Kazan brosse un portrait sans concession de la société capitaliste en nous montrant les revers de la communication et ses dérives, à l’image de l’insolent Larry Rhodes, le protagoniste.
Incarné par un Andy Griffith remarquable (dont le personnage annonce, par un drôle d’effet de hasard, le destin à venir de l’acteur), véritable bête de scène, inépuisable, à l’énergie contaminatrice, capable aussi bien d’improviser une chanson de circonstance à la guitare, de haranguer les foules que de séduire n’importe quel public, homme à la gouaille populaire et fédératrice (que certains qualifieront toutefois de « démagogue »), au franc parler dérangeant mais plein de vérité, l’ami dont tout le monde rêve secrètement, Un homme dans la foule, réalisé à une époque où se développe ce nouvel objet d’études appelé « communication » et qui deviendra très vite un instrument de pouvoir et de contrôle des masses, dénonce les dérives de cette même communication, pouvant à la fois servir des initiatives bénéfiques à la société et des intérêts personnels les plus égoïstes, que ce soit dans le secteur industriel à travers la publicité ou en politique avec la récupération et utilisation à dessein des célébrités.
Construit en deux parties, grandeur et décadence, ou si vous préférez l´ascension puis la chute, le film nous fait passer à l’image de Rhodes de l’ivresse à la gueule de bois, de l’admiration à la condamnation morale – encore que, qui n’a jamais rêvé d’un tel pouvoir, quitte à devoir prostituer un peu ses propres valeurs? – tout en nous faisant passer en revue toutes les coulisses de ceux qui nous dirigent.
Rappelant étrangement l’homme de la rue de Capra, tant par la structure narrative que par les thèmes abordés, mais dont il n’est pourtant pas un remake, Un homme dans la foule parle juste et fort, dévoile ce qu’il faut voir sans rien nous cacher, nous fait vibrer.
Un film à découvrir, sans aucun doute.