(version TV de 5h20, spoilers à tout-va)


Puisqu’il m’est résolument impossible de formater ma prise de notes sur ce film incroyable afin de les faire correspondre au format conventionnel de la « critique », je m’adonne ici à un exercice un peu particulier, moins digeste je m’en excuse, mais en contre-partie plus analytique et qui au moins me permettra de développer sans me restreindre l’étendue des choses que cette œuvre m’a évoquée. Je n’ai rien voulu lire, ni critique sur le site ni quelconque papier sur internet avant d’achever ce texte, pour garder authentique mon interprétation globale et personnelle de l’œuvre. Alors installez-vous confortablement, munissez-vous d’une tasse de thé vert et de petits chocolats – après tout, c’est la saison – qui ajouteront un peu de saveur au pavé ci-dessous, découpé en quatre parties conformément à la diffusion épisodique de l’époque.



Partie 1 : Guirlandes vacillantes.



Nous sommes dans la nuit de Noël 1907. Après la traditionnelle représentation théâtrale et les chants, la famille au complet se réunit pour festoyer autour d’un repas opulent, dans des pièces à la décoration surchargée, où hommes et femmes embonpoints se goinfrent et s’enivrent dans une débauche dont ils ne semblent jamais pouvoir se repaître.


Le thème du théâtre est sans doute le plus important, et sans coïncidence aucune le plus récurent. Comme le dit le père Oscar Ekdahl à la fin de la représentation théâtrale : les gens quittent leur vaste monde pour aller au théâtre et y voir un miroir, plus petit certes, mais qui, comme toute petite histoire, reflète et dépasse bien souvent la grande. Et la famille Ekdahl n’est ni plus ni moins qu’un théâtre où chacun joue son rôle (l’oncle, le fils, le père, …), et où bien souvent les adultes s’oublient dans leur propre personnage, s’y enferment jusqu’à devenir des caricatures d’eux-mêmes.


Tout semble superficiel, dénaturé : des robes sophistiquées aux relations familiales, en passant surtout par le décorum religieux, tout sonne faux. En témoigne cette scène où les enfants partent se coucher, récitant la prière – ou plutôt expédiant la prière – de manière mécanique, en donnant l’impression qu’ils ne savent même pas ce qu’ils disent, ni pourquoi ils le disent. Mais ils le disent, parce que « c’est comme cela qu’on fait », bien que personne n’y croie plus tout comme personne n’est ni attentif ni intéressé par les récits bibliques contés par l’un des oncles. On apprend que l’une des servantes s’en va pour se marier, mais c’est tout juste si son maître s’en soucie, sachant qu’elle sera remplacée comme toute personne peut l’être dès lors qu’elle est réduite à sa fonction. En ce sens les relations sont factices, superficielles, personne n’est attaché à personne mais vante son prochain pour le flatter, parce qu’encore une fois « c’est comme cela qu’on fait ». Une mondanité où le formel dévore tout et vide tout de son sens ; où la profusion, le trop-plein donne un sentiment de perte totale de repères.


Il y a donc une rupture évidente entre le monde des adultes et celui des enfants : les premiers jouent et chahutent, mais leur complicité est profondément feinte ; les seconds s’amusent de la même manière mais leurs rires sont sincères, naïfs, innocents. L’hypocrisie des uns, réunis pour Noël sans réel engouement, forcés de parler un peu de tout, mais finalement surtout de rien, contraste avec l’impatience des autres qui font passer le temps de ces repas toujours interminables en fantasmant leurs cadeaux.


