Aladdin
7.5
Aladdin

Long-métrage d'animation de John Musker et Ron Clements (1992)

L'enfance c'est comme les gens qui mettent du guacamole dans le taboulé : il faut pas de poser de question, c'est comme ça c'est comme ça. Ce qui fait que les gens ont tendance à sur-évaluer les films qu'ils ont vus enfants, c'est un fait et je serais très prétentieux de prétendre qu'on est "au dessus de la masse" et que moi aussi je ne serais pas affecté.


Donc, évidemment cette critique positive d'Aladdin va être grandement influencée par le fait que je l'ai vue à l'époque de sa sortie, dans la salle de l'Amicale de la Possonière (49) pour être plus précis, et par les trucs autour auquel vous n'avez pas accès : le jeu sur les différentes consoles, les chansons sur cassette audio et les auto-collants des différents personnages qu'on avait collé sur nos cahiers.


En fait, dans un soucis de le voir d'un regard neuf j'ai pris soin de le mater en V.O. Histoire de comparer, mais le fait que les sous-titreur aient décidés de copier/coller les dialogues de la V.F. Au lieu de faire une traduction un poil plus littérale, n'aide pas. Du reste, j'ai rien vu qui me choquait et pas vraiment de contresens ou de bévue.


Ce qui fait que je le trouve très bien ce film et je trouve que le succès à l'époque était mérité. (Et bim, paye ton objectivité.)


L'idée aussi de puiser dans les Milles et une Nuit au lieu des traditionnels contes européens était un coup gagnant qui n'était pas sans polémique : oui, on ça brasse mal de clichés (tous les personnages secondaire ont le même accent qu'Apu (celui des Simpsons) ça parle de tranchage de main et de pratique "barbare") et oui, ils ont surement copié des trucs par-ci par-là au film La Bande a Picsou ET au film The Cobbler and the Thief. (Et à sa production interminable.) Mais ça brasse aussi toute l'esthétique qu'on lui associe : la caverne caché d'Ali Baba, le côté "princesse à marier" de Shéhérazade, les tapis volants de.... les tapis volants et le génie aux voeux magiques.


Au final, ils sont assez malin en rendant ça assez flou : c'est un peu le maghreb, un peu moyen-orient, mais un peu l'Inde (Agrabah étant un mélange entre Agra et Bagdad) ce qui fait qu'ils placent le film dans une sorte de royaume enchanté qui n'existe pas dans lequel ils placent tout ce qu'il veule, à l'image de l'Europe chez Disney qui est un mélange de France, d'Allemagne, d'Angleterre et de royaume scandinaves. Ce qui fait que le film a toujours eu bonne presse au moyen-orient : tout le monde se reconnait un peu.


On sent qu'après la Petite Sirène et La Belle et la Bête, Disney voulait revenir à quelque chose de plus comique, de plus slapstick : ça fourmille de gags d'arrières plans, de bonnes trouvailles comiques et chaque personnage est une caricature à sa façon. C'est aussi un des rares films Disney dans lequel les comic-reliefs sont limites plus nombreux que les héros : Entre Apu (la mascotte/meilleur pote du héros) le tapis (le Harpo, muet et faisant des trucs absurde en arrière plan) Iago (le comic-relief démoniaque) et le tigre de Jasmine (a la fois mascotte et personnage muet.) On pourrait aussi rajouter le Sultan qui est plus dans la lignée des "Papa marieur un peu balourd" (pensez à celui de Cendrillon ou ceux de La Belle au Bois Dormant.)


Et surtout, tous on un rôle à jouer dans l'histoire : Apu peut parfois être un boulet mais parallèlement il y a plein de moments où il rattrape la situation, le tapis sauve bien la mise et Iago est .... une vraie saloperie. Je ne comprends pas pourquoi la série animé essayera d'en faire un gentil, parce que c'est vraiment un sale con qu'on aime détester : il semble être très heureux de collaborer aux plans de Jafar, il en propose même certains et même sa capacité à imiter les voix (c'est un perroquet) va servir dans le film.


