Que m'avez-vous fait manger?
Trois Extrêmes est un film en trois parties: "Nouvelle cuisine", "Coupez!" et "La Boite".
Si vous en avez assez de manger chinois et cherchez de quoi vous dégoûter à jamais de cette nourriture exquise, "Nouvelle cuisine" est fait pour vous. C'est une histoire qui enchaîne les instants déviants, pour une plongée dans l'horreur qui va crescendo. Entre un démonstratif clinique et une certaine forme de beauté macabre, Fruit Chan malmène son spectateur en jouant sur les sensations contradictoires, particulièrement par le biais de la musique qui renforce des scènes éprouvantes. A l'image de cet avortement illégal pratiqué à l'ancienne, superbement mis en image, où on en montre tout à la fois assez pour être interpellé et assez peu pour permettre à l'imaginaire de fonctionner, le tout sur une musique étrange, presque guillerette. Sans aucun doute, le passage le plus dur de l'anthologie dans son ensemble, par son utilisation exemplaire de l'univers sonore triturant les nerfs, il s'achève dans un final extrêmement sombre et troublant, quintessence des vices développés qui laisse le spectateur le coeur au bord des lèvres, mais emprunt d'une troublante fascination. "Nouvelle Cuisine" est tout à la fois malsain et magnifique, une plongée dans une horreur qui explore des facettes issues des désirs les plus refoulés, mais pourtant terriblement humains...
Avec "Coupez!", Park Chan Wook confirme ce qu'il avait laissé entrevoir avec "Old Boy", soit une maîtrise technique et visuelle extraordinaire. D'un point de vue purement esthétique c'est vraiment à tomber, enchaînant des plans séquences affolants tout en développant un huis-clos dont la configuration de couleurs et de forme où l'on retrouve cette dominance de bleu et ces carreaux en damier blanc et noir. C'est effectivement très beau, somptueux même, mais cela ne sauve pas ce film d'une intrigue bavarde et sans réel intérêt, qui ne se réveille que dans son dernier quart d'heure. Dernier quart d'heure au final sanglant et sans concessions. "Coupez!" est un beau film tout creux et comble de tout d'une influence bien plus occidentale qu'asiatique.
Agréable surprise, "La Boite" est un joli petit film, délicat et sans faute de goûts. Construit presque intégralement sous forme de flashbacks oniriques s'entremêlant avec la réalité. Il oscille entre pur fantastique et une dimension plus ambiguë, appartenant davantage à l'univers du merveilleux. Jouant habilement sur le non-dit et sa structure éclatée, Miike nous livre un film singulièrement calme, parfois contemplatif, où l'on se perd dans la beauté des images et les rares dialogues, autant d'éléments instaurant une ambiance envoûtante et feutrée. "La Boite" est vraiment un film plaisant, qui prend tout son sens lors du plan final, troublant, transformant l'ensemble en une intéressante réflexion.