J'ai toujours porté en estime les journalistes télévisuels de tous bords qui prétendaient, en moins d'une heure, embrasser un «portrait de la Banlieue» avec un grand B. La vraie, quoué, celle qui fait péter des trucs et effraie le reste du monde, du consommateur de burgers de soja bio au kronembourisé qui fume des Gauloises ; celle qui met sa casquette à l'envers et qui ne parle pas à l'endroit, comme le faisait élégamment remarquer Nadine Morano il y a quelques mois de cela. Bouffi d'une misérable vanité, tourné à la REC comme en plein état de guerre, ce type de sous-reportage m'est encore incompréhensible dans son succès d'audience. Et vendredi dernier, c'était un peu nous trois, le pic de fréquentation de l'ESM.
93 est surtout une très belle surprise, sans orgueil ni babillage. Dépouillé de toute ambition moralisatrice ou sociale, le documentaire s'engage avec curiosité dans les sillons culturels et musicaux du 93, de ses années rockabilly à l'importation du hip-hop, des bidonvilles aux barres, des promesses politiques à la tombée finale dans l'oubli. En quelque sorte, un patchwork énergique de visages et de leurs souvenirs de ce qu'étaient les villes et les rages ; entre la Chapelle et la Plaine, entre rixes et mots d'ailleurs, se lovent les quelques diapositives du rêve d'un meilleur.
PS - Gros moins pour Loran de Bérurier Noir, dont j'espère que la simplicité d'esprit est à prendre au second degré.