Un petit bijou de beauté sublime et de symbolique complexe

Les Premiers les Derniers est un véritable joyau esthétique qui séduit dès les premieres images. Les plans larges de la campagne dévastée de Beauce sont magnifiquement sublimés, la photographie est d'une rare beauté et les panoramiques sont maitrisés car nous avons affaire là à un cherf-d'oeuvre en la matière. Et finalement, on pardonnera la complexité de certaines symboliques qui entraine le scénario dans une profondeur au 3e degré qu'il est parfois difficile d'atteindre pour des esprits non aguerris et non coutumiers du fait, ce film est suffisamment BEAU pour se suffire à lui-même pour la simple contemplation de ce qu'il est.


Sa beauté est également accentuée par un casting de grande qualité au-dessus duquel domine bien évidemment un Albert Dupontel très juste. Philippe Rebbot - dans un autre registre que le comique Voyage à Mendoza - excelle dans un Jésus étrange et énigmatique. Bouli Lanners fait du Bouli Lanners mais, comme d'habitude, il le fait toujours très bien, sans parler de Mickael Lonsdale et consort. La puissance de leur jeu, quels qu'ils soient, réside incontestablement, tous à leur manière, dans leur capacité à incarner la déchéance d'hommes des derniers temps qui vivent moins d'espoir que dans l'attente, anxieuse ou non, de la mort.


Le scénario est très équilibré mais sans trop expliquer d'où on vient et sans jamais trop signifier où l'on va, il bascule inévitablement dans la très juste qualification entendue ce soir de "western contemplatif". Il faut aimer le genre, c'est un pari risqué car beaucoup n'aimeront pas. La trame narrative aurait peut-être méritée à gagner en clarté car beaucoup d'éléments du scénario, pourtant essentiels, sont à peine expliqués voire par du tout. Mais cela peut-il être envisageable sans affaiblir la lourdeur et la profondeur de tout le reste? Je ne suis pas certain. Nous débarquons au milieu de nulle part à suivre deux chasseurs de primes que l'on ne connaitra jamais réellement, accompagnant leurs rencontres de gens tout aussi mystérieux et égarés dans leur propre vie avant de repartir. Finalement l'histoire bouge à peine du début à la fin et le fil rouge (ce téléphone au contenu douteux) n'est qu'un prétexte narratif pour mettre en avant l'atmosphère apocalyptique et les rencontres, tout cela autour des codes classiques du western mais à la sauce "Chasse et Pêche". A partir du moment où l'on comprend cela alors tout le reste est un pur régal!

BenoitBarbibul
9
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le 26 févr. 2016

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Benoit Barbibul

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