On va pas se mentir : c'est probablement le meilleur film jamais réalisé !

Il faut que j'arrête de vivre dans le déni et que j'admette que ce film fait parti de mes films préférés. Il faut que je cesse de dire que mon film préféré scénarisé par Charlie Kauffman est Dans la Peau de John Malkovich qui à tout bien y réfléchir à le revoir, n'est pas si fou-fou que ça. Il faut aussi que j'arrête de dire que mon film préféré de Michel Gondry est La Science des Rêves car il faut avouer qu'en regardant les bonus du film, une certaine gène s'est créé avec le côté "intime" de la vie de Gondry.


Tandis que j'ai regardé une troisième fois Eternal Sunshine et 12 ans après, le charme est encore intact. J'avais vu ce film à sa sortie en 2004 à cause du scénariste et j'en étais ressorti en me disant que j'avais vu un bon film comme je les aime. Je l'ai revu quelques années après en DVD avec une fille avec laquelle je commençais à sortir, le film était repassé quelques jours après sur Arte et on y avait vu comme un "signe." (Notre relation ne durera même pas trois mois, comme quoi, les signes c'est un peu bidon.)


Je l'ai revu hier soir avec ma copine et c'était marrant de la voir sur son visage en train de passer par toutes les étapes du spectateur : Amusée au début en pensant voir une petite comédie à l'eau de rose, en mode "hein-mais-je-comprend-rien" passé le générique, puis s'exclamant "haaaa, mais en fait, ce qu'on voit au début c'est après qu'il se soit effacé la mémoire" (avec une vanne du style "bon, tu peux arrêter le film là, j'ai tout compris") puis pleurant à la fin du film.


La mission était d'autant plus accomplie que j'ai versé ma larmichette à la fin du film, là où je ne l'avais pas fait les deux autres fois. Est-ce le fait d'avoir vu ce film avec "la bonne personne", est-ce moi qui devient plus émotif avec le temps, ou est-ce que le film a plus d'emprise sur moi après plusieurs relations amoureuses et m'évoquent bien plus de choses intimes comme de souvenirs refoulés qu'au jeune puceau que j'étais en 2004 ? Peut-être un peu de tout ça.



Ce film est une bonne synthèse de la rencontre Gondry – Kauffman :



Pour Michel Gondry, je me souvenais que je trouvais réalisation était inventive pour l'époque, et putain, ça reste toujours intemporel. En dehors des images iconiques (le lit au milieu de la neige, Jim Carrey en pyjama dans un décors trop grand pour lui, les visages qui s'effacent, les figurants qui disparaissent...) la mise en scène de Gondry dérange aussi par des petits effets de mise en scène tout con qui nous font dire "c'est un rêve" : Jim Carrey qui se retrouve avec des sacs de courses dans la salle d'attente du médecin, le fait d'éclairer des décors par la fenêtre avec des gros projos, un personnage qui part à gauche et qui dans le plan d'après part à droite, des trucages de raccords à partir de simples amorces qui créent un décalages, etc.... Le film fourmille est généreux et fourmille de ces effets.


N'importe qui d'autre t'aurait tartiné de l'effet numérique à tout va avec des images de synthèses qui auraient datées le film. Pas lui. Et le fait de tourner le réel dans un format "caméra à l'épaule" le rend d'un seul coup la transition entre les deux plus palpable. On sent aussi sa patte dans certains détails comme le fait que les deux protagonistes aient un côté "artiste dérangeant" : Clémentine fait des statues grotesques avec des patates et Joel crayonnes des dessins un peu grotesques qui mettent mal à l'aise. Marrant de voir que ce couple "mal assorti" possède finalement de nombreux points communs qui se nichent à travers les détails montrés par la caméra.


La réalisation de Michel Gondry à tendance à me stimuler bien plus que celle de n'importe quel autre réalisateur (surtout les réalisateurs de blockbuster.) Je me suis même surpris à me dire "ha, mais c'est tout simple en fait de faire cet effet, même moi je peux le faire dans un court métrage." Et, ça, ça m'inspire grave.


Pour Kauffman, c'est un scénario où il peut à loisir bosser ses thématiques préférées dans un cadre qui sort de sa loufoquerie habituelle. On y retrouve d'un côté le travail sur la psyché humaine et notamment les souvenirs refoulés (qu'ils soient douloureux, honteux ou joyeux) et de l'autre la mesquineries humaines avec un certain goût pour la science fiction et les intrigues amoureuses.


Seulement ici, c'est assez ordonné, le projet est clair : on est jamais perdu alors que pas mal d'intrigues se croisent et qu'elle sont parfois collées l'une à l'autre. Ainsi, on apprend petit à petit l'histoire de Joel et Clémentine tout en sachant que Joel recherche ses souvenirs et c'est toujours une vision déformée de l'histoire qui nous est raconté. C'est assez malin car permettant d'évacuer les platitudes et les passages prévisible des histoires d'amours ou des films "à rebours" et permettant de raconter une histoire qui se raconte elle-même et qui avoue qu'elle est subjective.


( Il faudrait que je vois plus de ses films, comme Adaptation ou Synecdote tant j'adore le travail de ce scénariste.)


Côté casting, je suis assez impressionné. J'avais complètement oublié que Mark Ruffalo jouait dans ce film. Idem pour David Cross qui n'était à l'époque que le "pote de Jim Carrey qui a quelques répliques dans le film."


Ce qui est intéressant c'est que ce film me confronte à un paradoxe lié aux acteurs et à leur célébrité : j'arrive pas à voir Kirsten Dunst et Elijah Wood sans avoir l'impression qu'ils jurent dans le film. Dunst n'est pas une "petite secrétaire" c'est "Kirsten Rhaaa Lovely Dunst" tandis que j'identifie trop Elijah Wood à Bilbo pour accrocher à son rôle de petit assistant stupide persuadé qu'il peut draguer une fille en endossant les souvenirs de son ex-copain.


Alors que paradoxalement, j'ai beau avoir vu Jim Carrey et Kate Winslet dans énormement d'autre films, ils sont crédibles dans leur personnages. Moi qui pestait récemment en voyant Tom Cruise dans "La Guerre des Mondes" estimant qu'il était trop connu pour jouer "monsieur-tout-le-monde", Carrey lui y arrive très bien. Il habite totalement cet homme hirsute, tristounet, mal dans sa peau. (Et arrive à ressortir quelques unes de ses fameuses grimaces de temps à autre... notamment quand il cherche à se réveiller) Idem pour Winslet qui est cette fille un peu artiste, un peu impulsive qui se cherche.


Après, ce malaise vient peut-être du fait qu'Elijah Wood ou Kirsten Dunst on été des personnages principaux dans des films sortis quelques années avant et que ça fait bizarre de le voir dans des rôles parallèles à l'histoire principale. (Et aussi que Mark Ruffalo a sévérement changé de visage et de carrure depuis...)


La B.O. est impeccable. A putain, cette reprise de "Everybody's Gonna learn sometime" par Beck.



Au final



J'ai l'impression qu'une forme de côté hipster me poussait jusqu'ici à dire "Ho, Eternal Sunshine, c'est un peu un film sur-estimé" alors qu'à le revoir je me dis qu'il est parfait, que je l'aime beaucoup et donc, qu'il s'agit d'un de mes films préféré. Ce genre de film qui me rend à la fois enthousiaste et incroyablement triste quand je le vois.


Et puis putain, un film qui arrive à la fois à être un film de science fiction, une comédie ironique, une (très bonne) histoire d'amour et un film psychédélique, j'en connais pas beaucoup.

le-mad-dog
9
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le 9 janv. 2017

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Mad Dog

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