The Flesh and the Fiends est avant tout un film d'ambiance, au sens où il développe et soigne tout particulièrement une atmosphère horrifique digne des productions de la Hammer (d'où Peter Cushing a été débauché pour composer le personnage du docteur Knox ici, enseignant la chirurgie) qui plonge dans la ville crasseuse d’Édimbourg au début du 19ème siècle. Le scénario, même s'il n'est ni bâclé ni contingent, avance dans un espace relativement simple et balisé avec l'histoire d'un célèbre professeur spécialiste de l'anatomie humaine qui finance indirectement la filière du vol de cadavres. Pire, il l'encourage en sous-main, par négligence consciente et volontaire quant à l'origine des macchabées qu'on lui amène, naturellement pour les besoin de la science. Petite particularité tout de même : il s'agit d'une histoire vraie, qui a inspiré beaucoup d'autres films, illustrant les agissements des tueurs en série William Burke et William Hare qui assassinèrent 17 personnes dans le but de revendre les corps au docteur Knox — qui lui se sentait limité par les autorités anglaises dans ses recherches en anatomie, puisqu'elles n'autorisaient que l'utilisation de corps de criminels pendus. Ces corps fraîchement récupérés se présentaient donc comme une véritable aubaine. Au nom de la science, bien entendu, sans oublier de répéter ad nauseam le serment d'Hippocrate : "Je donnerai mes soins pour le bien de mes patients selon mes capacités et mon jugement et ne ferai jamais de mal à quiconque."
Loin de la retranscription historique ou de l'essai sur la légitimité de l'expérimentation en sciences, John Gilling oriente sa proposition autour de l'ambiance malsaine qui hante les rues pouilleuses d’Édimbourg : une esthétique raffinée enveloppe l'action d'un noir et blanc très classieux, au sein duquel se développe un sens de l'étrange très particulier, fait de violence et de populace. D'un côté les marchés boueux où se croisent enfants, infirmes et fripouilles, entourés de ruelles mal famées comme autant de coupe-gorges, et de l'autre le manoir très bourgeois du professeur émérite dans lequel il assure les cours à ses étudiants. C'est très clairement dans la description des bas-fonds de la ville que le film se montre le plus efficace et convaincant, avec toute une série de lieux (marché, taverne, maison close, etc.) qui sentent la vérole des gueux et le stupre des filles de joie.
À cette dualité aristocratie / populace se superpose les personnages de Donald Pleasence et de Peter Cushing : le premier excellant dans l'archétype de la crapule tout droit sortie d'un Moyen Âge mal dégrossi, violente, déraisonnée, prête à tout (y compris le meurtre sous toutes ses formes) pour s'enrichir, et le second symbole parfait de l'ambiguïté distinguée, dissimulant sous le
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