Cependant, alors que tout le monde va se coucher, on découvre tour à tour les couples qui révèlent leur vrai visage, les masques tombent et l’euphorie de la soirée n’en devient rétrospectivement que plus tragique : tous sont désabusés, misanthropes, lassés de la vie, désespérés, et qui plus est hantés par la peur de vieillir. « Comment devient-on aussi médiocre ? », demande l’un d’entre eux à sa femme, en pleurant sa condition. « Comment la poussière est-elle tombée ? Quand a-t-on perdu ? ». Et de conclure : « Oh, la vie ! », comme pour mieux signifier qu’il n’y a rien à faire sinon accepter.
Au milieu de ce monde désenchanté des grandes personnes, Alexandre, paradigme de l’enfance, trouve dans son imaginaire sa propre échappatoire. Puisque les adultes semblent avoir perdu leur humanité, agissant comme des robots enchaînés aux conventions sociales et prisonniers des apparences, Alexandre donne vie aux objets qui, en s’animant, lui apportent cette humanité déchue et cette attention qu’il ne peut trouver chez ses aînés.


« L’inconnu fâche les gens. C’est mieux de le rejeter sur les miroirs, les machines et les projections. Alors les gens rient, et c’est salutaire à tout point de vue ».



Partie 2 : D’un théâtre à l’autre



Alors que l’on sort de la première partie avec l’impression que tous les membres de la famille Ekdahl sont des personnages de théâtre qui sonnent faux, à l’exception du jeune Alexandre, la deuxième partie s’ouvre justement sur une répétition de Hamlet, sous les yeux d’un Alexandre mélancolique et toujours silencieux. Et cette première scène est directement marquée par la mort du père, Oscar Ekdahl.


Après la frénésie bruyante de la première partie, Bergman fait basculer son film dans un long silence morbide ponctué de cris déchirants (comme on a pu déjà les vivres dans Cris et Chuchotements), où le rouge des robes et la chaleur des chandeliers de Noël laissent place aux murs d’un blanc glacial et aux tuniques noires tachées de larmes. Ce retour à la réalité, ce désenchantement après un réveillon qui apparaît de plus en plus comme une parenthèse d’illusions, se matérialise donc à la fois dans les images et dans les personnages. Ces êtres endeuillés sont ramenés à leur condition de médiocres petits mortels que la vie théâtrale leur avait sans doute fait oublier. « Nous acteurs, qui jouons chaque jour avec la vie et la mort, ne devrions pas être si bouleversés… mais c’est étrange, notre désarroi est très grand ». Mais n’est-ce pas justement le contraire ? N’est-ce pas justement parce qu’ils vivent dans l’illusion constante et le jeu, interprétant des rôles intemporels de figures historiques et littéraires transcendantes, qu’ils en oublient la violence et l’inéluctabilité de la réalité ?


Et de l’autre côté, Alexandre enchaîne les jurons qu’il chuchote à Fanny lors de la marche funèbre du cercueil, et nous fait nous interroger sur l’absurdité de tout ce décorum, encore une fois, toute cette mise en scène de la cérémonie de l’enterrement, de toutes ces larmes versées pour ce qui n’est que la chose la plus naturelle au monde – la mort –, et qu’il vaudrait peut-être mieux prendre comme lui le fait, « à la rigolade », un jour comme un autre où il ne devrait pas être plus interdit de proférer des gros mots que n’importe quel autre jour. Alexandre est une espèce d’iconoclaste involontaire, qui remet sans cesse en question sans le savoir le théâtre social dans lequel nous vivons, avec sa vision du monde et ses interrogations naïves d’enfant.


Et ce n’est qu’un an après la mort de son mari que madame Émilie Ekdahl prend conscience de cette vie hypocrite, et prononce un discours magnifique à sa troupe qui s’applique autant à l’exercice théâtral qu’à la vie en général : « Et je passe ma vie dans une merveilleuse illusion, avec un œil aigu sur les fautes des autres tout en cachant les miennes. Je ne sais pas ce que je suis vraiment, et je ne me suis jamais souciée de trouver la vérité sur moi. […] Et je ne me soucie pas de la réalité, d’ailleurs. Elle est morose et sans intérêt. Elle ne me concerne pas, sauf si, d’une manière ou d’une autre elle concerne le rôle que je joue ».


Tout Fanny et Alexandre est dans ces quelques phrases.


