Angélique,jeune fille de petite noblesse mais d'une grande beauté,devient très vite la proie des mâles en rut mais elle sait se défendre et son tempérament explosif va l'amener à vivre de trépidantes aventures en ce 17e Siècle très agité dans un royaume de France menacé par les armées étrangères,c'est la Guerre de Trente Ans,par la Fronde menée par des féodaux avides d'indépendance financière,par la révolte qui gronde au sein d'un peuple miséreux et par l'Inquisition qui bat son plein et combat férocement le Progrès social et technique qui commence à se développer.La belle marquise va devoir se débattre au milieu des complots politiques et des affaires d'argent et de sexe.Volontiers méprisé par les cinéphiles intelligents,ce film d'époque qui prend de nombreuses libertés avec la vérité historique a connu un immense succès en salles et de multiples diffusions télévisées.Il s'agit en réalité d'un grand film populaire qui utilise habilement le cadre historique pour y développer un scénario mouvementé qui s'appuie sur la personnalité atypique de son héroïne.C'est Bernard Borderie,pas un "auteur" mais un cinéaste très solide,qui réalise et a écrit le script à partir des romans d'Anne et Serge Golon.La production est luxueuse car un film d'époque ça coûte cher,et tout est parfaitement en place,qu'il s'agisse de la nombreuse figuration,des superbes chevaux,des magnifiques costumes,des diverses armes,des décors variés entre somptueux châteaux et bas-fonds sinistres,ou encore des coiffures ou des maquillages.Mais rien de cela n'est ostentatoire car tout s'inscrit idéalement dans la logique de l'histoire.On peut particulièrement féliciter Daniel Boulanger,dont les dialogues efficaces et délicieusement cyniques claquent agréablement à l'oreille,le décorateur René Moulaert qui a déniché des endroits étonnants,la costumière Rosine Delamare,très sollicitée en l'occurrence,et le compositeur Michel Magne dont la musique est joliment adaptée à l'époque représentée et dont le thème principal est inoubliable.Quant à Borderie,il met merveilleusement à profit ces atouts en imposant un rythme dynamique à sa narration et en multipliant brillamment les changements d'axes en fonction des lieux visités.L'affaire a tellement bien fonctionné que la même équipe donnera quatre suites à ce premier "Angélique".Sur le fond se dessine le portrait d'une héroïne féministe avant l'heure qui va prendre cher tout au long de la saga.Rien que dans ce premier épisode,la belle enfant devra résister aux assauts de son ami d'enfance puis de son cousin,avant d'être enfermée dans un couvent durant des années puis d'être mariée de force à un homme beaucoup plus vieux qu'elle,boiteux et défiguré de surcroît.Toujours combative,Angie se refuse à son époux avant de se rendre compte qu'il s'agit d'un homme formidable au-delà des apparences.Elle file alors le parfait amour et devient mère,jusqu'à ce que le roi Louis XIV passe chez les Peyrac et pique une crise de jalousie en découvrant la richesse de Joffrey et la beauté d'Angélique qui éclipse sans peine ce laideron de Marie-Thérèse.Là ça devient chaud pour la marquise,son mari est arrêté et en tentant de l'aider elle sera pourchassée,frappée,violée,on voudra l'assassiner et pour finir Joffrey sera brûlé en Place de Grève à l'issue d'un procès truqué,Angélique étant contrainte de se réfugier parmi les mendiants de la Cour des Miracles.Et tout ça en un peu moins de deux heures,c'est sûr qu'on n'est pas dans du contemplatif à la Tarkovski!Borderie ne lésine pas sur les péripéties et les rebondissements,sans pour autant recourir au bâclage ou à l'illisibilité,vraiment de la belle ouvrage!En dépit de ces vicissitudes,Angélique reste courageuse et déterminée,dessinant en cette période où la Femme est écrasée par le patriarcat un personnage qui sait imposer une inébranlable volonté même si elle subit à son corps défendant une série d'affronts qui teintent le film d'un érotisme assez émoustillant.Joffrey,lui,est carrément un progressiste d'avant-garde.Le gars est un poète,un musicien,un homme sensible,mais c'est aussi un redoutable bretteur,un scientifique transformant le plomb en or et un voyageur qui a parcouru le Monde.D'ailleurs,tous ses serviteurs,qu'il traite bien,ont été ramenés des contrées qu'il a explorées.Il y a des noirs,des arabes,des asiatiques et même un allemand.Bref c'est Superman avec une patte en moins et la gueule maravée,ce qui ne l'empêche pas d'emballer sa somptueuse épouse.Son seul défaut est de n'être pas suffisamment prudent et de se mettre à dos l'Eglise,dont il conteste les dogmes alors que ce n'est pas trop le moment,et le Roi et sa clique qui jalousent son insolente richesse alors que l'Etat peine à assurer son train de vie en ces temps troublés.Le film se permet même une certaine complexité politique en montrant le dessous des cartes.Peyrac est fidèle au royaume et Angélique a contribué à déjouer un complot contre le souverain,et c'est pourtant eux que Louis XIV,présenté sous un jour peu favorable,va persécuter.Il ne peut s'attaquer au puissant Prince de Condé,le chef de la Fronde,car il commande les armées qui sécurisent le pays face à l'ennemi,ni à Monsieur,qui complote contre lui,inattaquable parce que c'est son frère.La distribution est fantastique et affiche en figure de proue la splendide et frémissante Michèle Mercier,qui tient là le rôle de sa vie,et un Robert Hossein à la fois doux et viril qui présente l'inconvénient de n'être pas si moche que Joffrey est censé l'être,bien qu'on lui ait collé une sale balafre sur le visage.Jean Rochefort,sans moustache, livre un numéro étourdissant dans le rôle de l'avocat bad boy mais honnête Desgrez,flanqué de son inséparable molosse Sorbonne.Le bellâtre italien Giuliano Gemma est en revanche plutôt approximatif et se révèlera plus convaincant dans le western spaghetti lors des années qui suivront.Jacques Toja,surtout un théâtreux,a l'envergure et la hauteur nécessaire pour incarner le fielleux Louis XIV,et l'on croise aussi Claude Giraud,plein de panache en Plessis-Bellière,le cousin belliqueux d'Angélique,Jacques Castelot,faux-jeton à souhait en archevêque cupide,Charles Régnier,époustouflant en moine cinglé qui voit du blasphème partout,Bernard Woringer,extrêmement sympathique en indéfectible ami de Peyrac,Philippe Lemaire,délicieusement ignoble en chevalier violeur,Robert Porte,dont le physique marquant donne du relief à Monsieur,le frère traître et homosexuel du roi,François Maistre,visqueux et hypocrite en Prince de Condé,Jean Topart,inquiétant en procureur malhonnête et impitoyable,plus le nain Roberto,un des éclopés de la Cour des Miracles,dont la présence n'est pas un effet de style car en ces temps reculés où la médecine n'était pas ce qu'elle est devenue aujourd'hui les malformations,nanisme ou autres,étaient monnaie courante,surtout parmi les populations les plus pauvres.

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le 20 juin 2021

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