Auteur de presque une centaine d’ouvrages vendus à quelques dizaines de millions d’exemplaires, Charles Exbrayat s’est spécialisé dans le genre bien spécifique du roman policier humoristique. Loin d’empiler comme tout bon polar contemporain trois douzaines de viols plus ou moins incestueux ou zoophiles de la torture gratuite sur enfant handicapé et une inévitable référence au nazisme, Exbrayat se donnait le plaisir de donner à ses histoires le ton de la légèreté printanière et du bucolique buissonnier. Avec une prédilection pour les petits villages de province et les personnages truculents, il ne manquait jamais de glisser ou là une ou deux références culinaires réjouissantes qui donnait immanquablement envie de foncer dans le premier tortillard venu pour aller sur place déguster les spécialités locales à l’ombre d’un chêne centenaire ou d’une autochtone accorte.
A la suite d’innombrables bains j’en suis arrivé à lire environ 98% de l’œuvre du bonhomme, artisan honnête et respectable qui offre finalement plus de littérature dans une ligne de ses romans de gare que Robbe-Grillet dans l’ensemble de sa carrière misérable, comparaison parfaitement gratuite mais qui fait toujours plaisir.
Plus que ses collègues du policier, je rapprocherais Exbrayat d’un Guareschi avec qui il partage le goût pour les petites villes et les caractères hauts en couleur. Aussi, l’idée de faire interpréter les héros de son Avanti la musica par le couple vedette de la série des Don Camillo semble finalement aller de soi avec un Gino Cervi en maire fasciste qui essaie de refiler le poste à son vieil adversaire le bistrotier devant l’arrivée prochaine des troupes américaines…
C’est une histoire assez agréable de cadavre qui se balade au sein de la petite communauté, il y a le sosie officiel de Shammo qui fait ses débuts en fils de son père forcément fiancé à la fille du maire et après les infamies que je me suis tapé plus tôt dans la journée j’ai failli faire montre d’un peu plus de générosité devant un ouvrage somme toute assez sympathique.
A noter que Sergio Leone aurait réalisé deux ou trois plans du film (j’ai cru en reconnaître un, filmé comme un western…), de là à le rajouter sur la fiche du site comme co-auteur il y a un pas que je n’aurais jamais osé franchir, depuis quand les réalisateurs de seconde équipe deviennent crédités au générique au même niveau que le réalisateur véritable ? Décision absurde et indéfendable qui devrait être corrigée au plus vite si le monde cesse quelques brefs instants de marcher sur la tête.
C’est dommage tout de même que le film soit aussi mollement réalisé d’ailleurs, parce que Fernandel y était dans une forme éblouissante et que j’ai toujours une tendresse coupable pour les querelles de clocher, les petits vins capiteux et les villages de pécores.