En regardant tomber les premiers flocons de neige et en grelottant dans le froid de l’hiver, je me suis dit qu’il était bien temps de ressortir mon vieux DVD de l’Assassinat du Père Noël. Tourné dans la région de Chamonix, durant l’Occupation. Le film nous renvoie à une époque en partie révolue où l’épaisseur de neige montait à la hauteur des toits, où les routes dégagées laissaient de côté, non pas des murets de neige, mais des hauts murs. Les maisons, totalement enfouies laissent parfois juste apparaître une fenêtre éclairée quand la hauteur de neige sur le toit devient équivalente à celle du sol. Cette impression d’un autre monde, coupé de tout et hors du temps, donne une atmosphère tout à fait particulière au film de Christian-Jaque.
Véritable conte de Noël et conte d’Hiver, il nous présente un ensemble de personnages un peu fous qui vont vivre un bien étrange Noël.
Le Père Cornusse est un fabricant de jouets. Il fabrique des mappemondes en argile qu’il peint. Pour qui ? Difficile à dire vue la quantité fabriquée qui aurait de quoi remplir les maisons du village. On peut penser qu’il les distribue ailleurs, mais le village est totalement isolé, perdu dans les montagnes.
Au premier étage, sa fille Catherine fabrique des poupées en rêvant au prince charmant .
Traversant le village en traineau, le baron revient un jour d’un tour du monde de 10 ans pour s’engouffrer dans son château. Pour se débarrasser des fâcheux, il fait croire qu’il a la lèpre.
Si on rajoute à ceci une femme vêtue de noir nommée Mère Michel parcourant le village à la recherche de son chat et un instituteur exalté aux yeux de fous, on se dit que tous ont certainement un grain.
Finalement, les seuls personnages possédant un solide bons sens sont l’aubergiste et les deux Papets qui passent le film à taper le carton (échappés d’un roman de Pagnol mais ici à la mode savoyarde, en fait ce sont les mêmes, à part l’accent).
Une silhouette mystérieuse parcourt le village, cherchant à voler l’anneau de saint Nicolas, trésor de l’Eglise.
Pour Catherine, ce Noël sera pour elle un éveil à la vie par un simple baiser du baron.
La magie de Noël commence. On accompagne les personnages à l’Eglise pour la messe de Noël et on suit la tournée du Père Cornusse déguisé en Père Noël.
Et l’assassinat qui donne son titre au film ?
Que ceux qui s’attendent à voir une histoire policière passent leur chemin, certes il y a un crime mais celui-ci n’est qu’un prétexte à l’histoire. L’enquête menée par le Maire se résume à deux-trois interrogatoires rapides avant que Bernard Blier, à la fin du film, n’arrive pour expliquer l’affaire en deux minutes.
Finalement, peu nous importe. Ce qui nous intéresse, ce sont les trois personnages principaux, Cornusse, sa fille et le Baron.
La tournée du Père Noël dans les maisons du village est un régal :
« Pour dire que la maison sera pleine de jouets…et bien non on ne pourra pas dire qu’elle sera pleine de jouets ».
Le sourire du petit Roger s’efface.
« Mais pour dire que ce sera une maison sans jouet, et bien non, ce ne sera pas une maison sans jouet.. ; »
L’espoir du petit Roger renaît.
Après avoir visité 42 maisons et pris 42 apéritifs, le Père Noël parvient enfin au château pour voir les petits de la gardienne mais ceux-ci ne le verront pas arriver.
Les images sont belles, les enfants parcourant la montagne en appelant le Père Noël, la procession des enfants accompagnant le Père Noël dans le soleil couchant ou encore celle où, magnifique dans son costume savoyard, Renée Faure (Catherine) irradie, telle une princesse de la Renaissance, sous les yeux émerveillées du baron, Raymond Rouleau et les nôtres.
Citons enfin pour finir une interprétation formidable d’Harry Baur en Père Cornusse, plein d’originalité, de Robert Le Vigan qui crève l’écran, en instituteur excité et les enfants, merveilleux de justesse et de naturel.
Un film à voir et revoir.