On peut le dire désormais sans prendre aucun risque alors que bientôt 20 ans se sont écoulés depuis sa sortie: la trilogie du Seigneur des Anneaux de Peter Jackson est un classique du cinéma d'aventure, d'évasion, et du cinéma tout court à bien y réfléchir.
Et pourtant à l'époque, quand on a appris le nom du réalisateur qui allait être responsable de l'adaptation, on se disait que ça allait pas être gagné.


En premier lieu, le livre écrit par le professeur Tolkien est très important pour moi et je vous laisse le lien ci dessous si vous voulez savoir ce que je pense de l'oeuvre originale (ici.)


Etant un immense fan de l'oeuvre originale, donc, vous imaginez sans peine la fièvre qui s'est emparée de moi lorsque j'apprenais à la fin des années 90 la volonté d'adapter ce récit au cinéma.
Qu'elle ne fut pas ma surprise également de voir le nom du réalisateur associé à cette adaptation: Peter Jackson...


Je n'en connais qu'un seul. Un type pour lequel j'éprouve une sympathie qui ne s'est jamais étiolée depuis que j'ai assisté à ses débuts hallucinants dans Bad Taste, un film gorigolo fabriqué avec des bouts de chandelles et des morceaux de cartons, et qui respire la passion et la débrouillardise, compensant largement le manque de budget de l'OFNI Neo-Zélandais (j'en parle d'ailleurs aussi: ici). Jackson a également eu la bonne idée de faire d'autres films devenus cultes tels que Brain Dead, sans doute un des meilleurs représentant du film de zombie bien saignant, Meet The Feebles et son Muppet Show de dégénérés, Créatures Célestes qui s'éloigne un peu de son genre de prédilection pour adapter un fait divers dramatique concernant des adolescentes meurtrières s'étant produit dans son pays d'origine, avant de revenir à ses premières amours fantastiques en faisant jouer un Michael J Fox de retour en grande forme dans le très réussi Frighteners.


Mon premier réflexe à l'époque est de penser à un homonyme du maître du splatterstick, ne voyant pas en Jackson celui qui pourrait convoyer la solennité nécessaire à l'adaptation sur grand écran de Tolkien. Mais je constate vite que c'est bien de lui qu'on parle et que le bonhomme semble motivé comme jamais, lui aussi en grand passionné de l'oeuvre de Tolkien.


Après la surprise initiale, je me dis que Peter pourrait très bien s'acquitter de cette tâche que d'aucuns considèrent impossible; le livre se tapant une réputation bien ancrée d'inadaptabilité, et la tentative de long métrage d'animation de 1978 par Ralph Bakshi ne fait que renforcer cette opinion, même si on peut tout de même par moment ressentir son influence dans le travail de Jackson. En tout cas, en ce qui concerne les aspects de la production relatifs à la création des diverses créatures qui peuplent la Terre du Milieu Jackson est l'homme qui peut convenir à la situation. Un orc, un Nazgul ou un Ent estampillé Jackson, ça peut le faire me dis-je à l'époque; et il faut bien avouer que même les plus réfractaires à la trilogie de ce bon Peter passeront pour être d'une mauvais foi crasse s'ils ne lui accordent pas cette distinction.
Je reste pourtant un peu sceptique tenaillé entre la joie de voir une adaptation de mon livre favori voir le jour, la tristesse un peu prétentieuse de ne pas être l'initiateur du dit projet, et l'effroi qu'on puisse entacher mon livre favori avec un étron filmique ou même une oeuvre peu respectueuse du monument qu'est le livre de Tolkien.


Il faudra donc attendre encore un peu afin de constater de visu si mes craintes ou mes espoirs concernant le projet fou du Neo-Zélandais sont fondées.


