Au lieu d'affronter un ennemi mégalomane et assoiffé de pouvoir ayant ses racines à l'Est (Blofeld, pour ne pas le citer), Bond s'en va cette fois déjouer les plans d'un gros bonhomme cupide à l'Ouest contaminé par la fièvre de l'or. Cark Barks avait lui déjà créé Balthazar Picsou dans les studios Disney en 1947 ! Au lieu de vouloir s'en prendre à Fort Knox comme un vulgaire braqueur de banque, il prévoit de rendre l'or qui s'y trouve radioactif et donc inutilisable pour que le paquet d'or qu'il détient déjà monte en valeur. Il faut se rappeler que le dollar était à l'époque indexé sur l'or avant qu'il ne devienne la valeur « flottante » de référence dans le monde lors de la crise pétrolière de 1973. Fort Knox était donc vu alors comme la Mecque des jeunes loups des trentes glorieuses (1945 – 1973). Pour incarner ce grippe-sou démiurge, l'allemand Gert Fröbe n'aurait pas pu être mieux choisi. Moins psychorigide que le Dr No ou Rosa Klebb, moins dérangé que Zorin (Dangereusement vôtre) ou Silva (Skyfall), moins sadique que Sanchez (Permis de tuer), c'est un bon vivant jovial pour lequel tous les moyens sont bons pour s'enrichir.
Il accepte mal la défaîte, comme dans le jeu de golf avec Bond où le trafic de balles va bon train. Par contre, il aime discutailler avec son adversaire, ce qui rythme le film. Il fait équipe avec la classieuse Pussy Galore (Honor Blackman, débarquée de Chapeau melon et bottes de cuir), chef d'un bataillon de blondes. Son prénom signifie en anglais « chattes à gogo ». Ah, ce Fleming !
Aucune fausse note dans le film, qui est classe de bout en bout, avec des scènes cultes qui sont entrées dans la culture populaire depuis lors. De la chanson culte du générique avec les fameux cuivres d'ouverture au cadavre recouvert d'or de la belle Jill Masterton (Shirley Eaton). Les mots d'esprits et les répliques qui tuent foisonnent également tout au long du film. On retiendra d'ailleurs la première occurence du fameux «vodka martini, au shaker et pas à la cuiller ». Goldfinger représente la quintessence du Bond classique à ne louper sous aucun prétexte.