Avec le départ de Roger Moore, avec pas moins de 7 films à son actif et 12 années de service, c’est tout un chapitre de la saga James Bond qui se ferme. Un chapitre marqué par plus d’humour et un côté plus décomplexé, et, après de multiples rebondissements, Timothy Dalton hérite finalement du rôle. Et c’est une toute nouvelle version du personnage que nous découvrons avec Tuer n’est pas jouer.


En plein exercice pour la section double 0, un invité surprise décide de tirer à balles réelles alors que les faux gardes de la base tiraient des projectiles non létaux. S’exercer, c’est jouer, mais Tuer n’est pas jouer. Le ver a gâté la pomme, et il faut trouver d’où il vient. En cette fin d’années 1980, la Guerre Froide touche bientôt à son terme, et tout peut encore basculer dans ce monde au bord de la rupture. Octopussy et Dangereusement Vôtre avaient initié ce retour vers ce long conflit comme cadre de l’intrigue, en opérant un assagissement progressif, vers une sorte de froideur qui caractérise l’époque. Cela entre en accord avec la vision de John Glen, qui, dès que Rien que pour vos yeux, annonçait cette prévalence d’un certain sérieux sur un côté plus détaché et humoristique prôné dans les années 1970, sans totalement rompre avec pour autant. Force est de constater qu’avec Tuer n’est pas jouer, le virage est radical.


Tout d’abord, il y a Timothy Dalton, ce nouveau visage, au regard glacial, incarnant un James Bond beaucoup plus secret et dur que son prédécesseur. S’il continuer à lancer quelques répliques bien senties, on sent qu’il n’est pas là pour plaisanter, mais bien pour agir. A son image, le film privilégie les actes aux mots, pour nous embarquer dans une intrigue d’espionnage assez complexe qui, pour son cadre, son rythme et son ambiance, nous rappelle Bons baisers de Russie. Pour ce quinzième film, John Glen nous plonge dans une ambiance aux teintes froides, traduisant une certaine forme de torpeur dans lequel le monde s’est enlisé, tout en générant un climat relativement anxiogène. Tuer n’est pas jouer offre un vrai retour dans une intrigue d’espionnage, grave, froide, teintée de mélancolie, portée par un Timothy Dalton sérieux et dans l’action, où James Bond prend les choses davantage à cœur, plus qu’avec humour et détachement.


Ce quinzième film, loin d’être avare en scènes d’action spectaculaires, parvient à donner une véritable crédibilité à James Bond, bien plus impliqué dans sa mission, et mis en danger, ce qui manquait cruellement auparavant. Ce changement s’opère également dans le rapport entre James Bond et les femmes, bien différent ici, puisque l’agent britannique ne s’approchera que de Kara, d’abord pour dénicher des informations, puis pour des raisons plus personnelles, donnant du relief à cette relation qui n’avait pas non plus de réel précédent hormis celle liant James Bond à Teresa dans Au service secret de Sa Majesté. Tuer n’est pas jouer se rapproche d’ailleurs du film de Peter Hunt à bien des égards, dans la mise en avant d’un Bond plus secret, physique mais aussi fragile, toujours sur la brèche, le tour dans une ambiance mélancolique et crépusculaire. Maryam d’Abo fait une superbe James Bond girl, avec une réelle importance, et certains seconds rôles se distinguent, comme le sculptural Necros. Le seul point d’ombre reste, sûrement, la trop faible exposition et exploitation du personnage de Whitaker, antagoniste principal du film qui manque ici de place pour vraiment avoir de l’ampleur.


Dire que Tuer n’est pas jouer est l’un des meilleurs James Bond ne constitue pas une grande prise de risque, tant le film est maîtrisé en tous points, redonnant ses lettres de noblesse à James Bond, sans vouloir manquer de respect à Roger Moore notamment, qui a connu une période assez inégale et riche en étrangetés. C’est un retour aux bases, à ce qui fait le charme d’un James Bond, où tout fonctionne en harmonie. Nouvelle mention spéciale accordée à Timothy Dalton, souvent assez oublié, au charisme pourtant magnétique, offrant une incarnation très intéressante de James Bond, mêlant mystère, action, sensibilité et authenticité. Bond est plus humain, et la saga semble avoir retrouvé un équilibre. Un épisode complet et abouti !


Critique écrite pour A la rencontre du Septième Art

Créée

le 3 oct. 2020

Critique lue 75 fois

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JKDZ29

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