Je me rappelle encore de ma fébrilité le jour de sa sortie lorsque je pénétrais dans la salle de projection. Je me souviens de la population bigarrée, qui aurait presque pu directement surgir d'un coin de la Terre du Milieu, qui rentre dans cette sale obscure comme la compagnie pénètre dans la Moria. Et puis l'ouverture, la Comté, les personnages, les maquillages et effets pratiques, l’incroyable travail sur les paysages, l'utilisation combinée de maquette pour encrer la fantasy dans le réel et d'effets spéciaux numériques aux petits oignons, permettent au film de ne jamais paraître trop factice (et qui fait que 20 ans plus tard, le film n'a pas tellement vieilli) et de restituer la magie de l'univers crée par Tolkien.
J'étais surpris et surtout heureux que cette oeuvre qui me tient tant à cœur ait été adaptée avec respect. J'étais à coté de la plaque en ce qui concerne Peter Jackson.Il avait réussi son incroyable pari: retranscrire à l'écran le travail de Tolkien.
Bien sûr aucune adaptation ne peut parvenir à rendre tout à fait une oeuvre écrite, et c'est ici d'autant plus difficile que la création de Tolkien est monumentale.
On peut regretter la disparition du personnage de Bombadil, mais en prenant en compte le récit qui nous est conté dans cette adaptation, Bombadil serait déplacé, car le fait que l'anneau n'ait aucune prise sur lui déforce un artefact que Jackson et son équipe se sont échiné à présenter comme ayant un attrait irrésistible. Au point que même le très sage Gandalf n'ose pas le recevoir en sa garde de peur de succomber au mal qu'il exhale.
On peut peut-être aussi regretter un récit qui au départ s'étend sur des années dans le livre (entre le moment ou Bilbo quitte la comté et le moment ou Gandalf revient dans la Comté auprès de Frodo pour vérifier son hypothèse via l'anneau), et est ramené à quelques jours dans le film.
On peut peut-être regretter encore que cette profonde mélancolie qui imprègne chaque page du livre de Tolkien ne soit jamais tout à fait transposée à l'écran. Jackson parvient à la faire passer en partie lors de la sortie de la Moria, dans la Lorien, ou encore lors de la séparation de la communauté et de la mort de Boromir, mais échoue à faire passer ce sentiment en général (même si ce n'est pas faute d'essayer).
On peut parfois regretter aussi que ce bon vieux Peter se laisse aller aux gaudrioleries qu'il apprécie mettre en scène et ajoute un humour sans doute gamin à l'univers de Tolkien. Chassez le naturel, il revient au galop. C'eut été presque décevant que Jackson ne déborde pas un peu du canevas très sérieux peint par Tolkien. Je ne peux pas tout à fait lui en vouloir, d'autant qu'il se restreint un maximum lors de cette ouverture (pour mieux se lâcher dans le second et le troisième épisode à coup de Legolas surfant sur un bouclier ou un éléphant et de blagues de nain qu'on jette).
Mais que ces quelques regrets ne nous cache pas toutes les glorieuses réussites de cette adaptation.
Que ce soit dans la volonté de fidélité au récit et à l'esprit du livre, et ce même dans la manière dont la trilogie a été envisagée en un seul film et tournée comme tel pendant 18 longs mois (tour de force qui restera dans l'histoire du cinéma), ou que ce soit dans le rythme du récit qui prend son temps et insiste sur les longs voyages, le temps qui passe et la volonté d’imprimer au récit les changements de climat, les liens que tissent entre eux les membres de la communauté, le souci du détail dans tous les départements, des costumes à l'architecture en passant par l'art de la forge et qui cherche à restituer la richesse de l'environnement multiculturel qu'est la Terre du Milieu, ou encore dans l'excellente prestation de l'ensemble de ses acteurs, l'adaptation de Jackson triomphe de toutes les embûches et s'impose comme la plus grande oeuvre de fantasy du début du XXIème siècle (et se classe sans soucis sur le podium all time si je puis dire) et attend toujours un challenger à sa hauteur.
De plus, si Jackson a quelques soucis pour intégrer dans son film la mélancolie permanente et la présence lourde de la mort qui s'invite dans chaque chapitre de la trilogie papier, il parvient me semble-t-il parfaitement à faire passer le message d'espoir qui transparaît sans cesse entre les pages du Seigneur des Anneaux. Il parvient aussi à maintenir le cœur du récit intacte et vibrant en transposant parfaitement les hobbits à l'écran. Après tout c'est la simplicité de ces gens du commun, leur courage, et leur résilience bien plus que les rois et les princes que célèbre le récit de Tolkien, et il est compliqué de ne pas tirer son chapeau à un sacré magicien ressemblant, comme de juste, plus à un hobbit qu'à Gandalf pour le coup.


La communauté de l'anneau est un premier film impeccable qui vous fait directement rentrer de plein pied en Terre du Milieu et vous laisse le souffle court et dans l'attente languissante de la suite. C'est un film d'aventure presque parfait qui peut se ranger sans souffrir de la comparaison à coté des plus grands film d'évasion et d'aventure de l'histoire du cinéma.
Ces films restent 20 ans après leur sortie source pour moi d'un émerveillement sans cesse renouvelé, même après avoir regardé la trilogie (en version longue)bon nombre de fois et notamment deux fois au cours de cette année.


Pour les Deux Tours ici

Samu-L
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le 22 juin 2020

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Samu-L

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