Alors que Blue Ruin avait su jouer avec les codes du film noir, Green Room change autant de couleur éponyme que d’univers : il sera ici question d’un slasher, genre formaté s’il en est.
Le principe est dans la continuité de l’opus précédent : s’approprier un univers et les attentes qu’il induit, et y faire son nid. Mais la grande différence est sans doute celle du sujet : si l’ambiance héroïque et mutique permettait de décaper quelques poncifs dans Blue Ruin, le survival de Green Room a lui-même déjà fait l’objet de tant de déclinaisons qu’il n’est pas évident de proposer quelque chose de véritablement novateur.
Après une splendide première image qui pourrait nous faire croire que la chambre verte sera celle de la végétation où s’est enlisée la nuit précédente un vanne de punks, le film semble mimer l’introduction de Massacre à la tronçonneuse : l’équipée branque sur la route, vers les bas-fonds d’une Amérique qui profite d’être à l’abri des regards pour s’adonner à ses pulsions les plus noires.
Sur le plan visuel, Jeremy Saulnier confirme une maîtrise impressionnante : la majeure partie du film consiste à tirer parti de deux contraintes : l’unité étouffante du lieu, bunker dans lequel les victimes sont autant retranchées que prises en tenaille, et celle de temps qui permet à la nuit de devenir un véritable protagoniste. La photographie, teintée comme promis d’un vert assez cradingue, restitue parfaitement le huis clos et les cadrages jouent sur les opportunités en forme de coups de poker que représentes les méandres du labyrinthe de béton.
Le problème réside dans la façon dont la trame générale va agencer tout cet univers, qui semble d’avantage pertinent dans les plans fixes que les séquences qui consistent à s’en extraire. Répétitif, un peu abscons dans certaines coupures de rythme, le récit semble se questionner par moments sur la façon dont il doit s’y prendre pour atteindre les 90 minutes. La violence, souvent assez éprouvante, notamment dans la longueur accordée à certaines lacérations, n’atteint pas totalement son plus haut degré pour une raison assez simple : les personnages existent peu, et ne dépassent que rarement le statut de candidats à l'abattage, d’un côté comme de l’autre. Quelques tentatives de les voir s’adonner à une violence primale qu’ils refusaient dans un premier temps, notamment par le biais du maquillage, sont intéressantes, mais sans que l’essai soit transformé.
S’ajoutent à cette tiédeur quelques tentatives d’humour assez incongrues, notamment à travers le gimmick éculé du disque à emmener sur une île déserte ; Saulnier, dans son écriture, navigue un peu à vue, et son film suit de trop près la destinée de ses personnages : s’il a su avec pertinence et un sens visuel aigu les enfermer dans ce lieu, il a bien de la peine à en sortir.