Après la réalisation du meilleur des X-Men, avec "Le commencement", Matthew Vaughn adapte de nouveau un comics de Mark Miller et retrouve un univers proche de "Kick-ass" avec son cocktail d'humour et d'action, savamment dosé et orchestré.
Au premier abord, "Kingsman" semble être un film destiné aux adolescents, surtout qu'il sort pendant les vacances scolaires. Mais dès la scène d'introduction, le doute s'installe avec "Money for Nothing" de Dire Straits, immense tube rock des années 80 de Dire Straits avec Sting en guest. Cela renvoie aussi aux "Gardiens de la Galaxie" avec l'apparition de Chris Pratt dansant et chantant sur "Come and Get Your Love" de Redbone de 1973, un mélange des époques, en décalage total avec l'univers dans lequel le film va nous emmener.
Mais un morceau musical, ne rend pas pour autant le film plus "adulte". Certes Taron Egerton est une excellente trouvaille, un jeune homme en révolte contre l'ami de sa mère, un homme violent et malsain. Sa folie est contagieuse et la poursuite en voiture jouissive. Pour autant, il faut attendre la mort de Lancelot et la violence de cette scène, aussi brusque, que surprenante, pour se retrouver devant un film presque grand public.
Matthew Vaughn semble plus à l'aise avec les comics de Mark Miller, ou il peut s'en donner à cœur joie, qu'avec l'univers des X-Men. Kingsman lui offre une nouvelle occasion de tout exploser à l'écran, en alternant scènes d'actions; parfois à la limite du gore, comme celle dans l'église, tout simplement magistrale; et d'autres, un brin dramatique, mais plus souvent drôles.
Il y a aussi cette absence d'hypocrisie que l'on voit dans la plupart des blockbusters ou le sang coule rarement, voir jamais, malgré les morts qui s'entassent. Kingsman ne fait pas dans la dentelle et ne prend pas le spectateur pour un imbécile, que ce soit un adolescent ou un adulte. Matthew Vaughn ne lésine pas sur le sang, mais évite l'overdose, dans un final explosif.
En dehors d'une réalisation impeccable, ou toutes les scènes d'actions sont réussies, ou la caméra est virevoltante, sans jamais nous perdre et ou les ralentis, sont efficaces, le tout sur une une BO parfaite et entraînante, mélangeant les genres et les époques, à l'image du film. Il y a ce casting exceptionnel, qui est aussi un mélange de jeunes talents en devenir et de talents connus et reconnus.
Colin Firth se régale, ne se contentant pas seulement de son flegme "so british", mais de se livrer à un exercice rare pour lui, en se retrouvant dans diverses scènes d'actions. Son enthousiasme est communicatif, tout comme ses répliques savoureuses, atteignant toujours sa cible. Samuel L. Jackson est tout aussi exceptionnel, une sorte de Spike Lee grandeur nature, avec ses casquettes vissées de travers et ses tenues de différentes couleurs. Il campe un méchant zozotant, voulant éradiquer le "petit" peuple de la surface de la terre, tout en ayant peur du sang. Dès qu'ils se retrouvent face à face, c'est toujours un régal. Deux ennemis, deux styles différents, mais surtout deux grands acteurs. Mark Strong; après son excellente prestation dans "Imitation Game", confirme son statut de solide second rôle. Il monte en puissance et régale jusqu'à la fin. On ne présente plus Michael Caine, on le voit dans la plupart des blockbusters, depuis que Christopher Nolan l'a remis sur le devant de la scène.
Taron Egerton est la révélation du film, un jeune inconnu, aussi bien à l'aise dans le drame, la comédie et l'action, comme ses illustres aînés. Un nouveau talent venu du Royaume-Uni, que l'on retrouvera prochainement aux côtés de Tom Hardy dans "Legend". Le jeune homme est bien entouré pour ses débuts, il a une gueule de star et le talent, pour briller lors des prochaines années. Sophie Cookson et Sofia Boutella sont aussi parfaites, même si le film met surtout en avant ses personnages masculins.
On a aussi une lutte des classes, avec Taron Egerton se retrouvant propulser dans un monde de nantis, né avec une cuillère d'argent dans le cul (c'est sa réplique). Même si le film est léger, il ne rate pas ses rares moments dramatiques, ne donnant pas l'impression de traiter le sujet à la légère.
En étant réalisateur, scénariste et producteur, Matthew Vaughn se permet de glisser des références cinématographiques et s'amuse avec "My Fair Lady", tout en lorgnant du côté de "Chapeau Melon et Bottes de cuir", même s'il manque cruellement d'une Emma Peel et bien sur, des James Bond, avec un chien tout mignon malgré sa gueule écrasée, qui porte les mêmes initiales.
Kingsman est une version plus fun et jouissive que "Kick-ass". Matthew Vaughn réussit un mélange des genres savoureux et nous en met plein la vue et les oreilles. L'ensemble fonctionne à merveille et s'adresse à un large public, ou chacun devrait y trouver son compte et surtout, son plaisir.