Un immeuble du Havre, plutôt classe moyenne, une jeune fille est assassinée en pleine nuit, les locataires disent tous n'avoir rien entendu, ils le disent. Mais c'est faux, ceux qui étaient présents cette nuit-là ont tout entendu et Pierre le sait parce-que lui-même était dans son appartement. Voici donc un crime barbare et 38 témoins qui se taisent de peur qu'on vienne leur demander des comptes sur leur lâcheté pendant le meurtre.

Pierre vit très mal son silence, il se tait peut-être par calcul, mais on sent que c'est un taiseux, un taciturne. Louise qui vit à ses côtés, semble au début le vivre plus mal que lui, pourtant elle n'était pas présente cette nuit-là, mais elle est plus fragile et a plus de mal garder le contrôle. Sa force semble revenir le jour où Pierre lui avoue tout.

N'en pouvant plus il finit par se rendre au poste de police pour dire ce qu'il a entendu et qu'il n'a rien fait, comme les 37 autres. A partir de là, les bassesses quotidiennes prennent le dessus chez les autres locataires qui maudissent Pierre de les avoir montré du doigt devant le pays tout entier. Au milieu, Nicole Garcia joue une formidable journaliste divisée entre sa conscience et les impératifs de son métier.

De film en film, Lucas Belvaux poursuit une oeuvre particulièrement cohérente, sans artifices, ancrée dans le quotidien et confrontant ses personnages à des situations qui les dépassent et les détruisent. On anticipe un peu les événements, on sait que du jour où Pierre dépose au commissariat, tous vont se retourner contre lui. Yvan Attal incarne parfaitement ce docker silencieux qui garde pour lui ce qui le ronge, même si certaines de ses tirades paraissent trop bien écrites pour sonner juste dans la bouche d'un marin, d'autant qu'Yvan Attal à un peu trop l'air de réciter dans ces moments-là. Le reste du temps, les dialogues sont tranchants comme le couteau qui a tué. Sophie Quinton est une révélation pour moi, jolie sans être bimbo elle incarne tour à tour la fragilité et la colère pour au final décider de rester, debout, aux côtés de Pierre quand tout s'écroule et qu'il lui conseille pourtant de partir.

La mise en scène est comme le film, sans effets de manche, les plans aident à rendre encore plus implacable l'inévitable dénouement. On notera juste la beauté des images des docks la nuit, avec le superbe ballet de ces immenses engins servant à décharger les containers, sorte de grands échassiers à quatre roues, la plus belle des séquences étant quand Louise, à la recherche de Pierre, slalome au milieu avec sa voiture.

C'est un beau film sur la lâcheté collective et le courage individuel, montrant que c'est noyés dans la masse que nous pouvons devenir des pleutres.
Jambalaya
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le 11 nov. 2012

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Jambalaya

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