Je me souviens encore du choc vécu en 2011 suite à ma séance de Tree of Life, depuis je suis devenu un admirateur de Malick. J'aime toute son oeuvre et pourtant ce cinéaste à la fois visionnaire, poète et philosophe, me surprend encore.
Difficile de rester de marbre face à la beauté de Voyage of Time, s'il ne s'agit pas forcément d'un film ici mais bien d'un documentaire, il met pourtant en avant toutes les thématiques et les obsessions de Terrence Malick. La narration assurée par Cate Blanchett vient poser la dernière pierre à ce bel édifice. Certes on pourra reprocher certaines choses au documentaire, notamment certains effet-spéciaux qui pêchent parfois un peu comme ceux concernant les créatures préhistoriques, mais en revanche difficile de faire l'impasse sur les ambitions du projet. Raconter l'histoire du monde en alliant avec justesse science, théologie et poésie, tient du miracle.
Projet gestant depuis quarante ans chez le réalisateur, Voyage of Time s'impose d'emblée comme une expérience unique, une oeuvre qui pose des questions sans vouloir y apporter obligatoirement des réponses, un film qui en somme nous invite à réfléchir et ils ne sont pas nombreux ces derniers temps. Personnellement ce visionnage m'a permis de prendre conscience d'une chose assez essentielle je pense dans toute l'oeuvre de Malick : il n'aborde pas la Terre comme un lieu, une chose ou un objet spatial, mais plutôt comme un personnage, c'est sûrement là d'ailleurs la grande force de ce cinéaste pour mieux nous parler de la nature. Dans Voyage of Time la planète (entre autre) est vivante, la narration s'adresse directement à elle, la désignant comme mère "Ô Mother". Ainsi grâce à cette dimension très spirituelle, toujours alliée avec des schémas plus scientifiques, le récit dépeint le passé, le présent, le futur, la vie et la mort.
Voyage of Time est un peu la version-longue de la scène de la Genèse dans Tree of Life. Bien que j'adore cette partie là dans le film avec Brad Pitt et Jessica Chastain, elle traduisait quelque chose de fort au sein de la trame principale, ici il ne faut pas chercher à l'interpréter. C'est pourquoi Voyage of Time malgré son excellence m'émeut moins. En revanche la mise en scène, la photographie et les effets visuels sont ici présentés comme une sorte d'apogées de toute l'oeuvre de Terrence Malick, dévoilant ses exigences et sa rigueur pourtant au coeur d'un cheminement intuitif en terme d'écriture. Le film n'a pas peur d'être plus frontal également, quand il parle de l'homme notamment. Malick filme des regards, des visages, des scènes qu'elles soient belles, tristes ou cruelles. Ce n'est pas seulement la vie qui est filmée ici mais aussi le monde et ceux qui le peuplent. A nouveau le choix des musiques à un sens et ces dernières viennent sublimer les séquences pourtant toutes déjà magnifiques.
C'est donc un peu le film somme de Terrence Malick, à nouveau il nous parle de la vie, de la nature, un peu moins de la grâce même si cette dernière chez lui est inhérente à la beauté du monde. C'est le plus important dans le fond, saisir cette invitation à célébrer le monde, l'univers et la vie. Une expérience, comme souvent chez Malick, qu'il faut vivre plutôt que comprendre.