Cendrillon aux grands pieds par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Cinderfella vit dans la luxueuse demeure de sa belle-mère et de ses deux demi-frères, Rupert et Maximilien. Le notaire annonce à la famille que Cinderfella sera le seul héritier de la très grosse fortune de son père. Il va sans dire que pour cette famille au bord de la ruine, ce magot serait pourtant le bienvenu. Fella surnommé ainsi (fada en français) qui est un garçon un peu simple mais d'un dévouement et d'une bonté sans pareil, est considéré comme le pire des larbins dans la demeure et ne cesse d'être humilié par les trois comparses. Cela ne va peut-être durer qu'un temps car un bon génie va apparaître et lui promettre un mariage avec une princesse. Le rêve deviendra t-il réalité ?


Eh bien nous voici dans un conte de Charles Perrault, Cendrillon, très librement adapté et actualisé par ce pamphlet sur la haute société. En effet, malgré sa fortune venue de son défunt père, Fella reste humble, c'est dans sa nature. Ce garçon vit à l'ombre de sa seconde famille. Simple et naïf, le pauvre bougre est de plus très complexé. La peur de mal faire le rend parfois maladroit dans son comportement. Pourtant les railleries et les rudoiements n'entament pas sa bonne humeur et son envie de faire au mieux les tâches ingrates qui lui sont imposées. Pourrait-il y avoir une justice pour Fella ? Les sans grades de la société pourraient-ils à leur tour se construire une vie harmonieuse face à une classe ultra privilégiée et arrogante? Or un bon génie va tenter d'insuffler au jeune homme la volonté de se battre, de lutter contre les injustices dans cette société conservatrice. Les idées et les propos du bon génie faisant leur petit bonhomme de chemin dans le cerveau de Fella, celui-ci va tenter de saisir sa chance au travers d'un objectif au demeurant surhumain pour lui, approcher la jolie et douce princesse promise à l'un de ses demi-frères.


Dans cet univers décrit de façon très originale, un Frank Tashlin des grands jours est merveilleusement servi par son complice Jerry Lewis. En s'inspirant à sa juste mesure d'un célèbre conte, le réalisateur pointe les injustices d'une société corrompue par l'argent et par "les bons principes" des nantis. Ces bons principes leur offrent le luxe certes, mais aussi le droit d'opprimer ceux qui n'ont accès au moindre privilège. Cette dénonciation façon burlesque est l'une des raisons qui m'a fait aimer ce film.
Autre raison, c'est la sublime interprétation d'un Jerry Lewis, évoluant là sans Dean Martin, son ancien complice. Jerry est drôle, maladroit, grimaçant et cela apporte une force considérable au personnage qu'il s'est créé. Sa façon d'être, dans chacun de ses films, est un message d'espoir pour une société plus juste dans laquelle même un pauvre type du bas de l'échelle peut rebondir pourvu qu'il s'en donne les moyens. Il faut voir, lors d'un fameux bal très mondain, l'acteur descendre un escalier majestueux au rythme d'un formidable orchestre de jazz dirigé par Count Basie lui-même. Bien d'autres scènes peuvent retenir notre attention entre autres celle de voir quatre personnes assises à une table d'une longueur gigantesque pour un festin quelque peu particulier. Il est difficile de ne pas associer Anna Maria Alberghetti, la douce et tendre princesse qui fait tant rêver Fella et qui culpabilise par là-même les principes de cette haute bourgeoisie arrogante et déclinante. Il ne faut surtout pas passer sous silence le pittoresque bon génie interprété par Ed Wynn. Face à eux se dressent "les méchants" qui nous font tout de même passer un grand moment de bonheur avec Dame Judith Ande dans le rôle de l'affreuse belle-mère accompagnée de ses deux infâmes fistons joués par Henry Silva,Maximilian et Robert Hutton, Rupert.


Lorsque je vous aurais rappelé que nous avons la joie de croiser Count Basie à la tête de son grand orchestre, je pense que je ne peux que vous encourager à voir ce film merveilleusement mené tambour battant par ce duo de choc, Frank Tashlin et Jerry Lewis, qui dans de nombreuses réalisations nous aura tant touché par le rire, l'émotion et la dérision.


Autres critiques de films avec la participation de Jerry Lewis à votre disposition :


- Jerry souffre-douleur :
http://www.senscritique.com/film/Jerry_Souffre_douleur/critique/22006223
- Docteur Jerry et Mister Love :
http://www.senscritique.com/film/Docteur_Jerry_et_Mister_Love/critique/21140997
- Le zinzin d'Hollywood :
http://www.senscritique.com/film/Le_Zinzin_d_Hollywood/critique/21682802

Grard-Rocher
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le 21 mars 2015

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