13 Hours n’est pas une réussite. S’il n’est pas aussi catastrophique que certains films du réalisateur, je pense notamment à la saga des Transformers, il est le stéréotype de ces films faits par les Américains pour les Américains qui nous agacent tant. Il y a toutefois du positif à retenir ce qui nous fait penser que le Californien ne souhaite pas uniquement tout faire exploser.
A ce titre, je me demande si nos amis outre-Atlantique se rendent compte à quel point ce patriotisme exacerbé peut paraitre ridicule en-dehors de leurs frontières. Après tout, cela fait entièrement partie de leur culture et America First est pour eux un truisme.
Le film de Michael Bay pourrait être un honnête film de guerre s’il ne nous servait pas à toutes les sauces les clichés du genre. En faire une liste exhaustive prendrait une journée entière, mais on notera la présence habituelle du soldat dont la femme est enceinte et qui a peur de ne pas voir grandir ses enfants, celui qui n’hésite pas à désobéir aux ordres afin de sauver des vies (américaines les vies, c’est important) ou encore de ceux qui ne savent s’exprimer qu'en punchlines et autres boutades même dans les pires situations pour montrer qu’ils sont courageux et détendus face au danger. Importante aussi, cette scène dans les premiers instants du film où deux soldats se trouvent dans une situation périlleuse et s’en sortent au bluff et grâce à des parties intimes plus grosses qu’un taureau, montrant bien qu’aux USA on n’a pas peur des barbus révolutionnaires du Moyen-Orient.
Le vrai problème de 13 Hours est donc cet américanisme primaire. Outre le fait que les Libyens ne sont que de la chair à canon (mais j’y reviendrai plus tard), c’est l’importance donnée aux vies américaines qui est presque choquante. Le film est parsemé de petites phrases rappelant que ce sont des Américains qui sont en danger ou que ce sont des Américains qui viennent vous protéger (vous trouvez que j'écris souvent "américains" ? Attendez de voir le film). Le point d’orgue étant cet appel à l’aide de Sona Jillani qui donne à peu près ceci (de mémoire):
- « What is your authority ?
- My authority is that if you don’t come to help us, many Americans are gonna die, including the one talking to you right now. »
Dialogue d’autant plus ridicule que l’actrice, Alexia Barlier, prononce le tout avec un bel accent français.
Enfin, si vous n’en avez pas eu assez, sachez que le dernier plan du film, avant tous les textes pour nous raconter ce que sont devenus les survivants, est un drapeau des États-Unis endommagé, froissé et flottant à peine dans une piscine pleine de débris dus aux explosions. Voilà, tout en subtilité.
Cependant, il y a du positif comme évoqué plus haut. Avec Michael Bay aux commandes, on se demande presque si c’est intentionnel mais partons du principe qu’il a effectivement voulu faire passer un message.
S’il y a bien une chose qui soit retranscrite avec justesse, c’est le problème d’identification de l’ennemi. Si on peut reprocher à Bay de faire des Libyens de la chair à canon, cela montre en revanche que l’ennemi n’a pas de visage. Les soldats l’avouent eux-mêmes : impossible de savoir qui sont les bons et qui sont les mauvais. Pas d’uniforme, pas de symbole, aucun signe distinctif. En gros, on attend de voir s’ils nous tirent dessus pour définir leur camp. L’ennemi est invisible dans le sens où il pourrait être n’importe qui : une femme, un homme, un enfant, un barbu, un non barbu… de quoi devenir paranoïaque.
L’autre point bien souligné par Michael Bay est l’incapacité des USA à être les gendarmes du monde. Vietnam, Irak, Afghanistan, Libye… l’armée américaine ne parvient plus à vaincre ses ennemis et ses interventions lorsque le pays n’est qu’indirectement concerné sont plus que jamais infructueuses, laissant les pays dans un état pire que lors de leur arrivée. Bay illustre bien cette idée que les USA ne sont plus en mesure de se mêler de ce qui ne les concerne pas, que ces luttes sont vaines et qu’elles n’ont pour conséquences que des pertes de vies (américaines les vies, ne perdez pas le fil).
Ne nous laissons pas berner, ces deux réflexions, bien qu’intéressantes, ne sont que secondaires au récit. C’est avant tout un enchainement de fusillades et d’hommes virils qui pleurent la perte de leurs amis (tombés au nom de l’Amérique bien sûr) sur une musique tire-larmes au possible. Pendant 2h24. C’est long. Très long même. On enlève 45 minutes facile.