Papy fait de la resistance
Rambo c'est avant tout une affaire de malentendu. 1982 Ted Kotcheff (qui n'a pas eu une carrière à la hauteur de ce fabuleux First Blood) nous montre un vétéran du Vietnam pris à partie par un...
le 12 mai 2010
38 j'aime
7
Vingt-six ans après le premier Rambo, le super-soldat malgré lui fait son retour, dans l'un des rares films occidentaux reflétant les conflits armés contemporains en Birmanie. Stallone réalise lui-même John Rambo (il tournera Expendables l'année suivante), quatrième opus en rupture avec les deux suites de 1985 et 1988, produits conformes aux velléités de l'administration reaganienne. De la dénonciation d'abus de pouvoirs et manipulations de ressources humaines par l'armée, Rambo devenait un américain indépendant rejoignant la ligue anti-communiste, soutenant au passage les bons, pieux et badass Afghans (3e opus) dans leur combat pour la liberté.
Débarassé de toute grandiloquence et de toute connivence avec une idéologie du moment, John Rambo se rapproche du premier opus en auscultant discrètement l'état psychologique et moral de son (anti)héros. John Rambo s'inscrit plus clairement dans le registre de l'action-movie et est sur ce plan le meilleur cru de la saga, de loin le plus intense et énergique. Simple, carré, percutant, il pose un cadre concis, opère en 87 minutes, avec une mission menée à son terme : faire le job, montrer ce que c'est surtout. John Rambo (film comme personnage) est un exécutant excellent et sans bavures, mais aussi un exécutant lucide, sec.
L'approche est intéressante, nullement hagiographique, brutale et sincère. Le personnage éponyme a évolué, son recul s'est radicalisé et teinté d'un désespoir inamovible. Mature, posé, Rambo n'est plus secoué par ses troubles passés et a carrément évacué toute spontanéité. Il prend en charge les situations, sa non-émotivité flirte avec l'indifférence aux agitations voir aux provocations des autres, sa maîtrise des contingences le conforte dans une telle position. Fataliste, il admet que les hommes sont ainsi, faits pour la guerre. Une telle disposition est vertueuse, lorsqu'elle rend prêt à agir en occultant ses besoins propres ou une morale personnelle ; quand il ne vivote pas, il s'élance afin de réparer, un peu, ce monde inique et sordide.
Rambo est un Churchill désabusé (et sans recul) lorsqu'il se tourne vers les autres recrues de la mission en cours (« vivre pour rien ou mourir pour quelque chose ») - l'armée d'élite partant en sauvetage. Le revers se manifeste là, en écho à ce fatalisme bourrin et implacable : il manque une extension pour faire de ce John Rambo un 'grand' film, quoiqu'il pèse déjà très lourd. Pas de ré-adaptation, pas de révélations ou de cheminement vers la révolution, pas de promesses lumineuses. Il ne pouvait y avoir d'envolées, c'est son caractère et le ciment de sa puissance ; mais sans doute qu'un plongeon plus large dans l'intimité de Rambo, ou même une relance majeure venant allonger le programme, aurait pu porter ses fruits.
Tant pis, ce happening consiste à monter au créneau, un créneau d'une violence extrême et puis rien d'autre, du moins sans se perdre en ambitions futiles ou en espoirs menaçants. Ainsi, dès le départ Rambo rejoint le groupe humanitaire en étant persuadé qu'il ne changera rien de la donne actuelle ; mais la volonté, l'engagement sérieux et les charmes de la leader (Julie Benz, vue dans Les Visiteurs 3) le poussent ; de plus sa nature lui interdit de rester passif, quelque soit ses constats. Le final marque un retour au pays et célèbre cette simplicité ; un coin joli et pacifique pour le guerrier revenu de tout.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films de guerre, Les films avec les héros les plus badass, Les meilleurs films d'action, Les meilleurs films d'aventure et Cinéma & Politique
Créée
le 31 août 2015
Critique lue 833 fois
6 j'aime
D'autres avis sur John Rambo
Rambo c'est avant tout une affaire de malentendu. 1982 Ted Kotcheff (qui n'a pas eu une carrière à la hauteur de ce fabuleux First Blood) nous montre un vétéran du Vietnam pris à partie par un...
le 12 mai 2010
38 j'aime
7
20 ans après Rambo III, Stallone renvoie son personnage emblématique de la culture US vers un ultime voyage vers l'enfer, un ultime baroud d'honneur en suivant l'actualité, car le conflit qu'il...
Par
le 26 févr. 2019
30 j'aime
25
Contrairement à une majorité de cinéphiles, c'est ce quatrième opus qui est l'épisode de trop pour moi. Comme pour Rocky Balboa, Sylvester Stallone voulait en finir avec l'un de ses personnages...
Par
le 14 avr. 2018
18 j'aime
6
Du même critique
En 1995, Mathieu Kassovitz a ving-six ans, non pas seize. C'est pourtant à ce moment qu'il réalise La Haine. Il y montre la vie des banlieues, par le prisme de trois amis (un juif, un noir, un...
Par
le 13 nov. 2013
51 j'aime
20
C’est la métamorphose d’un nain intrépide, héros à contre-courant demandant au méchant de l’histoire pourquoi il s’obstine à camper cette position. Né par sa propre volonté et détenant déjà l’usage...
Par
le 11 févr. 2015
48 j'aime
4
L‘une des meilleures comédies françaises de tous les temps. Pas la plus légère, mais efficace et imaginative. Les Visiteurs a rassemblé près de 14 millions de spectateurs en salles en 1993,...
Par
le 8 déc. 2014
31 j'aime
2