Ce film est sorti en même temps que mon emménagement en Calédonie. Tout de suite, le ton était donné. Film interdit en salle. La Calédonie, ça ne se regarde pas comme un bout de France, mais comme un fief accordé à quelques familles dans lequel on y a importé quelques calédoniens pour cohabiter avec les kanaks, les wallisiens et autres polynésiens, sans oublier un contingent d'expatriés surpayés sans cesse renouvelé.
Ce film a le mérite d'exister, de donner la voix à ceux qui en ont eu très peu et d'avoir un parti pris cohérent, pour le reste, quelques regrets subsistent dans la mise en œuvre.
La première chose est d'avoir voulu en faire une histoire politique alors que le problème local était suffisant pour déployer le récit. Une fois là bas, la France est très loin et aurait dû le rester dans le film, les liaisons régulieres me semblent casser le rythme, surtout que Torreton pantoufle pas mal, alors que les épisodes télévisuels nationaux sont bougrement plus efficaces pour raconter le désintérêt et l'hypocrisie métropolitaine. J'adore particulièrement cette phrase de Chirac qui dit
"J'aime beaucoup la Calédonie, j'y suis même aller 9 fois"
J'ai aussi beaucoup de mal avec l'ensemble des acteurs incarnant les militaires et malgré le fait que j'aime bien Mathieu (un seul T) Kassovitz, peut être qu'il aurait dû laisser la place à un autre acteur, faudrait-il encore qu'il y en ai un qui corresponde et qui accepte. Par contre les acteurs mélanésiens sont parfaits et c'est à chaque fois un plaisir de les écouter.
Ensuite, j'ai bien envie de donner mon avis sur deux scènes. La première, celle de l'attaque de la gendarmerie, magnifique et inventive, un régal. L'autre, beaucoup plus lourde, l'attaque de la grotte qui à mon sens aurait gagné a être filmée dans un aspect plus dramatique (genre Kagemusha ) plutôt que dans l'esprit de l'action, surtout qu'on en a rien à foutre de la victoire française.
Dommage, il aurait fallu peu de choses en plus pour en faire un grand film, pour transcender l'Histoire et convaincre le plus grand nombre de l'absurdité de la situation.
Transcender l'histoire, car du coté calédonien, on vous assurera de l'angélisme dans le traitement des personnages kanaks. Peu m'importe, à les écouter, ce sont eux (les calédoniens) qui sont traumatisés par cette histoire, eux qui étaient à une bonne centaine de kilomètres et qui ne connaissaient que très peu de monde sur place, et pas les kanaks, qui pour le coup, avaient au minimum des liens culturels, communautaires et autochtones.
La morale dans cette histoire, c'est que j'ai mal supporté la Calédonie, que je suis revenu au bout de trois ans, pile pour Charlie Hebdo, le Bataclan et Nice. Et me revoilà en compagnie de gens plus traumatisés que les syriens, lybiens, irakiens etc...
C'est fou le monde, hein!