Je me suis lancé dans un challenge duquel je pourrais ne pas revenir vivant. Certains pensent que je risque l'overdose. D'autres que je vais probablement ensuite voir la vie avec un filtre Marvel. Que je vais voir partout dans la rue des méchants écrits sur une feuille de PQ et que je verrai en levant les yeux divers portails inter-dimensionnels. Pire encore, que mes proches morts vont revenir à la vie. A vous tous, je vous dis que vous avez tort. Ou du moins, que je l'espère.
Plus sérieusement, l'idée est de revenir à froid sur 10 ans et 18 films qui ont, plus pour le pire que pour le meilleur, révolutionné le genre du blockbuster, et de les revoir aujourd'hui pour savoir s'ils ont survécu à l'épreuve du temps.
Aujourd'hui : Homecoming
Bon. Maintenant j'arrive à le voir seulement pour ce qu'il est plutôt que pour ce que j'aurais voulu qu'il soit. J'aurais voulu qu'il soit à la hauteur des deux films de Raimi, à défaut de les surpasser. J'aurais voulu qu'il me fasse définitivement oublier les Amazing. J'aurais voulu que ce "retour à la maison" ne soit pas seulement un retour chez la maison mère, mais surtout, un retour en 2004 où Sam Raimi a réalisé l'un des plus grands films de super-héros de l'histoire.
Tout d'abord, on va commencer par le plus important : ça ne ressemble à rien de ce que Marvel a fait auparavant. Le film est un véritable high school movie, avec bal de fin d'année et tutti quanti. Mais, bien que le cast des teens soit plutôt bon malgré les caricatures ambulantes (après, c'est pas comme si John Hughes, première source d'inspiration du film, n'avait pas construit ses persos sur des caricatures, hein) je trouve que c'est un mauvais choix pour un tel film.
J'avoue que ça fait plaisir de voir un héros un peu plus terre-à-terre, avec des enjeux plus terre-à-terre, mais, c'était impossible de faire des concessions ? C'est justement beaucoup trop terre-à-terre. Spiderman est constamment sur ses pieds, on ne le voit jamais voltiger à travers les buildings de New York, et ses rares faits d'arme ne sont que des redites des épisodes précédents, très très très très souvent dans un meta un brin lourd, comme lorsqu'il sauve celle qu'il aime là où Andrew Garfield a échoué, ou que la voix de son costume lui conseille de l'embrasser alors qu'il est tête à l'envers.
Quand le premier Spiderman est sorti, il était révolutionnaire au niveau de ses effets spéciaux et la sensation ressentie devant les scènes où il tissait sa toile de building en building était incroyable. La scène du train du second épisode représente à mes yeux l'une des plus grandes scènes de l'histoire de ce genre, et elle est inscrite à travers l'un des meilleurs chapitres de ce genre, chapitre qui commence au café avec M-J et qui ne finit que lorsque le générique de fin commence.
J'ai une excellente mémoire. Et pourtant, j'avais quasiment tout oublié de ce Homecoming. Je savais vers quoi on allait parce que lorsqu'on revoit le film, ça ressemble beaucoup à un cahier des charges où les cases sont petit à petit cochées, mais je ne me souvenais presque de rien. Et ce sera encore le cas dans deux jours : je vais encore tout oublier de ce film parce que Spiderman ne fait jamais rien de mémorable.
La scène de l'ascenseur est vraiment bien. Celle du ferry est pas mal. Mais ce n'est jamais épique. Encore une fois, le film est beaucoup trop terre-à-terre. Et au final, toute l'énergie et le talent du film sont condensés dans les 15 premières minutes extrêmement fun où on ressent toute la dichotomie qui habite Peter. Mais malheureusement, elles annoncent un autre problème important du film : Peter crée ses propres problèmes avant de les arranger, non pas sans dégâts.
J'ai l'impression que c'est en train de devenir un gimmick des scénarios d'initiation (ou peut-être que ça l'était déjà et que je n'ai rien en mémoire, là tout de suite) puisque Baby Driver suit un peu le même pattern, mais avec beaucoup plus de talent dans l'écriture. Chaque fois que Peter est Spidey, une catastrophe arrive. Il crée ses propres démons, et là encore, le scénario est intrinsèquement méta puisque son ennemi est carrément le père de sa cavalière de bal. Spiderman détruit son restau préféré, manque de faire couler un ferry, fait échouer une enquête du FBI, fait s'écraser un gigantesque avion, heureusement dans un terrain vague, mais il frôle la catastrophe, et, accessoirement, rappelle de très mauvais souvenirs aux habitants de NY.
C'est un point qui pourrait être intéressant s'il était mieux écrit et si Peter grandissait réellement et apprenait de ses erreurs. Comme c'est le cas avec Baby Driver. Ici, à la fin du film, Peter continue de ne pas écouter Happy et Tony qui lui disent d'avoir son bac et d'aller à la Fac, il continue de provoquer des catastrophes avec cet avion qui manque de s'écraser. Mais eh, cette fois-ci, au moins, il a arrêté les méchants !
Et enfin, ce qui me dérange le plus : Peter Parker n'est rien sans Tony Stark. Même si on le voit parfois bidouiller et qu'on comprend très vite son génie, c'est Tony Stark qui fait son costume. Et je trouve ça relativement insultant. Voire très insultant avec l'arrivée du Iron Spider à la fin du film.
Ce n'est pas ça, Spiderman. Ce n'est pas un mec qui est toujours sur ses pieds, qui n'apprend pas des masses de ses erreurs, et à qui on donne des costumes comme le gentil enfant qu'il est.
Bien que RDJ ne soit pas très présent dans le film et nous offre la meilleure scène, son spectre hante le film. On entend constamment "Stark", "Tony", "Iron Man", ou on voit Happy. Je n'arrive même pas à me rappeler que c'est un film sur Spiderman puisque l'intrigue tourne autour d'objets volés à Tony Stark, d'un planejacking sur Tony Stark, d'un bad guy méchant à cause de Tony Stark, et d'un ferry sauvé par Tony Stark.
C'est un peu comme si Marvel Studios doutait de la réussite d'un Spiderman seul et qu'ils avaient mis l'ultra populaire Iron Man pour faire des milliards au box office, jusqu'à nous teaser un duo des deux volant ensemble qui n'arrivera jamais, pas même dans les scènes coupées. Marvel récupère enfin son héros le plus populaire, le héros le plus populaire au monde avec Batman, et décide de laisser sa diva vampiriser le film.
Encore une fois, c'est pas complètement con d'avoir un Tony en mentor, d'autant qu'il est touchant, mais c'est toujours une question de dosage. Et d'insulte quand il lui fait ses costumes. Dire que les puristes ont hurlé lorsque la toile sortait des poignets de Tobey Maguire.
Malgré tout ça (j'avoue, c'est beaucoup), le film est drôle et plutôt divertissant. Il n'a jamais recours aux slapsticks, ce que je ne peux que saluer. Michael Keaton fait d'un méchant caricatural l'un des meilleurs de tout le MCU, Tom Holland est génial, j'ai beaucoup aimé la musique, et ça ressemble parfois à quelque chose. Rarement, mais ça arrive.
Ca ressemble beaucoup à un film qui n'avait pas le droit de rater et qui ne prend pas le moindre risque. Maintenant que ça a marché, j'espère que l'épisode 2 sera enfin à la hauteur du personnage, parce que ça fait quand même 14 ans que Raimi a sorti son Spiderman 2, et ça commence à faire long.