Et il y a le Génie. Et j'ai eu super peur en le revoyant tant le personnage de Robin Williams est devenu un archétype super détesté : le comic-relief anachronique. Souvent joué par un acteur comique super célèbre, c'est un personnage assez hyperactif qui semble toujours vouloir voler la vedette au protagoniste et est toujours dans le gag et fait des tas de références qui finissent par être grave datée. Et... en vrai, passé la chanson "Ton meilleur ami" (qui est un passage musical donc fait pour être overthetop) les interventions du génie ont quand même un but : celui-ci ne lache pas une phrase pour sortir un gag, il c'est plus des gags qui enrobent une réflexion qu'il a a faire. Je suis déçu, je pensais qu'avec le temps j'allais un peu plus reconnaitre ses imitations et références en vrac mais mis à part Groucho Marx et David Nicholson j'ai rien reconnu. Et le personnage lui-même a son propre arc autour de sa liberté qui le rend attachant.


J'étais étonné de revoir la dynamique entre Jasmine et Aladdin et de me dire qu'elle fonctionne vraiment bien. Après des décennies de relations un peu foireuses avec des gens qui tombent amoureux au premier regard, on a quelque chose qui sonne vraie : il y a de la complicité dès leur première rencontre (lorsqu'elle joue dans son jeu pour passer pour sa soeur timbrée) et Jasmine montre qu'elle a du caractère sans la rendre insupportable : on comprend pourquoi Aladdin cherche à lui mentir en se faisant passer pour un prince et on comprend qu'elle l'a grillée dès le départ mais qu'elle lui pardonne et met un doute parce qu'elle a un gros crush sur lui.


J'avais oublié à quel point Jafar était un bon méchant. Il a des motivations claires, il a un véritable charisme dans ses manières, et il balance des "one liner" bien trouvés. A un moment je me disais "mais comment fait le Sultan pour pas griller que c'est un fourbe", mais le gars sait tellement se faire obséquieux qu'on comprend pourquoi. Idem dans sa scène où il rencontre Aladdin déguisé en prince Ababoua... on sent tellement le mec à qui on ne la fait pas et qui croit pas en cette histoire de prince venue de nulle part. Et la façon dont Aladdin le vainc est certes un poil prévisible, mais assez maline. Et ça change des personnages poussés dans les ravins.


Du reste, l'animation est encore très bonne. Même les scènes en images de synthèses (le tapis, l'intérieur de la grotte) ne jurent pas et le côté très caricatural des tronches fonctionne très bien. Le chara-design d'Aladdin et de Jasmine est certes un poil trop générique, mais ça fonctionne.


Et les chansons. Alors, certes Alan Menkenn a aidé, mais on doit les meilleurs chansons au regretté Howard Ashman mort du sida durant la production. Et c'est vraiment très bon : c'est entrainant lorsque ça se veut entrainant, mystérieux quand ça l'est et romantique pile comme il faut. On a chanté Prince Ali en coeur et j'ai eu Ce rêve bleu en tête toute la nuit.


Est-ce que je le montrerais à des enfants ? : A condition qu'ils me laissent chanter pendant le film.


Possibilité de remake/suite : Le film a déjà eu droit à une série (sympatoche mais pas indispensable) et le remake était dispensable. Ce qui est con, c'est que Disney ne tentera pas d'adapter d'autres contes des milles et une nuit. Certes la série animée mettra en scène les 40 voleurs d'Ali Babi, mais c'est pas pareil.


Le détail qui m'agace : Je ne comprends pas la traduction française de "a Diamond in the rough" (perle rare, le diamant brut) pour qualifier Aladdin en "joyaux d'innocence." Qu'Aladdin soit quelqu'un de gentil, qui a bon fond, je comprends, mais il est tout sauf innocent.


Suis-je le seul ? A avoir l'impression déplaisante que Jasmine et Aladdin pourraient vraiment être frère et soeur... petit échec du chara-design.

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le 29 nov. 2020

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