Sauf que les Ekdahl quittent un théâtre pour un autre, et abandonnent la scène pour se tourner vers la religion, dont l’éducation est imposée à Alexandre après avoir aidé sa mère à traverser sa période de deuil. Mais la foi ne s’impose pas, ni ne s’apprend. Alexandre le sait, il est une fois de plus plongé dans un monde qui ne représente pour lui que des illusions dès lors qu’il n’y croit pas et ne s’y tourne pas de lui-même. Pour lui rien ne change, le dualisme entre mensonge et vérité est toujours le même, que ce soit au théâtre ou à l’église, ces deux grandes valeurs ne cessent d’être en tension : le mensonge est le principe même du théâtre et le péché de la religion, la vérité importe peu sur scène mais c’est là la plus grande recherche du croyant. Et la société nous oblige à faire un choix, à se positionner d’un côté ou de l’autre, à vivre soit dans le mensonge soit dans la vérité en partant du principe qu’ils sont antinomiques et aurait une existence indubitable. Mais Alexandre n’a rien demandé, il veut vivre au-delà de ces manichéismes qu’il sait très bien être des outils de manipulation.
Une fois de plus, Alexandre est une sorte d’iconoclaste en ce qu’il ne comprend pas toutes ces grandes valeurs et les rejette tout simplement parce qu’il n’est qu’un enfant. Et lorsqu’il découvre que sa mère va se marier avec le prêtre, il réalise que sa famille va être à nouveau plongée dans un théâtre, bien que sous une autre forme. Car si le prêtre promet que ce mariage sera pour les Ekdahl une renaissance, une nouvelle vie, dans le fond rien ne changera réellement – la preuve en est que les prières du soir sont toujours expédiées aussi rapidement, sans aucune conviction.



Partie 3 : Fantômes et faux idoles



C’est une chaude pluie d’été qui ouvre la troisième partie de Fanny et Alexandre, à l’écoulement sonore brisant le silence ambiant et aux gouttes épaisses éclaboussant les fleurs en bourgeons, les baies vitrées et les salons de jardins en fer-forgé. Les tons blanchâtres sont toujours omniprésents, malgré l’invasion colorée des plantes vertes d’intérieur qui redonnent un brin de vitalité à la froideur des pièces.


Alexandre et Fanny poursuivent leur éducation religieuse stricte, qui fait dorénavant partie intégrante de leur vie quotidienne. L’on tente de leur inséminer de nouveaux idoles, en leur racontant des histoires de fantômes que l’on jure vraies, bien que leur pragmatisme d’enfants leur fasse émettre quelques doutes.


Car ce sont les adultes qui croient le plus à ces superstitions, qui refusent le plus la mort et la séparation d’êtres chers, hantés tour à tour par le spectre d’Oscar Ekdahl à qui ils croient parler. Mais le silence perpétuel du fantôme d’Oscar prouve qu’ils ne parlent qu’à eux-même, qu’ils essaient de se persuader qu’ils ont accepté. Cette scène bouleversante de la mère d’Oscar qui le voit apparaître et lui prend la main, lui racontant ses plus beaux et lointains souvenirs, en est la plus tragique illustration. Elle utilise le souvenir de son fils qu’elle matérialise face à elle, et se confesse à lui dans un long monologue afin d’extérioriser ses douleurs les plus profondément enfouies. Au fond, absolument rien n’a changé en eux.


C’est ensuite au tour des autres membres de la fratrie (bien vivants, eux) de venir rendre visite l’un après l’autre à Héléna, leur mère, afin de lui faire part de leurs malheurs respectifs qui rappellent étrangement ceux déjà soufferts lors de la sombre nuit de Noël. L’un est toujours habité d’obsessions et de pulsions maladives envers les femmes, l’autre n’a rien perdu de sa cruauté envers son épouse qui l’aime malgré tout. Émilie, la mère de Fanny et Alexandre, est quant à elle toujours aussi perdue. Elle avoue s’être tournée vers la religion par soif de Vérité après avoir abandonné le théâtre qui lui donnait l’impression de vivre dans le mensonge. Si sa grossesse l’enchaîne physiquement à son nouveau mari, le prêtre, elle est encore plus enchaînée spirituellement à sa quête désespérée de vérité, qui semble lui être refusée où qu’elle aille, quelle que soit la scène sur laquelle elle décide de jouer sa vie.


