La liste des éléments qui peuvent rendre Hugo Cabret détestable est particulièrement fournie. Une imagerie de carte postale sur le Paris début du siècle, des personnages enfants pénibles dans leur épaisseur psychologique (je suis un garçon aux yeux très bleu, triste et sale parce qu’orphelin, je suis une fille intello très enthousiaste au sourire imparable), une intrigue longue et pour le moins inintéressante, exposée laborieusement, des personnages secondaires tout aussi cartonnés et contribuant à dépasser allègrement les deux heures… Ajoutons à cela un recours à la CGI pour le moins abusif ; il peut certes occasionner de jolies transitions (comme celle du premier plan ou le mécanisme d’horloge se métamorphose en place de l’Etoile) ou des plans séquences féériques pour l’entrée en gare du Nord (nous proposant en cela une présentation des lieux diamétralement opposée à la très belle ouverture d’Eastern Boys qui, dans une approche bien plus documentaire, surplombe avec grâce ce nœud bourdonnant). Mais il semble surtout permettre un clinquant assez pénible et des séquences pesantes, comme celle du rêve et de l’accident de train, clin d’œil à ce cliché fort connu de la chute de la locomotive parisienne, enlaidi dans une scène d’action plutôt incongrue.
C’est finalement là le plus embarrassant : convoquer ces moyens pour évoquer avec la plus grande sincérité du monde son amour pour le cinéma naissant, son grain et son amateurisme, son artisanat et son illusionnisme de bouts de ficelles.
Car si Scorsese accepte de jouer dans un registre qui ne lui ressemble absolument pas, c’est bien pour servir un propos qu’il s’assigne depuis maintenant de nombreuses années : le discours d’un patriarche cinéphile notamment par ses indispensables documentaires (Les voyages à travers le cinéma). L’intention est louable, les moyens discutables, les effets contrastés.
Le film, lourdement didactique, fait son exposé de A à Z et semble la plupart du temps, surtout dans sa deuxième moitié, répondre à une commande l’Education Nationale, genre « C’est pas Sorcier explique moi les origines du cinéma ».
Pour un adulte cinéphile, c’est relativement pénible. On peut légitimement se dire qu’on n’est pas vraiment la cible, ce qui est tout à fait exact : les enfants ont trouvé ça passionnant et ont appris plein de choses. (donc, + 2, objectif atteint). Et ils étaient fiers d’avoir vu la veille Le voyage dans la lune avec leur père.
Coïncidence ?
Je ne pense pas.