En Australie, il y a des zombies, il y a des idées, mais...

En lançant le visionnage d’un film d’horreur des années 1980, le spectateur et amateur que je suis s’attend à de la tripaille sur un scénario bien léger, et peut-être même un agréable nanar. C’est ce que me semblait promettre Zombie Brigade, aussi titré L’armée des damnés chez nous. Le film écrit, réalisé et produit par Carmelo Musca et Barrie Pattison est pourtant un peu différent, assurément surprenant, même si ce n’est pas forcément pour de bonnes raisons.


Car Zombie Brigade est un film plus cynique que violent, où l’hypocrisie des hommes fera davantage frissonner que les dents des créatures présentes. L’une des premières scènes du métrage se passe ainsi dans un conseil municipal d’une petite ville australienne, où le maire et ses conseillers débattent de l’opportunité à saisir d’un projet de parc d’attraction autour d’une mascotte japonaise. Ils papotent, et très vite le spectateur comprend que l’exploitation immobilière n’a plus de secrets pour eux, pour la morale, on repassera. Le principal obstacle n’en est pas un, ce mémorial de l’armée où des troupes ayant combattu au Vietnam sont enterrées et qui se trouve sur le plan sera dynamité. C’est de là qu’en sortira l’armée des damnés.


Mais avant cela, les notables australiens et les dirigeants japonais se réuniront pour discuter du projet, la nuit se terminant par une petite fête avec les prostituées engagées pour l’occasion. Différents personnages émergent, mais le coeur du métrage se retrouve autour de deux d’entre eux. Jimmy, un aborigène parti tenter sa chance à la ville mais revenu parcequ’il n’y a pas trouvé de travail et embauché comme homme à tout faire par la mairie, et Yoshi, qui se prétend être l’interprète du directeur japonais, mais qui reste elle aussi dans l’ombre alors qu’elle est bien plus importante.


Tout le coeur du film réside d’ailleurs dans ces personnages à la marge, rabaissés, parfois humiliés, par les “grands” qui savent mieux que les autres, mais qui sont pourtant responsables des pires catastrophes, avec ces notables, cet homme d’affaires et même l’armée plus tard. Un policier s’ajoutera à ce casting, mis de côté dans cette petite ville par ses autorités, mais un des principaux mérites du film est aussi son autre personnage aborigène, qui jouera un rôle important dans la résolution, en convoquant les coutumes tribales. Bien sur, au détriment des responsables de la ville qui n’y voient que sorcellerie ou bouffonnerie.


C’est évident, le film est écrit, il y a un contexte, un passé. Mais il ne s’en prive pas pour en parler. C’est là aussi le problème d’être à la fois scénariste, réalisateur et producteur, bref, d’avoir tous les pouvoirs, c’est que personne ne vient objecter que toutes les décisions prises ne sont pas bonnes. Zombie Brigade est bavard, et parfois il le fait bien, à l’image de ce conseil municipal filou qui ouvre le film, mais d’autres fois il s’attarde inutilement sur des détails qui ne servent pas l’intrigue. Un long dialogue entre Yoshi et son directeur en dit beaucoup trop sur des détails inutiles de leur relation. Quand il faut contrer la menace une fois qu’elle est révélée, faire le point sur ce qui s’est passé et comment réagir, les uns et les autres s’opposent avec une longueur déraisonnable, la joute verbale s’éternise.


Et il y a ces créatures, que le duo créatif a voulu rendre original, c’est évident, mais qui ressemblent plus à un fourre-tout d'influences un peu indigeste. Attention, ça vaut le détour, donc si vous ne voulez pas spoiler, ne lisez pas la suite. Ces soldats extirpés de leur tombeau et toujours dans leur costume sont en fait des hommes qui ont été rendus malades par une étrange concoction asiatique, que la magie aborigène peut combattre, ils ressemblent à des morts-vivants (mais avec peu de maquillage, on sent le petit budget), se déplacent en masse, mais ont des dents de vampire et peuvent être défaits par un pieu dans le coeur. Ils ont gardé un peu de leur intelligence mais se massent de façon balourde. La menace qu’ils représentent est donc légère, le spectateur étant désarçonné par ce patchwork un peu boursouflé, en tout cas probablement unique. Le film est tout de même malin dans sa conclusion, qui ne se termine pas dans un bain de sang, mais se révèle ouverte, évidemment noire, les infectés/morts-vivants/vampires étant assez peu contents de la société actuelle.


On ne peut pas dire que le film puisse faire frissonner quelques poils, ses moments avec ces créatures n’étant guère palpitants, le plus souvent mal utilisés. C’est d’autant plus regrettable que, si le jeu des acteurs est assez superficiel, certains plans de caméra sont assez réussis, notamment dans les intérieurs, quand les personnages humains sont à l’honneur (ou l’inverse), avec quelques idées de mise en scène. La nuit, l’agitation est mal retranscrite, c’est même confus. D’autant plus que la faible qualité du support d’enregistrement n’aide pas vraiment.


Le visionnage de Zombie Brigade n’est pas un grand moment, le film est un peu pénible, un peu trop long dans la plupart de ses scènes, qui parlent beaucoup, tandis que le versant horrifique de l’œuvre est complètement raté. Son petit côté cynique et sa mise en avant de personnages rabaissés lui assure une petite touche de piment, hélas pas suffisant. Mais ce qui est sur c’est qu’il désarçonne, son scénario est travaillé, à défaut d’être complètement réussi, avec un certain nombre d’idées qui n’appartiennent qu’à lui (pour le meilleur, et pour le pire).

SimplySmackkk
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le 31 mars 2021

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