Dehors, il pleut toujours, inexorablement ; l’orage gronde. Est-ce là une manifestation divine, comme on veut le faire croire à Fanny et Alexandre ? Fanny, plus jeune, commence à craindre ce Dieu dont on lui parle tant ; mais Alexandre reste imperméable à Ses gouttes, à Son orage, à Ses torrents. Il est bien au sec dans son esprit et le fait savoir : « Si un grand je-sais-tout comme lui punit pour si peu un avorton comme moi, il est le sale bâtard que je soupçonne » ; tout comme jurer sur la Bible ne lui fait pas peur en ce que cela ne veut rien dire pour lui. Tenir tête à Dieu n’est pas plus difficile que tenir tête aux adultes, et dans les deux cas, Alexandre le fait très bien. Ce garçon incarne la pureté d’un esprit qui refuse toute affabulation, toute doctrine qu’on voudrait lui imposer. Il n’est pas contre le principe même de croyance en quoi que ce soit, mais il refuse logiquement celles qui sont autres que les siennes, autre que celles en lesquelles il croit vraiment, personnellement, intimement (ses objets animés, ses mondes imaginaires, ses rêves). Cependant, il doit faire face à son beau-père qui, avec sévérité, le punit à chaque mot de travers.



Partie 4 : La vie nouvelle



Si le ton du film était jusqu’alors toujours grave, marqué par le deuil et le mal-être, cette quatrième partie débute par une longue séquence étonnante pleine de légèreté, où Fanny et Alexandre prennent la fuite en se cachant à l’intérieur d’une malle que leur oncle Isak vient acheter au beau-père. Leur escapade fait intervenir des éléments quelque peu magiques, qui leur permettent d’être présents dans leur chambre tout en étant bien cachés dans le coffre.


Puisque les deux enfants s’échappent de la maison du prêtre et qu’ils reprennent espoir, les couleurs chaudes reviennent à l’écran comme pour signifier la possibilité d’un nouveau bien-être : murs, rideaux et draps arborent un rouge vif, comme au début de l’histoire avant que tout ne bascule dans le blanc et le froid. Le cocon familiale retrouvé, la chaleur emplit à nouveau leur cœur.
Le vieil oncle, protecteur et bienveillant, leur conte une histoire qu’on ne peut s’empêcher de considérer comme une grande parabole de l’histoire de Fanny et Alexandre eux-mêmes. En voici quelques mots magnifiques : « Chaque homme porte en lui ses espoirs, ses peurs et ses désirs. Chaque homme crie son désespoir ou le supporte dans son esprit. Certains prient un dieu particulier. D’autres adressent leurs cris au néant ».


Dans ses rêves, Alexandre crucifie ses démons et retrouve sa mère purifiée. Et dès la scène suivante, les frères d’Émilie viennent demander le divorce au terrible prêtre, comme si le rêve avait touché la réalité, comme si l’imaginaire et la volonté d’un enfant avaient plus de force et de valeur que la réalité des adultes, qui s’y soumettent inconsciemment. Alors on entrevoit une possible réconciliation entre les membres de la famille, qui mettent leurs égoïsmes de côté pour le bien des enfants. Jusque là faussement unis, les frères paraissent pour la première fois sincères et loyaux aux valeurs familiales. Une ré-union qui n’aurait jamais vu le jour sans Fanny et Alexandre, sans les enfants donc, qui une fois de plus sont la pierre angulaire du monde mécanisé des adultes. Malheureusement, l’emprise de l’évêque sur l’esprit d’Émilie est si profonde qu’elle semble perdue pour de bon ; son nouveau masque l’aliène chaque jour un peu plus – à moins qu’elle ne joue là encore un faux rôle ?


