Beaucoup de bruit pour pas grand chose.
Après le naufrage "Noé" de Darren Aronofsky en début d'année, Ridley Scott relate à son tour, une fable tirée de l'ancien testament. Durant 2h30, il va nous narrer l'affrontement entre Moïse (le gentil hébreu) et Ramsès (le méchant égyptien), le premier guidé par la main de dieu, ou plutôt par un enfant bavard, arrogant et prétentieux, le second par une soif de pouvoir, qu'il assouvit en avilissant le peuple hébreu.
Le péplum est un genre qui demande des moyens énormes, offrant des films à grand spectacle : Les dix commandements, Ben-Hur, Spartacus ou Cléopâtre, dans les années 50/60, avant de trouver un nouveau souffle en 2000, avec Gladiator déjà de Ridley Scott et d'autres moins réussis, comme Alexandre, Troie et encore Ridley Scott pour Kingdom of Heaven.
Ou se situe Exodus dans l'oeuvre de Ridley Scott ? Il est plus proche du moyen Kingdom of Heaven, ou de son Robin des bois, que de l'excellent Gladiator. Mais est-ce vraiment sa faute ? C'est un réalisateur de talent et visuellement, son film est réussi. La scène de bataille inaugurale est sublime, il nous emmène au cœur de l'action, de cette armée menée par Ramsès, avant que Moïse ne lui sauve la vie et passe du statut de frère, à celui d'ennemi, à cause d'une prophétie.
Mais voilà, Ridley Scott n'est pas un auteur, ce qui le met à la merci de ses différents scénaristes, pour le meilleur et pour le pire. Actuellement, il n'est pas dans une période très enthousiasmante : Robin des Bois, Prometheus et Cartel, ne sont pas vraiment de bons films, avec toujours ce même constat : la mise en scène est réussi, mais le scénario est soit soporifique ou incompréhensible. Exodus ne le sort pas de cette période creuse, mais il a souvent connu cela, avec bien pire : 1492, Lame de fond & A armes égales. Trois films situés après Thelma & Louise et avant Gladiator, il ne faut donc jamais enterré Ridley Scott, tel un phœnix, il renaîtra de ses cendres et nous offrira un nouveau grand film.
Après un début réussi, le film s'éteint doucement, comme Séthi (John Turturro), s'embourbant en suivant les traces de Moïse (Christian Bale), renié par son frère Ramsès (Joel Edgerton).
Malgré un casting impressionnant, ils souffrent tous ; en dehors du trio masculin cité plus haut; et surtout toutes, d'un manque de relief. Sigourney Weaver, Ben Kingsley et Aaron Paul en sont l'exemple parfait. La première ne sert strictement à rien, alors qu'elle est là mère de Ramsès, reléguée au rang de potiche, comme la femme de Moïse, Golshifteh Farahani, actrice iranienne/française sublime dans My sweet pepper land. Les deux autres acteurs cités, se contentant d’apparaître furtivement pour le premier, ou de rester muet pour le second. Le film se résumant à un duel à distance entre Christian Bale et Joel Edgerton, tout les deux impressionnants aux débuts, avant de basculer dans la caricature, de cabotiner, comme si Ridley Scott s'était lassé de ses jouets et voulait rapidement mettre fin à un tournage rapide (74 jours), pour un projet de cet ampleur.
Malgré la beauté des plans, une forme de lassitude s'installe face aux échanges entre Moïse et l'enfant représentant Dieu, ou l'affrontement entre Moïse le poilu et Ramsès l'imberbe. On attend que les dix plaies d'Egypte redonnent un nouveau souffle à un péplum qui en manque cruellement. Mais elles sont bâclées, les crocodiles n'étant pas réussis et surtout, on ne ressent pas vraiment la douleur de la cité de Ramsès, toutes les plaies étant rapidement traitées, sauf la dernière avec la mort des premiers-nés.
Mais à partir de là, je sors du contexte du film, en me posant cette question : Dieu tue des premiers-nés ? Des innocents ? Mais quel est ce dieu ? Et si je fais abstraction de ce fait, pourquoi il ne tue pas les coupables, Ramsès et sa cour avide de luxure et de gloire ? Oui, mais dans ce cas, le film est fini, Moïse est sauvé, comme son peuple, clap de fin, les lumières se rallument, la vie est belle, Frank Capra avait raison.
Malheureusement l'histoire continue, car il y a la fameuse mer rouge qui va s'ouvrir pour laisser les israélites passer et se refermer sur les égyptiens. C'est à peu près cela, car en fait Ridley Scott choisit d'évoquer une marée basse qui permet de rendre l'histoire plus réaliste, enfin presque.....
Ridley Scott ne renouvelle toujours pas l'excellence de son Gladiator, qui était déjà l'opposition entre deux hommes, dont l'un est envoyé en exil, avant de revenir pour sauver son peuple. Exodus fait pale figure à côté de celui-ci et n'offre pas un nouveau souffle au genre péplum qui semble subir une nouvelle traversée du désert, à l'image d'un réalisateur, dont "The Martian" sera pourtant très attendu, comme chacun de ses films, la marque des grands, qui est actuellement à genou, en attendant qu'il se relève et signe un nouveau classique.