Revoir 9 semaines 1/2 me ramène à ces années 80 euphoriques où l'on s'étourdissait encore un peu avec une effervescence différente de celle des années 70, plus classe, plus high tech, plus glamour en mode yuppie... Que reste-t-il de ce film 35 ans après ? Sans doute une certaine audace qui faisait de cette ballade érotico-sensuelle un bulldozer de tabous mais qui en fait, reste très puritaine et assez sage car c'est un film américain, on n'est pas dans l'Empire des sens même si ça s'en approche dans le fond.
Adrian Lyne révèle son sens de l'esthétique avec cette romance psychologique et passionnée, qui déroute autant qu'elle fascine, et qui sera souvent plagiée par d'autres réalisateurs moins inspirés. On peut regretter le côté factice et artificiel de John et Elizabeth, leurs personnages sont un peu creux, et le réalisateur pallie ce défaut en se reposant trop sur les scènes érotiques. Mais il fallait oser quand même en 1986 faire ce type d'initiation à la sensualité d'une femme à travers des jeux amoureux qui vont crescendo de la soumission au sadomasochisme par un mec mystérieux qui aime les cravaches et vit dans un loft aseptisé. Mickey Rourke est beau comme un dieu, et Kim joue de son corps sans complexe.
Je retiens surtout de ce film un style propre aux années 80, avec un raffinement des images, un esthétisme de vidéo-clip qui était très à la mode à cette époque, la complexité des relations entre les 2 personnages, l'atmosphère fiévreuse, l'érotisme troublant, l'envoûtement de la musique, et des séquences d'anthologie (le fameux strip sur le "You can leave your hat on" de Joe Cocker, la scène de la cuisine qui faisait qu'on ne pouvait plus manger des fraises comme avant)... tous ces éléments participent à une oeuvre certes filmée de façon bien trop lisse mais qui contribuent à faire d'elle un film culte, et que je préfère très largement à l'insipidité de 50 nuances de Grey qui l'a presque entièrement plagié de façon éhontée et sans aucune originalité.