Requiem for a team.
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John Carpenter, en 1976, n’est encore qu’un débutant. Récemment diplômé, n’ayant à son actif que le film Dark Star, petit film de fin d’études fauché, il demeure un homme de l’ombre qui écrit pour les autres, mais qui n’a pas encore l’opportunité de mettre en scène ses propres films. Heureusement, la donne va changer et, en 1976 vient Assaut, largement inspiré de Rio Bravo, et surtout, premier « grand » film de John Carpenter.
Ici, John Carpenter occupe tous les postes. Il est réalisateur, scénariste, compositeur et monteur, Assaut est son film, et on le ressent dès les premiers instants. Dans la nuit, une bande de caïds va commettre un larcin dans une petite ruelle, jusqu’à ce que des policiers, postés en hauteur, les somment d’arrêter, avant de tirer aussitôt que les caïds se mettent à fuir, sans en épargner aucun. Le décor d’Assaut est planté : nous sommes dans un monde violent, sans foi ni loi, où le crime ne devient plus qu’une simple notion de justice. Cette violence n’aura, d’ailleurs, quasiment jamais de visage tout au long du film. Tout comme dans ses futurs Halloween et The Thing, elle agit en silence, elle est omniprésente et frappe sans que l’on s’y attende. Assaut est un film aux styles et aux inspirations variées, de par son scénario, sa réalisation et sa démarche. L’attaque du commissariat, organisée sous la forme d’un siège, ramène à l’époque médiévale, ou aux westerns, et pourtant le film se déroule bien à notre époque (ou, du moins, à l’époque de la sortie du film).
Cependant, le côté très désertique de ces quartiers en marge de la ville, l’absence de population, la lumière crépusculaire, rappellent les composantes de films pré ou post-apocalyptiques comme le futur Mad Max de George Miller. Ainsi, Assaut devient un film qui parvient à s’affranchir de tout véritable contexte spatial et temporel pour chercher à adresser un message fort sur la civilisation humaine, en proie aux mêmes instincts dangereux depuis la nuit des temps, et qui n’est pas prête de changer. La forte référence à Rio Bravo se ressent d’ailleurs justement à travers l’aspect désespéré de la situation et la confrontation des personnages à la sauvagerie, comme on peut le voir également dans des westerns de Clint Eastwood tels que L’Homme des Hautes Plaines et Josey Wales hors-la-loi.
Assaut est un film qui fait la part belle au hors-champ, avec, toujours, comme expliqué précédemment, cette volonté de donner le moins possible un visage à la menace, de donner le moins de repères possibles au spectateur pour le rendre, lui aussi, victime de la situation. Les ennemis sont nombreux, pourtant, ils tirent sur le commissariat avec des armes dotées de silencieux, donnant un aspect très étrange à la principale scène de fusillade, donnant l’impression d’une violente averse, une opération d’envergure s’opérant pourtant dans la plus grande destination et destinée à s’évanouir dans la nuit, avec laquelle elle est arrivée. Et la bande originale de John Carpenter, très simple, tournant autour de trois thèmes, fonctionne à merveille, illustrant tantôt les moments de stress, tantôt ceux de rapports humains, pour, toujours, jongler entre la résistance face à la sauvagerie, et la solidarité dans la survie.
Une femme, un prisonnier, et un policier. Ce sont donc les protagonistes d’un film aux allures de fable visant à ramener l’humanité à ses origines, mais aussi à son présent et à son futur car, malgré ses évolutions, elle demeure confrontée à l’adversité et doit être solidaire pour survivre. Le film de John Carpenter, à la brillante mise en scène, construit une ambiance remarquablement prenante. C’est son film, il y a quasiment tout fait, et tout fonctionne parfaitement. Assaut n’est pas juste un film d’action, c’est un film au rayonnement très large, offrant une vision certes peu élogieuse de la civilisation humaine, mais pourtant loin d’être fantasmée ou pessimiste. Le terrain est désormais prêt pour que « Big » John apporte son génie au septième art comme il se doit.
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Créée
le 18 mars 2018
Critique lue 211 fois
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