Une toute autre image du X, empli de nostalgie, où la liberté était le leitmotiv de tout un chacun.

Jérôme About & Sébastien Bardos dresse le portrait de ce qu’était "l'âge d'or du cinéma X à française", de ses débuts dans les cinémas de quartier dans les années 70 à l’avènement de la vidéo et l’adoption de la loi "X" au tout début des années 80 (et avec pour conséquence, sa chute et la fermeture inexorable des salles de cinéma spécialisées dans le X).

Remettons-nous dans le contexte, dans les années 70, le X n’était pas encore le genre de film que l’on s’échangeait sous le manteau ou était proposé derrière un rideau dans les vidéo-club. En l’absence de législation, le cinéma porno avait pignon sur rue et était exploité au cinéma au même titre qu’un film français dit "traditionnel". Le cinéma érotique ou pornographique rencontrait alors un franc succès en salles, aussi bien à Paris que dans les petites salles de province. Le gouvernement de Valéry Giscard d'Estaing voyant d’un très mauvais œil ce succès et face au lobby de la bien-pensance catho-coincée, ils ont fini par voter la loi "X" en 1975 avec pour conséquence, y imposer une forme de censure (une taxation bien plus contraignante, une majoration plus forte sur les bénéfices et l’absence de toute subvention), contraignant ainsi les distributeurs à ne proposer leurs films que dans des circuits de salles restreintes, le cinéma pornographique se retrouve donc relégué en marge du 7ème Art. Avec cette loi et surtout, l’arrivée de la vidéo, le cinéma pornographique a inexorablement fini par péricliter. Sans oublier que dans le gouvernement suivant, celui de Mitterrand, le ministre de la culture (Jack Lang) n’aura fait que durcir la loi.

L'enfance du hard (2013) revient sur cette formidable (et bien trop courte) aventure qu’était la libération sexuelle au cinéma. En pleine période post-hippie, où le sexe et la drogue étaient légion, il y régnait une insouciance et une liberté des mœurs et d’entreprendre. C’est comme cela que le cinéma érotico-porno français a vu le jour. Les réalisateurs reviennent sur cet âge d’or, en multipliant les interventions de diverses personnalités ayant œuvrés dans le cinéma X des années 70, tout en alternant avec des extraits de films tels que Le Sexe qui parle (1975), Exhibition 1 & 2 (1975/1978), Les Pornocrates (1976), Queue de béton (1979), Secrétaires sans culotte (1979), Nadia la jouisseuse (1979) ou encore Bourgeoise et… pute (1982).

Ainsi, on y retrouve aussi bien des directeurs de la photographie (François About), des scénaristes, des costumières, des réalisateurs (Pierre B. Reinhard (Le pensionnat des petites salopes - 1982), Gérard Kikoïne (Chaudes adolescentes - 1981), Jean-François Davy, …), ainsi que des acteurs/actrices (Piotr Stanislas, Richard Allan (C'est la fête à mon cul - 1977), Denise Lascène (L'infirmière n'a pas de culotte - 1980), Brigitte Lahaie (Je brûle de partout - 1979), …), ainsi que le journaliste & historien du cinéma Christophe Bier (Eurociné 33 Champs-Élysées - 2013), auteur du Dictionnaire des films français pornographiques & érotiques de longs métrages en 16 et 35 mm.

Un documentaire qui, malgré sa courte durée, s’avère très riche et instructif, nous livrant bon nombre d’anecdotes croustillantes sur le milieu du X (mention spéciale à Pierre B. Reinhard qui nous dévoile ses secrets pour fabriquer du faux sperme (blanc d’œuf & lait concentré sucré), une pratique utilisée uniquement pour prendre la relève lorsque l’acteur avait un coup de mou). On y apprend aussi que bon nombre de réalisateurs avaient recourt au Cameflex®, une caméra tellement bruyante que le son n’était pas en prise directe, nécessitant une séance de doublage en post-production. On y croise donc Anne Ludovic (doubleuse de films X) qui donne de sa personne en compagnie de Gérard Kikoïne. Le film fait aussi une halte chez Maurice Laroche et son cinéma Le Beverley qui était le tout dernier cinéma pornographique de France (avant qu’il ne baisse définitivement le rideau en févier 2019) et où l’on pouvait encore visionner bon nombre de films en 35mm dans ses fauteuils en skaï rouge.

Un documentaire qui nous donne à voir une toute autre image du X, empli de nostalgie, l’époque bénie où la liberté était le leitmotiv de tout un chacun. L’absence du diktat de la beauté (les corps pouvaient être disgracieux ou poilus), les parties fines entre acteurs/trices et techniciens sur les tournages, l’insouciance, bref tout cela est le portrait d’une époque bel et bien révolu.

http://bit.ly/CinephileNostalGeekhttp://twitter.com/B_Renger

« Ça c’est exactement comme un film normal… Je vois pas… J’suis là pour éclairer, pour faire de la lumière, j’suis là pour… Que j’éclaire la quéquette de monsieur Machin ou la chatte de madame Machine… c’est comme si j’éclairais la gueule de Zitrone. C’est exactement pareil. »
Dixit un chef op’ lors du tournage de La Vitrine du plaisir (1977)

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