En effet, alors qu’Alexandre se réfugie de plus en plus dans son monde fait de magie, d’objets animés et de marionnettes, Émilie décide enfin de s’en-aller. Elle a compris que ses enfants étaient la seule chose qui importe, et qu’elle ne pourrait jamais aspirer à la Vérité si ses propres enfants étaient forcés de vivre dans le mensonge. Et, comme par magie, elle se réveille au fond de draps rouges réconfortants, en apprenant que son horrible mari est mort brûlé à la suite d’un accident.
Le spectateur, lui, qui a eu avec Alexandre la vision de ces flammes, peut y voir une évidente métaphore : Émilie a enfin trouvé la Vérité, qui n’est autre que l’amour de sa famille et de ses enfants, et brûle symboliquement son mari comme pour se purifier des maux qu’il représentait. Le prêtre pourrait même ne jamais avoir existé, mais représenter allégoriquement le deuil et le besoin de se raccrocher à quelque chose, parfois de manière radicale, violente, nous faisant oublier où est la vraie vie et qui sont les êtres pour qui il faut vraiment se donner tout entier – comme en témoigne cet épilogue tout bonnement réjouissant, gai et émouvant !



Conclusion :



Allégories, métaphores, réalité ou illusion ? Quels événements se passent réellement ? Certains personnages sont-ils simplement fantasmés ? Bergman ne nous donne pas de réponse, car cela n’a pas d’importance. Dans Fanny et Alexandre, tout est réalité et illusion à la fois, tout est parabole, tout est symbolique, mais en même temps tout se passe comme si c’était la seule réalité. Une belle leçon, déjà de cinéma, mais surtout de vie et de philosophie.


« Ne soyez pas tristes, chers et magnifiques artistes ! Acteurs et actrices, nous avons pareillement besoin de vous. C’est vous qui devez nous donner nos frissons de surnaturel, ou encore mieux, nos divertissements intimes ».


Fanny et Alexandre commence par une explosion de couleurs, d’images et de paroles, avant de sombrer dans un deuil monochrome et minimaliste, préludant à un lent renouveau fait d’illusions et d’espoirs timides. Au milieu de cette médiocrité des grandes personnes, les deux enfants éponymes donnent au spectateur leur propre vision du monde, pure, innocente, naïve parfois mais qui ne fait que mieux souligner l’absurdité d’un monde d’adultes superstitieux et hypocrite. Œuvre fleuve, saga familiale luxuriante, Bergman s’implique tout entier dans ces cinq heures vingt à haute teneur autobiographique, où la religion, thème omniprésent dans toute sa filmographie, revêt un masque sombre et autoritaire ; où la famille est réunie pour mieux en détruire l’unité et en dépoussiérer le noyau, où l’enfance devient le refuge des souvenirs, la porte ouverte aux rêves, aux jolis fantômes et à un désir irrépressible de liberté. En 1982, Bergman tirait le rideau d’un monde, de son monde, d’une enfance terrible et malheureuse mais où l’imagination était encore un vaste « Far West » ; un Far West qu’incarne Alexandre dans le film tout comme l’œuvre de Bergman dans l’histoire du cinéma, et qui est, pour sûr, le plus beau des au-delà.




PS : je n’ai pas pu ne pas penser à chaque instant de ce film à la sublime chanson de Jacques Brel, Mon enfance, dont les paroles trouvent des échos troublants dans cette œuvre (et qui m’en a inspiré le titre) :


Mon enfance passa / De grisailles en silences / De fausses révérences / En manque de batailles. L'hiver j'étais au ventre / De la grande maison / Qui avait jeté l'ancre / Au nord parmi les joncs. L'été à moitié nu / Mais tout à fait modeste / Je devenais indien / Pourtant déjà certain / Que mes oncles repus / M'avaient volé le Far West. […]


Mon enfance passa / De servante en servante / Je m'étonnais déjà / Qu'elles ne fussent point plantes. Je m'étonnais encore / De ces ronds de famille / Flânant de mort en mort / Et que le deuil habille. Je m'étonnais surtout / D'être de ce troupeau / Qui m'apprenait à pleurer / Que je connaissais trop. J'avais L'œil du berger / Mais le cœur de l'agneau. […]

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le 10 déc. 2017

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Jules

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