Se souvenir des belles choses : voilà le programme de l’humanité, ou de ce qu’il en reste, dans un 2022 imaginé par les années 70. «People were always lousy, but there was a world, once », assène Roth, un des derniers vieillards à pouvoir témoigner de l’avant. Un brin didactique, la première partie du film fustige un futur d’autant plus inquiétant qu’il se réalise effectivement aujourd’hui, et qu’on ne peut que constater l’impuissance des hommes à infléchir la dévastation de la planète.
Même si son futur demeure d’actualité, Soleil Vert a mal vieilli. En ce qui me concerne, la simple vue du facies d’Heston est assez horripilante, d’autant qu’il ne semble jouer qu’avec la proéminence de sa mâchoire et la dilatation de ses orbites. Le rythme est parfois laborieux, les scènes de bagarres sont assez ridicules, puisqu’il s’agit le plus souvent de sur réagir à un poing pour tomber de la façon la plus grotesque possible sur un mobilier fragile qui n’attendait que les cascadeurs pour s’écrouler avec fracas (cf. les lits superposés dans le combat final). Dans le même esprit, la séquence des « dégageuses » anti émeutes, pelleteuses à manifestants, fait surtout sourire tant elle est laborieuse.
Ajoutez à cela un écueil personnel majeur, le fait que mon père m’ait raconté dans ma prime jeunesse la fin du film, révélation sur laquelle repose tout le scénario, et on pourra se demander quel intérêt j’ai pu diable lui trouver à cette œuvre.
Outre l’idée générale du film d’anticipation et son twist assez savoureux, deux éléments lui donnent une saveur particulière. Le premier est l’ambiguïté du personnage principal, son caractère de pique assiette allant gouter chez les riches, au fil de ses enquêtes, les vestiges d’un monde qu’il n’a pu connaître. Cette consommation va jusqu’à celle des « Furnitures », une des grandes idées du film, à savoir des femmes que les plus riches louent avec les appartements, bien de consommation parmi d’autres. L’attitude complice de ce procédé du protagoniste est assez intéressante : soit elle va dans le sens d’un sexisme propre aux 70’s, soit elle cherche à choquer en évitant de réellement s’indigner sur le sujet, à de rares répliques près… On optera pour la seconde solution.
[Léger spoil]
Le deuxième élément est la scène d’euthanasie d’un des personnages. Dans un monde surpeuplé, l’idée de se débarrasser des maillons faibles est on ne peut plus pragmatique. Outre le fait qu’on débarrasse les cadavres via des camions poubelles, ceux qui choisissent de mourir ont droit à une cérémonie en bonne et due forme, projection en cabine personnelle de ce que fut la nature avant qu’on la sabote. Belle idée pour une séquence assez émouvante qui vise à nous faire apprécier ce qui nous entoure encore.
De la même façon, la longue séquence muette de la découverte de Thorn sur la fameuse révélation est assez efficace.
Curieux constat, tout de même : si le film a vieilli, l’idée d’en faire un remake serait une erreur encore plus grave : il préserve tout de même un désespoir et une ambiguïté idéologique qui serait passé à la moulinette aujourd’hui, et de ce fait garde un véritable intérêt.