Gérard Krawczyk (dernière fois que j'écris son nom correctement) est un réalisateur connu essentiellement pour ses comédies foireuses et notamment la franchise Taxi. Mais en approfondissant sa filmographie et en revenant sur ses débuts on retrouve «L'été en pente douce».
Gégé adapte en 1987 le roman éponyme de Pierre Pelot et choisit Martes-Tolosane en Haute Garonne comme lieu de tournage. Je pense que c'est le premier bon point du film. Le réalisateur semble avoir de la tendresse pour cette France profonde et réussit le tour de force de nous inviter parmi ces gentils péquenauds avant de balancer une scène cruelle rappelant la triste réalité. A partir de ce postulat, on a une ambiance vraiment originale, nous imprégnant complètement à la limite du film de genre avec son aspect huis clos. Ajouté à cela une BO formidable rappelant alors la quintessence des westerns (époque déjà lointaine) et le film se téléporte instantanément dans une bulle hors du temps. Les repères sont floutés.
Un personnage crucial sera le soleil dans tout ce qu'il a de plus métaphorique. Écrasant nos malheureux quidams, son omniprésence influence les moindres choix de nos protagonistes courant à leur perte. Gérard Kroklakik n'a rien inventé, on pense à Albert Camus par exemple, mais l'intention est louable. Le metteur en scène aura tendance à être trop explicatif par instants, mettant des mots là où les images se suffisent, mais peu importe ! Ne boudons pas notre plaisir devant un western rural (si rare dans nos contrées).
Gégé avait songé au regretté Coluche dans le rôle principal, fort de sa prestation dans Tchao Pantin. Seulement Coluche aurait joué du Coluche et malgré tout le bien que je pense de cet homme, le casting tel quel me convient à merveille (exception faîte de Guy Marchand). Jean-Pierre Bacri crève l'écran, jouant le rôle de toute une vie, à savoir le grincheux mécontent pour un oui ou pour un non avec une légère dose de tendresse et de compassion. Jacques Villeret joue quant à lui, l'idiot gentil et timide. Je pense que ce film, fort de son succès au box-office, enfermera quelque peu Bacri et Villeret dans des cases car il sera difficile de leur ôter l'étiquette de Fane & Mo. Mais la véritable clé de ce casting aux petits oignons se nomme Pauline Lafont jouant la bimbo de service écervelée : Lila. Elle crève littéralement l'écran à chaque apparition et l'ambiguïté de son personnage demeure la face la plus intéressante de cette histoire. Un physique vulgaire chez une poupée délicate et pleine de douceur n'hésitant pas à materner Moe.
Rien ne lui sera épargné dans ce milieu masculin très macho et pourtant elle mène sa barque avec brio. Pauline Lafont véritable révélation au destin tragique puisqu'elle perdra la vie peu de temps après le tournage.
Gérard Krowlasix aura su dénicher le talent et je pense qu'il peut être un formidable directeur d'acteur. Après le visionnage de ce film, je ne peux que regretter ses choix ultérieurs préférant les grivoiseries à la mélancolie. Je me dois d'ajouter qu'on est loin d'un chef d'oeuvre quand même car Gégé ne transcende à aucun moment son œuvre via un dispositif de mise en scène. Elle demeure aseptisée au service du récit. Ce sont les choix en amont du tournage qui ont conduit à une telle réussite et au succès mérité.
Pour finir, j'émettrais quelques réserves quant au final faussement happy ending. Bien qu'il ne soit pas raté, loin de là, je m'attendais à quelque chose de plus nihiliste et marquant. Je pense que Gégé ne s'est jamais éloigné de son support. Il est cependant intéressant de noter que Lila avait déjà annoncé le succès du film en répondant à Fane :
«Les gens aiment que les histoires se terminent bien»
Sacré Gégé !