée d'insectes mercenaires. Motivés par un malentendu, cette aventure finira par apporter la paix et la liberté dans la fourmilière.
Si j'ai fait le parallèle avec le film Fourmiz, il est important de noter que les deux films d'animation sont néanmoins fondamentalement différents, notamment par le ton adopté.
Fourmiz est plus sombre et sérieux, davantage philosophique et satirique, avec un humour plus à la portée des adultes.
1001 pattes, quant à lui, propose de nombreuses idées. Il ravit par sa simplicité, son humour enfantin et le regard léger et fantaisiste adopté dans une atmosphère très colorée et lumineuse.
Les deux films d'animation n'ont pas vraiment su s'imposer comme films cultes, mais 1001 pattes semble continuer d'émouvoir une petite minorité d'admirateurs.
Pour ma part, j'ai toujours préféré Fourmiz, autant lorsque j'étais enfant que maintenant, après avoir analysé et critiqué les deux films. Je vais tenter de vous expliquer pourquoi.
Une des plus grandes forces de Fourmiz et aussi l'une des plus grandes faiblesses de 1001 pattes réside dans les personnages.
Alors que Dreamworks fait recourt à la morphopsychologie pour ses fourmis, leur attribuant à chacune la personnalité de l'acteur sélectionné pour la doubler, Pixar préfère mettre de côté la construction des personnages au profit de l'humour et des idées créatives.
Selon moi, 1001 pattes est pour cela davantage destiné aux enfants qu'aux familles. Chaque personnage se voit attribuer un caractère propre, mais il s'agit bien d'un « caractère » et non d'une « personnalité ». Les traits naïf et maladroit de Tilt, les caractéristiques propres aux princesses chez la Princesse Atta, le caractère de petite fille bienveillante pour la Princesse Couette, le côté non-binaire de Marcel (un peu comme Fleur dans Bambi -mais dans un autre style, je vous l'accorde-), l'aspect méchant du Borgne...
Certes, Tilt est plutôt sympathique, la petite princesse Couette est attachante, et les sauterelles parviennent à renvoyer un léger sentiment de peur. Mais c'est à peu près tout. Les personnages demeurent assez basiques, on ne sait pas grand-chose sur eux et les interactions sociales sont pratiquement inexistantes. Il devient selon moi impossible de s'attacher ou de s'identifier à un personnage.
Je n'ai pas non plus été convaincue par le choix de présenter autant de personnages. Contrairement à Fourmiz, 1001 pattes comprend de nombreuses espèces d'insectes : fourmis, araignées, chenille, coccinelle, phasme, papillon, mouches, cloportes, mante religieuse...
Après vingt minutes de film, on se trouve plongé dans un nouvel univers, où une dizaine, voire une vingtaine de nouveaux personnages apparaissent d'un seul coup, ce qui semble beaucoup trop et trop complexe pour des enfants (ou certains adultes comme moi) qui ont besoin de davantage de simplicité. Ce passage représente également sept longues minutes où Tilt disparaît complètement à l'écran, ce qui est un peu déroutant alors qu'il est censé se trouver dans un monde peuplé de dangers.
Mais ce qui me dérange le plus, c'est vraiment ce rythme effréné. 1001 pattes nous présente toute une batterie d'éléments et de personnages, présents en permanence. Il n'y a aucun moment calme et contemplatif pour nous permettre de faire le point sur nos impressions et ressentis. Il m'a semblé très compliqué de savourer le film, tant sur le plan créatif que sur le plan visuel, parce que tout s'enchaîne très vite. Les gags se succèdent, les scènes se succèdent. J'ai plusieurs fois perdu le fil. Comme si le film tournait en rond et que tout partait dans tous les sens sans vraiment faire évoluer l'intrigue. De même, la fin m'a semblé très longue et pas très propre visuellement.
Peut-être aurait-il suffit de supprimer quelques personnages et d'ajouter une relation de complicité, une petite intrigue secondaire et une séquence émotion pour pallier à ces problèmes ?
Mais malgré ces points négatifs, 1001 pattes possède des qualités admirables.
Alors qu'il n'est que le troisième film d'animation entièrement réalisé en images de synthèse, après Toy Story et Fourmiz, son compte-rendu visuel demeure magnifique. Lumineux et coloré, le petit monde des insectes parvient à impressionner. Cette illusion résulte en fait d'une volonté des animateurs de donner un aperçu de la nature du point de vue des insectes. Pour ce faire, ils ont conçu une caméra miniature, la « Bugcam », qu'ils ont placée sur des roues Lego et fait rouler à travers les herbes. S'inspirant également du documentaire français Microcosmos, ils sont parvenus à créer cet univers charmant.
Bien que les animateurs aient cherché à rendre les personnages réalistes en observant des insectes dans leur milieu naturel, ils ont souhaité rendre les fourmis plus humaines et sympathiques, par opposition aux sauterelles qui devaient sembler plus effrayantes.
Les mouvements m'ont semblé étonnamment fluides pour l'époque et les graphismes des personnages assez atypiques, les plus réussis étant selon moi ceux de Manny et Rosie. Notons aussi ce travail du feu, des gouttes d'eau (ou autres breuvages alcoolisés), ce superbe oiseau en feuilles, le vol en pissenlit, et ces ciels colorés.
Comme mentionné précédemment, 1001 pattes est un film humoristique, mais je ne me souviens pas avoir ri ou même souri. Effectivement, il y a tant de dialogues et les gags s'enchaînent sans laisser place à la surprise. Par ailleurs, l'humour est principalement fait de jeux de mots avec des termes liés aux insectes : « avoir des chenilles à retorde », « des pucimètres », « se suivre en file-insecte », « avoir la larve à l’œil », « saperlipunaise »... Bien qu'on puisse noter un véritable travail de recherche (et un réel effort de la part des doubleurs!), ces jeux de mots finissent par devenir un peu lourds. Mais peut-être cela amuse-t-il les enfants ?
Au niveau de la musique, bien qu'aucun morceau ne marquera nos esprits, contrairement à « Je suis ton ami » de Toy Story, il faut avouer que l'atmosphère musicale de 1001 pattes vaut le détour. J'ai particulièrement apprécié aussi ce court instant instrumental lors de la fête organisée pour saluer les hôtes. Notons que la BO fut d'ailleurs nommée aux Grammy Awards et aux Golden Globes en 1999.
Pour conclure cette critique un peu mitigée, 1001 pattes demeurera à mes yeux plus un film anecdotique qu'un chef d'oeuvre. A côté des merveilles de Monstres & Cie, Le Monde de Nemo, Vice-Versa ou Coco (et j'en passe!), 1001 pattes représente pour moi un des moins bon Pixar. Néanmoins, ce film marque un moment important de l'histoire de l'animation, une période à l'origine d'une constante rivalité entre les grands studios.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films d'animation Pixar, Les meilleurs films de 1998, Oscar du meilleur film 1999, Les meilleurs films où le personnage principal est un animal et Les meilleurs films d'animation (3D)
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le 7 mars 2020
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