La femme est l'avenir de la comédie française

En début d'année, la comédie à la française fût un désastre. Les Tuche 2, La Tour 2 contrôle infernale où encore Pattaya, ne m'ont pas donné envie de me réconcilier avec ce genre, malgré la belle surprise La Vache. Alors quand on m'annonce que Victoria est drôle, je glousse intérieurement en me disant bêtement "ouais, ouais", ce qui n'est pas très constructif. Mais face à des sorties peu stimulantes en ce mois de septembre, je me laisse tenter car Vincent Lacoste. Il était ma seule motivation en poussant les portes de la salle et en sortant, je n'avais qu'une envie, demander la main de Virginie Efira.


Victoria (Virginie Efira) est une femme dite "moderne", un terme qui ne veut plus rien dire, mais bon, comme il faut mettre les gens dans des cases pour mieux les définir.... Bref, elle est avocate, mère de deux adorables jeunes filles et doit jongler avec son travail trop prenant et pas vraiment valorisant, surtout financièrement, une vie sentimentale catastrophique et un ex-mari (Laurent Poitrenaux) toujours obsédé par elle, au point d'en faire l'héroïne de son blog. Au milieu de ce marasme, il y a un de ses amis Vincent (Melvil Poupaud) accusé d'avoir poignardée son amie et qui veut absolument être défendu par elle. Victoria va-t'elle s'en sortir où la vie a-t'elle décidé de ne pas lui faire de cadeaux.


La vie de Victoria ressemble à son appartement et son bureau, c'est un immense bordel. On dit souvent que l'état de notre lieu de vie, ressemble à notre état d'esprit et celui de Victoria est chaotique. Elle enchaîne les plans foireux à son domicile, ce qui nous vaut un défilé de cas sociaux dont un fameux BeauGosseDu75 (où 92, peu importe), qui n'a rien à voir avec son pseudo et sa photo de profil. Elle doit aussi composer avec son ex-mari encombrant, qui se permet de débarquer à tout moment, mais aussi avec un ex-client du genre intrusif, au point de devenir son baby-sitter. Il s'agit de Sam (Vincent Lacoste), un ancien dealer voulant faire du droit, alors qu'il est en CAP pâtisserie (où boulangerie, peu importe encore). Comme Victoria, il ne semble pas vraiment savoir où il en est, sauf qu'on sent qu'il a un crush pour cette femme. Leur relation va avoir des répercussions sur le futur de chacun, en bien où pas, suspense.


Une comédie française contemporaine est capable d'être drôle du début à la fin. Cela faisait longtemps que j'attendais un film comme celui-ci dans le paysage cinématographique français. Certes, on a eu quelques bonnes surprises, mais rien ne reposant sur un personnage principal féminin. Un personnage rempli de névroses, en échec sentimental, n'ayant pas de vie sociale et incapable de prendre soin de ses filles, comme d'elle-même. Au premier abord, elle ne fait pas rêver. Virginie Efira est une belle femme, mais qui a envie de se mouvoir dans son appartement bordélique et de l'écouter disserter sur sa vie peu glorieuse. Elle n'est pas glamour, se laisse bercer par l'alcool, les médocs et on l'a sent au bord du gouffre, ce qui n'a rien d'attractif (sauf pour moi, mais ceci est une autre histoire). Les hommes ont juste envie de partager un moment de sexe avec elle, sans faire sa connaissance. C'est un peu le reflet de notre société actuelle, où tout est un produit de consommation très rapide, même le corps humain. Mais n'est-elle pas responsable de l'état désastreux de sa vie ? Elle passe de son psy, à sa voyante, au tribunal, à son bureau et à son appartement, sans avoir eu le temps de dîner, de se faire une toile où autres plaisirs culturels. Elle va droit dans le mur et l'impact risque d'être violent.


Virginie Efira dans le rôle principal, cela ne m'inspirait guère. Après, je n'ai pas vu ses films, mais il faut dire qu'Un homme à la hauteur ou Une famille à louer, cela ne me donnait vraiment pas envie. Dans Elle, sa prestation était convaincante, mais j'avais mis cette réussite sur le compte de la direction d'acteurs de Paul Verhoeven. Une erreur de jugement, tant elle est divine dans ce rôle difficile où elle expose sa vulnérabilité, tout en nous touchant pas son humour, l'intonation de sa voix, ses haussements de sourcils où son regard. Elle passe par toutes les étapes et on a une furieuse envie de la prendre dans nos bras pour lui dire que tout va bien se passer. Vincent Lacoste va avoir la chance de le faire pour nous. Son rôle est ambigu, est-il son ange gardien où un stalker ? On ne sait pas grand chose de lui, on ne le voit que dans l'appart et sa bienveillance semble suspecte.


Ce portrait tragi-comique d'une femme au bord de la crise de nerfs est une réussite. La réalisatrice Justine Triet aborde des sujets délicats, sans jamais tomber dans le pathos et encore moins le drame. Elle colle sa caméra auprès de Virginie Efira en l'a suivant dans ses tribulations d'une avocate à Paris. L'essentiel de l'action se déroule dans son appartement, où tout le monde se croise à un moment où un autre. Cela ne fait pas de ce film un huis-clos, on a souvent l'occasion de prendre le train pour se rendre dans un tribunal pour assister aux dépositions d'un chien et d'un singe.... Cela semble surréaliste et c'est le cas. Pourtant, ce n'est jamais ridicule, bien au contraire. Même le mariage se déroulant au début du film avec ce couple gênant s'exhibant sur scène, ne met jamais à mal la bonne humeur qu'offre cette comédie, alors que tout semble en mesure de rendre l'histoire dramatique.


Après Nocturama et Divines, le cinéma français prouve qu'il est encore capable de me surprendre, en m'offrant diverses émotions à travers des films très différents, pourvu que cela dure.

easy2fly
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le 22 sept. 2016

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Laurent Doe

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