Derrière un titre qui en dit long se cache (à peine) une immense histoire de l'Humanité, avec un grand H. Une histoire de la recherche du savoir, savoir qui, en premier lieu, aidera l'Homme dans sa survie, lors de l'introduction préhistorique du film, et, en second lieu, l'éclairera (ou non) dans sa quête existencielle. Car il est bien question dans 2001 des énigmes de l'être. Seulement, Kubrick, après une ellipse de plusieurs millénaires et un raccord par analogie magistral, nous envoie dans une époque ou l'Homme ne connait plus ce genre de problème. Il semble, pour ainsi dire, les avoir oubliés, mis de coté. Dés lors, l'Odyssée de l'Espace s'improvise, non pas comme une recherche de réponses, mais comme une redécouverte de l'angoisse existencielle, comme si celle ci était indissociable de la nature humaine. Car à bord du Discovery, le seul personnage qui semble à peu près humain est, comble de l'ironie, l'ordinateur du vaisseau, Hal, qui, cloitré dans une solitude électronique, sera victime de sombres interrogations sur la légitimité de la mission sur Jupiter. Kubrick entame alors une esthétisation complète de cette angoisse, associant en un seul inconnu celui de l'immensité spatiale et celui de l'être, dans une symphonie de l'espace qui trouvera son aboutissement dans un étrange balais aussi abstrait que limpide, confrontation directe de l'Homme à ses plus abyssales interrogations existentielles. Ainsi David Bowman, le visage torturé, les yeux exorbités devant l'étendue du questionnement philosophique qui le ronge, connaitra, comme l'avait prévu Pascal, l'horreur métaphysique, avant d'assister à une vision apaisée de la mortalité et de l'immortalité embriquées en une seule et unique entité. Stanley Kubrick ne répond pas à beaucoup de questions avec L'Odyssée de l'Espace. Il offre à ses spectateurs la confrontation à l'angoisse existentielle la plus directe, superbe et étrange qui soit, confrontation qui, dans un élan de communion céleste, nous amènerait presque une étoile de savoir dans le noir d'encre de notre esprit. Et c'est sur l'unification entre les deux notions "espace" et "espèce" (“space et “specie”) que repose toute la beauté quasi mythique de l'Odyssée de l'Espace, une beauté qui n'a au final rien du simple trip métaphysique à grand renfort de cocaïne que beaucoup semblent espérer de ce chef d'oeuvre de la Science-Fiction.
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