Une production Besson trop paresseuse
Taken a lancé une mode pour le cinéma d’action franco-américain signé par Luc Besson (scénariste/producteur) : faire venir dans notre chère capitale une star hollywoodienne pour que cette dernière « s’amuse » comme il se doit, flingue à la main. Après Liam Neeson et John Travolta (ce dernier dans From Paris with Love), c’est au tour de Kevin Costner. L’acteur emblématique des années 80 (Les Incorruptibles, Sens unique) et 90 (Danse avec les Loups, Robin des Bois : Prince des Voleurs, Bodyguard, Waterworld), qui s’est fait bien rare ces dernières années et qui tente de revenir via les seconds rôles (Man of Steel, The Ryan Initiative) et la télévision (Hatfields & McCoys). Premier rôle principal au cinéma depuis longtemps donc. Mais est-ce un retour qui s’annonce gagnant ?
Ce qui a de bien avec une production Besson, c’est le visionnage du générique du film. Notamment lorsque l’on s’attarde du côté des scénaristes, et qu’apparaît la mention « d’après une idée originale de Luc Besson ». 3 Days to Kill, c’est l’histoire d’un tueur d’élite qui va devoir rempiler contre son gré tout en le cachant à sa fille, avec qui il désire passer un peu de temps sans pour autant lui dévoiler sa double-identité. Une idée originale ? Du déjà-vu, oui ! Et ce n’est pas l’apport d’un enjeu anecdotique ni d’une relation père-fille déjà exploitée par la saga Taken qui vont y changer quoique ce soit.
En même temps, c’est une production Besson, rappelons-le. Ce qui induit que ce n’est pas du côté du scénario qu’il faut critiquer ce film mais plus vers le divertissement annoncé sur le papier. Avec son lot de fusillades, de bastons et de courses-poursuites. À l’instar du tout premier Taken qui ne perdait pas de temps en blabla ni en séquences dramatiques, allant directement à l’essentiel : un protagoniste dangereux qu’il ne faut pas énerver, qui en fait vraiment voir de toutes les couleurs à ceux qui croisent sa route (même la réplique « je vais vous retrouver et vous tuer » sonnait admirablement bien !). Malheureusement, 3 Days to Kill prend tellement de temps à mettre en valeur cette relation père-fille mille fois vues qu’il en oublie le principal : divertir.
Il faut bien avouer qu’on peut se laisser toucher par quelques moments dramatiques pourtant fort appuyés et qui font clichés. Mais ce que nous désirons avant toute chose, c’est de l’action. Or, ce genre de séquences se fait rare dans ce film, un comble ! Une fusillade au début, une autre à la fin, et une course-poursuite en voiture au milieu de tout cela. Rien d’autre. Alors que le film affiche au compteur 1h50, ce qui est largement au-dessus de la moyenne (1h30). Pourtant, il y avait matière à titiller notre attention quand on voit la séquence en voitures, filmée de manière énergique. Mais non, l’ensemble préfère rester paresseux, alambiqué par un montage anarchique (nous avons souvent l’impression de passer du coq à l’âne, certaines scènes ayant l’air incomplètes) et se contentant d’invraisemblances (le héros tirant à travers un épais bloc en béton servant de toit à un hall d’hôtel, par exemple ) qui ne peuvent passer inaperçues.
Sans oublier que 3 Days to Kill se veut être un film cool, voulant flirter avec l’humour. Mais en vous rappelant une nouvelle fois Taken, le long-métrage de Pierre Morel allait à l’essentiel, avec sérieux. Et ça marchait ! Là, le film de McG traîne tellement des pieds que les moments comiques ne font que trop rarement mouche. Si au début on peut se marrer d’une séquence où notre héros compte passer à l’action mais qui se retrouve freiner par la sonnerie de portable de sa fille, ou encore du délire du vélo violet, ces passages s’alourdissent à force d’être répétés sur toute la durée du film. Ponctués par d’autres moments tellement débiles (le héros demandant la recette de sauce tomate au mec qu’il torture) qu’on se retrouve obligé de rigoler devant tant de ringardise non voulue. Au moins, 3 Days to Kill fait sourire, mais pas de la manière dont l’avait prévue Besson ni McG. Et quand ça tombe dans le sujet d’actualité (les squatteurs), on reste impassible devant tant d’intérêts à un thème qui, finalement, n’en a aucun pour ce film.
De trop rares scènes d’actions arrivant à redorer le blason de ce film ? Pas tout à fait… Car d’un point de vue technique, 3 Days to Kill n’est pas une franche réussite. Que ce soient les effets visuels (un décor de fond comme une vue panoramique de Paris en pleine nuit depuis à balcon) qui sentent bons l’écran vert, les effets de styles foireux de la caméra (notamment quand le héros tombe dans les vapes, comme si la mise en scène passait par le found footage à la Projet X) et des défauts de tournage qui sautent aux yeux (les figurants continuant de passer comme si de rien n’était alors qu’un accident de la route vient tout juste de se dérouler). Après avoir pourtant réalisé Terminator Renaissance, McG fait preuve d’amateurisme sur bien des points, ainsi que d’une trop grande négligence.
Bref, 3 Days to Kill est ni plus ni moins un divertissement loupé. Qui ne peut compter que sur le charisme de Kevin Costner et sur le ton de légèreté qui pourra en faire rire certaines par moment. Quoiqu’il en soit, Costner méritait mieux que cela pour revenir sur le devant de la scène. Peut-être qu’un futur projet, qui sait, lui redonnera sa gloire d’antan.