Critique remaniée le 12 octobre 2021.
C'est en 1936 à Tokyo qu'une ancienne et jolie geisha, Sada, officie comme serveuse de restaurant dans un établissement des beaux quartiers de la capitale. Entre deux services, l'une des ses principales occupations est d'épier en cachette les relations amoureuses de son patron et de sa patronne. Entre temps, Sada aime "rendre service" à quelques hommes âgés et lubriques. Victime de violentes pulsions sexuelles, le patron du restaurant, Kichizo, après avoir assassiné l'une de ses relations, est séduit et très excité à la vue de la jeune serveuse. Il va alors entraîner celle-ci dans des jeux érotiques de plus en plus pervers allant même au-delà de toutes limites. C'est ainsi que leurs "jeux" fréquents vont devenir de plus en plus sophistiqués et deviendront au cours de cette escalade de véritables cérémonies jubilatoires et initiatiques.
Toutefois, celles-ci n'ayant plus de limites, au cours d'un rapport fougueux, Sada finira par étrangler et émasculer Kichizo, symbole de cette passion torride et sans limite.
L'intrigue de ce chef-d ’œuvre de Nagisa Oshhimaima, qui réalisa entre-autre "Furyo*" en 1983, est tout à fait véridique. Dans un pays comme le Japon où, à cette époque, régnait en maître le militarisme avec sa morale et ses principes strictes, cette "affaire" fit grand bruit. C'est dans ce contexte que se déroule l'intrigue mettant en images les instants d'amour mêlés de violences auxquels se livrèrent Sada et Kichizo, deux êtres unis par un attachement extrême et qui vont, tel un rituel, se livrer dans un étrange et pesant huis clos à une obsédante passion liée au sexe. Telle une tornade, ce dévorant désir va aspirer progressivement ce couple illégitime vers une vertigineuse montée en puissance de la passion.
Celle-ci poussera les acteurs de cette liaison à un aboutissement tragique au cours d'une joute finale d'une extrême violence symbolisant des sentiments exacerbés de possession pour Sada et de soumission de la part de Kichizo. Ces deux êtres vont nous démontrer qu'une telle osmose peut mener à des actes démesurés aboutissant au sacrifice.
Ce merveilleux film fut notamment présenté à Cannes en 1976 et reçut un formidable accueil de la part du public et de la critique. Il faut dire que cette œuvre est obsédante par sa dureté, son réalisme et ses scènes érotiques filmées sans aucune pudeur et avec un naturel désarmant. Par ce biais, Nagisa Oshima sublime l'amour physique en nous démontrant que malgré les a priori, cette sorte de relation peut mener également à la passion amoureuse. Cette œuvre que l'on peut qualifier de chef-d' œuvre du cinéma érotiquo-pornographique bénéficie de l'interprétation exceptionnelle de Eiko Matsuda et de Tatsuya Fuji. Il ressort une telle osmose dans le jeu de ces formidables acteurs que la question du devenir de ce couple infernal hante notre imagination tout au long de la projection. Les images sont d'une grande beauté et contribuent de façon merveilleuse à nous insérer dans cette atmosphère envoûtante.
Cette réalisation nous prouve qu'avec un tel sujet et de telles images, le cinéma érotique, lorsqu'il est filmé avec un formidable talent, peut nous donner des chefs-d'œuvre tels que celui-ci.
Néanmoins je comprends fort bien l'avis des spectateurs qui se trouveraient choqués par ce sujet et certaines scènes qu'ils jugeraient "malsaines".
Ce film est interdit aux moins de 16 ans.
Note: 8/10
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