Il y deux films dans 8 fois debout, l'un plus délicat et social mettant en scène avec une grâce infinie le parcours difficile d'une jeune femme évoluant difficilement dans le milieu hostile de la France d'aujourd'hui. L'autre tirant davantage vers la comédie romantique à la manière d'un cinéma indépendant US façon Sundance.
Cette incapacité à choisir son camp et son style impose autant de frustration qu'il distille de plaisir.
Le film n'est en effet jamais aussi bon que lorsqu'il se fait silencieux pour filmer au plus près le beau visage de Julie Gayet et capter avec beaucoup de justesse à la fois ses errements, ses refus, ses résignations tout autant que l'immense espoir qui l'anime.
Il faut dire deux mots sur cette formidable actrice qu'est LA Gayet et sur le fait qu'elle démontre, une fois encore, qu'elle n'a pas cessé de nous épater et de nous surprendre.
Et il faut bien admettre que Xabi Molia montre un vrai talent dans toutes les scènes où il la filme. Elle semble être une véritable inspiration et c'est un grand bonheur de spectateur.
Hélas, le jeune cinéaste ne semble pas faire confiance à son film et à la puissance seule de sa mise en scène et plombe souvent l'ensemble par un excès de scénarisation qui dégage parfois une impression d'artifice très dommageable considérant la force qu'il déploie à montrer l'indicible au travers du visage opaque de sa comédienne.
Il nous entraine alors sur des sentiers plus balisés de la comédie romantique, au ton gentiment décalé, au travers du personnage de Denis Podalydès...
Le comédien n'est pas à blâmer et il remplit parfaitement son contrat, malgré l'impression de déjà vu que sa composition inspire.
On peut alors regretter que Xabi Molia n'ait pas l'audace d'un parti pris plus radical en faisant confiance à la force de son sujet et au talent immense de sa comédienne.
Le personnage est largement assez mystérieux et fort pour que le récit soit entièrement axé sur elle et que l'apparition de personnages secondaires se fasse plus ponctuellement (DRH, cousin, amant, patronne...), comme des digressions à la ligne droite, un peu à la manière utilisée par Agnès Varda dans Sans toit ni loi, ou d'une façon plus légère dans Drôle de Félix de Ducastel & Martineau. Ces deux films prenant le pari d'axer le film entier sur la trajectoire d'un personnage qui se construisait en plein comme en creux au travers des diverses rencontres du récit.
Ici, le film semble un peu victime de son scénario, trop écrit, trop dialogué et finalement peu original, alors que l'on perçoit bien le potentiel qu'il semble sous estimer.
De ce fait, la marge, justement son sujet, semble lui échapper, à force de trop vouloir baliser le terrain, le film se prive parfois de la liberté des errances des ses personnages et perd un peu en force. A voir, cependant pour ce qui reste sans doute comme un des plus beaux rôles de Julie Gayet, un peu ce qu'avait été le Didine de Vincent Dietschy pour Géraldine Pailhas.
Mais lui ne craignait pas de nous perdre dans l'opacité de son personnage malgré la présence forte des rôles secondaires.
Il reste ceci de très beaux moments de cinéma dans ce 8 fois debout et la promesse certaine d'un vrai regard de cinéaste qui sera sans doute confirmé bientôt.