Pas la peine d'y aller par 47 chemins, cette adaptation de la légende des 47 Ronains est mauvaise. La photographie est abjecte, la mise en scène illisible, les acteurs très mal dirigés (alors qu'on a quand même Tadanobu Asano et Hiroyuki Sanada !), la musique est putassière. Pire encore, ce film est un crachat à la face de la culture japonaise dans son ensemble, rien n'est respecté, le tout au service d'un stupide exotisme de pacotille.
Toutefois, l'ensemble tient debout. Ça me brise un peu le coeur de dire ça, mais ça allait. Et le tout, grâce à Keanu Reeves. Véritable intrus dans cette histoire de ronains parlant anglais (ou pire, français), il va au final s'avérer être la clé de voûte du film, le seul élément qui soit totalement à sa place.
D'ailleurs, entre nous, c'est juste pour lui que je suis allé voir le film. Si j'abhorre Tom Cruise dans le Dernier Samourai (par désamour pour l'acteur, et parce que c'est un film sacrément mauvais), je dois admettre que j'aime bien Keanu Reeves. La plupart de ses films sont au mieux moyens (ne me lancez pas sur Matrix) mais il m'est éminemment sympathique, notamment grâce à sa bonne bouille, mais aussi grâce à son personnage de bonhomme triste.
De fait, je confesse que voir Keanu Reeves en ronain, ça m'a fait tout chose. Mais plus encore, l'acteur a tellement l'air sûr de lui et à l'aise dans ce monde faussement japonisant, qu'il arrive à porter tout le film. Pour tout dire, j'ai complètement omis le travail de Carl Erik Rinsch jusqu'à me dire que tout ce film grotesque ne pouvait que résulter de l'imagination d'un enfant ignorant. Et pour peu qu'on se dise que cet enfant, c'est notre bon Keanu... Eh bien, tout semble fonctionner.
Il n'est dès lors plus étonnant de voir un occidental chez les japonais, après tout, il est juste en train de jouer. Il n'est plus étonnant de tous les voir parler en anglais (ou pire, en français x2). Il n'est plus étonnant de voir des monstres ou des créatures moches, de croiser des personnages sans aucune personnalité ni ambivalence. Pour un peu, ça justifierait presque le zomby boy. Ça ne vous est jamais arrivé, vous, enfant, d'inventer un personnage en jouant puis de totalement l'oublier en passant à la scène suivante ?
Ainsi, même si le film reste bien indigeste, le voir sous cette lumière aide à mieux l'apprécier (ou à mieux le supporter, ça dépend des moments). Et franchement, je préfère encore ça que de la soupe moraliste froide servie dans un académisme grotesque.